Dans son nouveau roman, Antoine Charbonneau-Demers partage un journal de voyage romancé et explore les raisons qu'il trouve moins «nobles» de se lancer dans l'écriture


Marie-France Bornais
Après avoir publié Coco (prix Robert-Cliche du premier roman) et Good boy, des livres qui ont mis en lumière son talent d’écrivain, Antoine Charbonneau-Demers a mis plusieurs années à écrire son nouveau livre. Roman sans rien est une histoire en deux volets qui est née de plus de six ans de travail d’écriture, de réflexion et de réécriture. Il est question de voyages, de rencontres, de liaisons, de liens noués et défaits, d’introspection, d’ambiance, de réflexions sur l’écriture.

En entrevue, Antoine Charbonneau-Demers explique comment il a conçu Roman sans rien. «La première partie, c’est un journal de voyage que j’ai retravaillé et romancé un peu. La deuxième partie, c’est un roman, vraiment, où il y a plus d’intrigue et plus d’action. On est plus dans un roman classique.»
Au début, un journal de voyage
Au départ, Roman sans rien était un journal de voyage. «Au début, j’en parle d’ailleurs, je rencontre un gars à qui je veux beaucoup plaire et qui me dit: «Lorsque t’écris, c’est comme si ça paraissait quand c’était romancé, quand c’est pas vrai».
«Ça m’a fâché et je me suis dit: je vais lui en écrire un roman, sans rien. C’est-à-dire qui raconte juste qu’est-ce que je suis, sans trop inventer, sans avoir d’idée. Je me suis mis à écrire mon journal de voyage en me disant: ça va être ça, mon livre.» On suit donc l’auteur dans ses aventures et ses mésaventures à Nice, Bruxelles, Berlin, puis au cœur d’une difficile retraite à Montebello.
Quand il est arrivé à la fin de ce journal, Antoine n’était pas satisfait. «J’avais l’impression qu’il n’y avait pas de réponse. C’était la description de plusieurs aventures qui me sont arrivées en voyage. Mais il n’y avait pas de réponse à tous les questionnements que je lance ni sur la souffrance du personnage.»
Parler de l'autofiction
La deuxième partie de Roman sans rien présente un roman où on retrouve l’alter ego d’Antoine, Paris Dulove, un auteur. «Dans ce roman-là, je parle de l’autofiction, je parle des conséquences de l’écriture autobiographique sur l’entourage, sur ma famille.»
Antoine Charbonneau-Demers trouve que les auteurs parlent beaucoup des raisons nobles d’écrire: la littérature, la poésie, etc. «Je trouve que, souvent, on ne parle pas des raisons qui sont moins «nobles», comme le désir d’être aimé, le désir de plaire, d’avoir de l’attention, peut-être de s’exprimer quand on n’est pas capable de le faire autrement dans le quotidien, avec sa famille et ses amis.»
«Mes livres, ça a toujours été un peu un moyen, pour être honnête, d’attirer l’attention ou d’essayer de dire quelque chose à mon entourage. C’est pas nécessairement gagné... c’est pas nécessairement le bon moyen à prendre. Avec Roman sans rien, je voulais vraiment m’attaquer à ces raisons d’écrire qui ne sont pas très nobles.»
Antoine a préféré écrire la seconde partie de son livre, qu’il trouve plus fraîche et plus lumineuse. «Il y a beaucoup de personnages colorés. Ça vient soulager un peu la lecture parce que la première partie est vraiment aride, quand même. Il en arrache tellement que ça prenait une autre partie! Mais il n’y a pas de lumière sans ombre, et pas d’ombre sans lumière.»

Roman sans rien
Antoine Charbonneau-Demers
VLB Éditeur
376 pages
▶ En librairie le 13 mars.
- Antoine Charbonneau-Demers est né en 1994 à Rouyn-Noranda.
- Il a reçu le prix Robert-Cliche du premier roman en 2016 pour Coco.
- Il est également lauréat, en France du prix du Jeune Écrivain 2019 et pour Good boy, du Prix du roman gai 2020.
«Ce serait un livre de madame, un livre avec un verger sur la couverture, un livre d’été, un livre d’aéroport, un livre de chez Costco, un livre écrit comme une mauvaise traduction, un vieux livre poussiéreux qui emprunterait ses temps de verbes aux morts, à qui on ne reproche jamais rien. Tant qu’à essayer de plaire, il ferait un vrai livre ordinaire, un livre affreusement normal.»
- Antoine Charbonneau-Demers, Roman sans rien, VLB Éditeur
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