Pékin 2022: copie conforme de Tokyo
Le directeur exécutif des sports de la délégation canadienne a relevé le défi d’organiser deux olympiades en même temps


François-David Rouleau
PÉKIN | À six mois d’intervalle, la tâche d’organiser deux olympiades était colossale, voire herculéenne. En menant les deux projets de front, la délégation canadienne a fait d’une pierre deux coups. Le plan de préparation de ces Jeux de Pékin est en fait une copie conforme de ceux de Tokyo qui fut un franc succès.
• À lire aussi: Justine passe en finale
• À lire aussi: Pékin 2022: Violette derrière son papa
• À lire aussi: Une leçon à grande vitesse pour Kaleigh Quennec
À quelques heures du début de la cérémonie d’ouverture au magnifique « Nid d’oiseau », Éric Myles se dit fier du chemin parcouru depuis deux ans et de l’immense travail abattu.
En mars, quand le puissant vent olympique s’essoufflera, le directeur exécutif des sports du Comité olympique canadien (COC) poussera un soupir de soulagement, bien installé avec sa conjointe dans sa nouvelle demeure au bord de l’eau.
Car depuis janvier 2020, comme tout le monde sur la planète, il est pris dans une véritable machine à laver.
L’organisation des Jeux olympiques n’est pas simple. C’est d’une complexité affolante quand on s’occupe de centaines de personnes.
Pour relever l’immense défi de Pékin 2022, il a usé d’audace. Comme le plan de Tokyo avait fonctionné avec brio en juillet dernier en établissant un record sportif et une fiche d’infection à la COVID-19 quasi immaculée, il l’a répliqué.
Prévoir le pire
« On a repris notre plan en l’ajustant aux apprentissages de cet été. On s’est aussi ajusté à la nouvelle réalité, explique Myles en entrevue avec Le Journal de Montréal. Il y a tellement d’ajustements à faire comme on est dans un autre monde. Ça prend un temps fou. On travaille constamment avec des paramètres différents. »
Comme il l’avait déjà expliqué au Journal à Pyeongchang en 2018, il planifie toujours pour le pire. Il s’adapte ensuite.
Paré à toute éventualité sportive et sanitaire au Japon, le COC avait établi un programme des plus strict.
Un plan inspiré, entre autres, du retour au jeu des grandes ligues professionnelles d’Amérique du Nord et ensuite bichonné dans tous ses aspects.
Tout en ajustant ses paramètres, il n’avait répertorié aucun cas dans sa délégation de 840 personnes.
Éviter la contamination
Ce programme comptait, entre autres, la vaccination complète, un temps limité au village olympique avec une arrivée tardive avant les compétitions et un départ rapide par la suite.
On se souvient du nombre restreint d’athlètes aux cérémonies. Le Canada ne souhaitait surtout pas devenir un facteur de contamination.
Pour la sécurité des siens, il avait donc surpassé les exigences sanitaires du Japon.
Son plan était si strict et efficace que le COC a même pu relâcher un tantinet les mesures pour contrer la COVID-19 qu’il avait imposées.
Proactivité
Pour se démarquer du lot, et il l’explique candidement, il salue la proactivité et la rapidité d’exécution de son organisme.
À son avis, son comité national figure parmi les chefs de file du monde pour sa gestion des enjeux pandémiques en milieu sportif. Avec un taux de satisfaction de 98 % de ses athlètes au Japon, rien de scientifique bien sûr, il admet que c’est un grand vote de confiance. C’est aussi un avantage compétitif.
Depuis que le Canada a établi ses quartiers généraux à Pékin et qu’il y a accueilli ses athlètes, le comité est satisfait des résultats sanitaires. Jeudi, il ne comptait encore qu’un seul cas positif toujours placé en isolement. Ils étaient près d’une demi-douzaine il y a quelques jours.
« On commence à pouvoir souffler un peu, mais on n’est pas encore complètement sortis du bois », image l’homme qui en est à une cinquième expérience olympique.
Il adhère au discours du médecin en chef de l’organisme national, Mike Wilkinson, qui rappelle que la situation évolue toujours très rapidement.
Imaginer des Jeux sécuritaires
Alors qu’il se trouvait à Tokyo en janvier 2020, jamais Éric Myles n’aurait cru possible d’accomplir toute cette besogne avec succès jusqu’à aujourd’hui.
« C’était l’apocalypse, confie-t-il. Je me souviens que David Shoemaker, notre PDG, m’avait regardé et [avait] dit qu’il me sentait anxieux. On s’est réuni et on s’est alors mis en mode pro-actif. On n’attendait pas les décisions des autres autour. Nous avons bâti un cadre décisionnel pour imaginer des Jeux sécuritaires. »
« À Tokyo, on a bien vu que notre plan nous mettait en confiance et qu’il fallait faire pareil pour l’hiver », enchaîne-t-il.
Chaque olympiade a ses couleurs et représente un défi différent. En Chine, nul besoin de fouiller bien loin. C’est la gestion de la pandémie et la complexité à y mettre les pieds.
Rien à voir avec le contexte politique, un faux enjeu que Myles rejette du revers de la main puisque le COC a maintenu des liens forts avec le comité organisateur, précise-t-il.
Moins d’inquiétudes
Mais au fil des derniers mois, notamment lors de la flambée du variant Omicron, Myles n’a jamais été inquiet pour l’organisation de ces Jeux.
Le train était en marche depuis très longtemps et il n’était pas question de l’arrêter.
« C’est complexe et énorme. On ne peut pas hésiter ou prendre des demi-mesures, sinon, on est cuit. On le voit avec les actions d’autres pays. On a tout mis sur la table. Si ça devait tomber, ce serait tombé. On était prêt. »
Selon lui, les athlètes prouveront l’efficacité de ce plan par leurs résultats au cours de la prochaine quinzaine.
Pékin Express
L’équipe Hazmat

Quand on prétend qu’on est sur une autre planète... Jeudi, en pénétrant dans l’enceinte du Stade intérieur national réservé aux matchs de hockey féminin où les Canadiennes démarraient le tournoi face aux Suissesses, on a fait le saut. Et tout un ! On pouvait se demander si elles n’affrontaient pas les cinq membres d’une équipe spécialisée dans les matières dangereuses qui étaient cordés en bordure de patinoire. À bien vérifier, il semblait s’agir du personnel médical et paramédical. Après cinq jours à Pékin, on ne s’habitue toujours pas à les voir à tout moment. Ils font vraiment partie du paysage olympique.
Pas un grain
Il n’y a pas de palmiers comme à Sotchi, en Russie en 2014, mais il n’y a pas un de flocon de neige à Pékin. Zitch, nada, zéro. On peut bien chercher dans la bulle olympique, on n’en trouve pas. Depuis deux jours, le soleil plombe. Le mercure dépasse le point de congélation. Quand il se cache, c’est une autre affaire. Fait pas chaud ! Mais quand on pense aux températures glaciales du Québec en janvier, il ne faut pas se plaindre. Reste que les bouillons traditionnels chinois réchauffent matin, midi et soir.
Cité illuminée

De jour, lors de nos déplacements en ville, on peut voir que Pékin se veut impressionnante. Les hauts et massifs bâtiments s’étendent à perte de vue. Avec ses quelque 21 millions d’habitants, elle est la deuxième ville la plus peuplée de Chine, alors que Shanghai remporte la palme avec ses 27 millions d’habitants. Pékin figure parmi les 10 villes les plus populeuses de la planète. Bien qu’elle soit en pleine mutation architecturale avec un courant moderniste qui étend ses tentacules, on perçoit encore très bien l’architecture traditionnelle. À la tombée du jour, Pékin s’illumine. Le splendide et inhabituel spectacle qui défile sous nos yeux fait contraste avec l’austérité du jour. On peut mieux distinguer les lignes impériales des bâtiments et des palais illuminés. Les sites olympiques, bien entendu très modernes, coupent également le souffle le soir venu. Des lumières courent et dansent sur les tours olympiques métalliques. À lui seul, un regard sur le stade national vaut le déplacement. Le centre aquatique et l’anneau de glace saisissent aussi l’esprit.