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Comprendre le NIL, ce bouleversement dans le sport universitaire américain

Getty Images via AFP
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Philippe Asselin

2025-05-16T04:00:00Z
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SYRACUSE | C’est une véritable révolution qui s’opère dans le sport universitaire américain depuis que la NCAA a autorisé les contrats de type NIL.

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Un NIL – pour Name, Image and Likeness – permet à un étudiant-athlète de recevoir une compensation financière pour l’utilisation de son nom, de son image et de sa notoriété sur les réseaux sociaux.

C’est en 2021, à la suite d’une décision unanime de la Cour suprême, que l’organisation régissant le sport universitaire aux États-Unis a finalement permis aux athlètes d’être rémunérés, elle qui avait pendant des décennies prôné l’amateurisme tout en engrangeant d’importants profits.

«Pour les joueurs, on parle d’une réalité complètement différente. On en voit maintenant avec des montres à 100 000$ et au volant de voitures à 200 000$», souligne l’agent Nathaniel Thomas, qui représente notamment Antoine Deslauriers.

Les universités ont dû s’adapter en développant des stratégies pour attirer et retenir les meilleures recrues, en démontrant leur capacité à faciliter les opportunités NIL.

Les accords NIL impliquent généralement l’athlète, son représentant et l’entité qui fournit les fonds: une organisation tierce, souvent composée de riches donateurs universitaires, qui négocient les ententes afin d’éviter que les universités ne paient directement.

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«Chaque école a sa façon de faire. Si on prend le cas d’Antoine, nous avons l’option de négocier tous les six mois. Comme on est pas mal certains qu’il va jouer, on parle d’une augmentation d’au moins 50%», explique le président de l’agence Vantage Sports.

Comme chez les pros

Depuis l’émergence des NIL, il n’est plus rare de voir un athlète changer d’école pour gagner plus de l’argent.

Le quart-arrière Nico Iamaleava a récemment décidé de manquer un entraînement pour mettre de la pression sur l’Université du Tennessee. Il voulait renégocier son contrat NIL, estimé à environ 2 M$ par an, pour le porter à près de 4 M$. Quelques jours plus tard, il annonçait lui-même sur ses réseaux sociaux qu’il passait à l'UCLA.

«Cette affaire met en lumière la tension entre l’objectif initial du NIL et ce qu’il est devenu, soit un système de rémunération pour jouer, avec des négociations de compensation qui ressemblent de plus en plus au sport professionnel», a déclaré Darren Heitner, un avocat qui conseille des athlètes sur le NIL, lorsqu’il a été questionné sur le sujet par le réseau NBC.

Toutefois, les façons de faire pourraient changer très prochainement en raison d’une autre décision de la Cour suprême. Dès juillet, les universités auront le droit de partager jusqu’à 20,5 M$ de leurs revenus annuels avec leurs athlètes évoluant dans la division 1.

«Le football génère le plus de revenus. On s’attend à ce que les footballeurs obtiennent entre 85% et 90% de ce montant», affirme Nathaniel Thomas.

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Et les Canadiens?

Cette nouveauté aura assurément un impact sur le recrutement de joueurs canadiens, qui ont un statut différent en raison de leur visa d’étudiant international.

«Pour un Canadien, le NIL doit être passif. Il faut utiliser un langage juridique qui indique que le NIL n’est pas un contrat d’embauche», indique Nathaniel Thomas.

Les revenus passifs, comme des redevances ou du contenu sur les réseaux sociaux, ne nécessitant pas une participation active comme des promotions ou des apparitions publiques, qui elles pourraient être considérées comme un emploi.

Toutes les actions qu’un joueur canadien posera se doivent d’être faites au Canada. Par exemple, une chaîne de restauration rapide qui offrirait un NIL à un représentant de l’unifolié pour une publicité à la télévision n’aurait le droit que de la diffuser au Canada.

«Au final, le NIL est une bonne chose pour les athlètes, conclut le Québécois. Il doit toutefois y avoir un encadrement.»

L’encadrement peut venir d’un agent ou de l’université elle-même. Chez l’Orange de Syracuse, l’entraîneur-chef, Fran Brown, impose à ses joueurs de mettre 40% de leurs revenus en NIL de côté, en plus de rendre obligatoires les cours de gestion financière.

L’effet NIL: une menace pour le football universitaire québécois?

DIDIER DEBUSSCHERE/JOURNAL DE QUEBEC
DIDIER DEBUSSCHERE/JOURNAL DE QUEBEC

L’arrivée de la rémunération via les contrats de type NIL doit-elle inquiéter les universités québécoises et canadiennes?

La question se pose, considérant que certains footballeurs pourraient toucher un salaire plus élevé en évoluant pour un petit programme de la NCAA qu’en jouant dans la Ligue canadienne de football (LCF), par exemple.

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«Pour retenir les joueurs de talent, le Canada se doit éventuellement d’offrir des NIL», n’hésite pas à dire l’agent Nathaniel Thomas.

Interrogé à ce sujet, le directeur général du RSEQ, Stéphane Boudreau, ne semble pas s’en faire avec la chose.

«Il y aura toujours des athlètes [de chez nous] qui vont aller dans la NCAA. L’élite va probablement prendre ce chemin-là, mais l’offre québécoise et canadienne est adéquate. On le voit en football, qui va bien chez nous», affirme-t-il.

«Nous ne sommes pas dans le même marché. Le Québec, ce n’est pas les États-Unis. Ce sont deux mondes. Nous en avons un peu, des étudiants-athlètes qui font un peu d’influencing sur les réseaux sociaux. Ils n’ont pas un nombre d’abonnés comme aux États-Unis. Voilà la grande différence en matière de NIL.»

Selon les politiques de U SPORTS, une université canadienne ne peut offrir aucune forme d’aide financière à un étudiant-athlète qu’elle souhaite recruter.

«Ces restrictions concernent particulièrement l’aide pour les déplacements, l’hébergement, le logement, les repas, l’équipement, les vêtements ou les fournitures scolaires dépassant les dépenses normales de l’équipe», indique notamment l’organisation sur son site web.

Présentement, la seule aide financière accessible dans le RSEQ est sous forme de bourses d’études et aucune promesse écrite d’aide financière aux études ne peut être faite avant l’inscription officielle à l’université.

Les bourses peuvent couvrir les droits de scolarité, les frais afférents et parfois les livres ou les fournitures scolaires. C’est l’université elle-même qui décide qui reçoit une bourse et quel est le montant.

Une équipe de football universitaire au Québec a en moyenne le droit de remettre une quarantaine de bourses d’études à ses joueurs.

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