De Pascale Nadeau à Lisa LaFlamme

Guy Fournier
Pascale Nadeau poursuit Radio-Canada. Lisa LaFlamme poursuivra-t-elle CTV qui vient de lui montrer la porte?
Après 35 ans de service – un an de moins que Pascale à la SRC – et plus de 10 ans comme cheffe d’antenne du CTV National News, le téléjournal le plus populaire du pays, c’est par le biais de Twitter que la réputée journaliste dut annoncer que CTV n’avait pas renouvelé son contrat.
« Prise au dépourvu » lorsqu’on lui a appris la mauvaise nouvelle, le 29 juin, on lui avait interdit d’en parler. Après son « tweet » de lundi dernier, Madame LaFlamme a disparu de l’écran.
À moins d’un changement de venue qu’on ne prévoit pas, il n’est pas question à CTV de lui rendre le moindre hommage, comme TVA l’a fait avec éclat le 16 juin dernier pour le départ à la retraite de Pierre Bruneau.
La fin précipitée et inattendue de Madame LaFlamme au CTV National News reste pour l’instant aussi nébuleuse que celle de Pascale Nadeau à la SRC, il y a deux ans.
Après une plainte anonyme d’une subalterne la trouvant trop pointilleuse, Madame Nadeau fut suspendue pour un mois, mais elle ne revint jamais à l’antenne.
L’an dernier, en août, Radio-Canada annonça qu’elle prenait sa retraite, ce que Pascale a dénoncé et qualifié de « congédiement déguisé ». Les choses ne sont pas tellement plus claires dans le cas de Lisa LaFlamme.
QUELLE EST LA VÉRITÉ ?
Pendant la pandémie, la cheffe d’antenne avait décidé de ne plus faire teindre ses cheveux, arborant une magnifique coiffure grise qui trahissait ses 58 ans. Comme on l’a fait dans le cas de Pascale Nadeau, plusieurs de ses collègues ont attribué son départ à l’âgisme, mais il n’en est rien selon les interlocuteurs que j’ai à Toronto.
Le climat était loin d’être au beau fixe entre Lisa et Michael Melling, vice-président à l’information de Bell Média depuis janvier dernier.
Très libre de ses mouvements jusqu’à la nomination de ce dernier, Lisa n’avait plus la même latitude. Melling voulait réduire ses frais de déplacement et plafonner le budget de l’information. Il considérait aussi que madame en menait beaucoup trop large et que son intransigeance à l’égard du personnel de la salle de nouvelles créait un climat toxique.
Dans le cas de Pascale Nadeau, Radio-Canada invoqua aussi son intransigeance et le climat toxique qui en aurait résulté. La nouvelle génération de journalistes exige d’être traitée avec des gants blancs, ce qui était loin d’être le cas il y a une ou deux décennies.
LISA NE FAIT PAS DE QUARTIER
Lisa LaFlamme est intraitable lorsqu’il s’agit de liberté de la presse. En 2015, insatisfait d’une décision du président du CRTC Jean-Pierre Blais, Kevin Crull, alors président de Bell média, ordonna à la direction de l’information de CTV de ne plus lui donner de temps d’antenne.
LaFlamma passa outre à l’ukase et le soir même de l’interdiction, Blais apparut à l’écran du CTV National News. Comme il fallait s’y attendre, l’intervention de Crull ne fut pas longue à être connue. Il s’en excusa, mais finit par remettre sa démission.
Se rappelant sûrement cet incident, Michael Melling eut la prudence d’invoquer « une décision administrative occasionnée par le changement d’habitudes des téléspectateurs » pour mettre fin au contrat de Lisa LaFlamme.
C’est une explication absolument saugrenue quand on sait que le téléjournal qu’elle animait a presque toujours obtenu plus d’écoute que ceux de Global et de la CBC combinés. Lisa LaFlamme est une femme beaucoup trop déterminée pour qu’on en reste là. À suivre.