Des candidats qualifiés à la suppléance refusés, malgré le manque de personnel dans les écoles


Dominique Scali
Une enseignante qualifiée ne comprend pas pourquoi sa candidature comme suppléante a été refusée par un centre de services scolaire qui doit pourtant souvent recourir au remplacement d’urgence en pleine pénurie de personnel.
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«Je nage dans une mare d’incompréhension», s’étonne Karine Richard, 44 ans.
Il y a une semaine, elle a appris que sa candidature comme suppléante avait été rejetée par le Centre de services scolaire des Mille-Îles (CSSMI), dans les Laurentides.
L’annonce est tombée après un processus de sélection de plus d’un mois, incluant une entrevue «très impersonnelle» et froide en visioconférence, raconte-t-elle.

«Votre candidature, malgré l’intérêt qu’elle représente, n’a pas été retenue à cette étape de notre processus d’embauche», peut-on lire dans le courriel.
Elle a pourtant son brevet et un baccalauréat en enseignement du français langue seconde, deux documents que Le Journal a consultés.
Mme Richard a 14 ans d’expérience comme enseignante, soit 4 ans au secondaire dans des écoles de la Rive-Nord et 10 ans en francisation à Montréal.
Pas la seule
«Je veux seulement faire de la suppléance», s’impatiente-t-elle. «Il me semble que j’ai quand même fait mes preuves».
Elle a demandé au CSSMI la raison du refus. «Nous ne faisons malheureusement pas de suivi personnalisé avec chacun des candidats dont la candidature n’a pas été retenue», lui a-t-on répondu.
Mme Richard n’est pas la seule personne qualifiée à avoir essuyé un refus du CSSMI dans les dernières semaines.
Le Journal a parlé à un ingénieur à la retraite qui a lui aussi son brevet d’enseignement, qui a déjà enseigné dans des écoles secondaires ainsi qu’au cégep, et dont la candidature a été refusée comme suppléant après l’entrevue.
Il a toutefois demandé à rester anonyme car il travaille maintenant comme suppléant dans un autre centre de services.
Grands besoins
Au syndicat de l’enseignement des Basses-Laurentides, on indique toutefois que la pénurie est réelle, les directions ayant régulièrement recours au remplacement d’urgence, c’est-à-dire un système qui permet d’obliger certains enseignants à remplacer dans la classe d’un autre.
«Nous sommes dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, mais nous ne souhaitons pas descendre nos standards d’excellence pour autant», explique par courriel Mélanie Poirier du CSSMI.
Les raisons qui peuvent expliquer qu’un candidat n’est pas retenu sont nombreuses et peuvent aller du fait d’avoir de «mauvaises références», «des antécédents judiciaires», jusqu'à ne pas «correspondre aux valeurs de l’organisation».
Pas d'antécédents
Karine Richard assure n’avoir aucune tache à son dossier, ni aucun antécédent judiciaire.
Les deux anciennes directrices qu’elle avait mises comme références ont changé d’établissement en raison du roulement de personnel, explique-t-elle.

Elle a pris une pause de quatre ans de l’enseignement, notamment pour se consacrer à ses trois enfants ainsi qu’à d’autres activités, comme ses projets d’écriture, explique-t-elle.
Elle déménagera bientôt chez son conjoint à Sainte-Thérèse et espérait donc faire un retour progressif à l’enseignement dans les écoles près de son futur domicile, tout en conservant son emploi actuel dans le milieu de la restauration.
«La seule chose que je vois [qui pourrait expliquer le refus], c’est s’ils ont fouillé sur les réseaux sociaux. Ils ont peut-être vu que j’ai été correctrice et rédactrice pour Summum», un magazine de divertissement pour hommes, dit-elle.
Vous avez de la difficulté à vous faire embaucher dans un centre de services scolaire? Écrivez-nous à dominique.scali@quebecormedia.com