Comment les grands magasins ont-ils révolutionné le monde?
Julie Loiselle
À Paris, aux côtés de la tour Eiffel et du Louvre, trônent fièrement cinq géants: les Galeries Lafayette, le Printemps, le BHV, Le Bon Marché et la Samaritaine. Plus que de simples magasins, ces édifices sont de véritables monuments historiques. À travers un voyage captivant de plus de 170 ans, ce documentaire débordant d’archives visuelles révèle à quel point ces temples du commerce ont contribué à bâtir la modernité... à grands coups de vitrines féériques!
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C’est l’homme politique Georges-Eugène Haussmann qui est derrière la création des grands magasins: il veut faire de Paris un lieu d'avant-garde où les gens circulent aussi facilement que les marchandises. De 1853 à 1870, la capitale devient un vaste chantier à ciel ouvert. Malgré les critiques, de nouveaux axes routiers apparaissent, bordés d’immeubles plus spacieux et lumineux. Tout est en place pour l’arrivée des grands magasins, prêts à changer le visage de la ville... mais également la façon de consommer des Occidentaux.
Totalement révolutionnaires
Le documentaire montre en effet comment ces magasins ont littéralement inventé le commerce contemporain: prix fixes, crédit à la consommation, publicités séduisantes et soldes alléchants.
Avant eux, les petites boutiques de quartier étaient austères: les visiteurs ne pouvaient ni toucher à la marchandise ni flâner, et les prix variaient selon la tête du client. Les grands magasins, eux, misent sur l’expérience client. Et ils ont une cible claire: les femmes.
Les vitrines sont conçues pour les attirer, et à l’intérieur, on comble autant leurs besoins de ménagères que leurs désirs de coquetterie. Par ailleurs, ces palais de consommation ne sont pas réservés aux riches: les clientes modestes peuvent enfin approcher des produits de luxe et vivre, ne serait-ce qu’un instant, une parcelle de rêve.
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Des employeurs de choix
Autre segment intéressant du documentaire: les emplois créés par cette industrie nouvelle. De jeunes femmes, venues de partout en France, deviennent vendeuses dans ces bâtisses attrayantes. Elles accèdent ainsi à une forme d’indépendance financière, sans devoir s'éreinter en usine ou dans les champs. Souvent loin de leur famille, elles sont logées sous les combles des magasins, parfois mieux rémunérées que la moyenne. Les vendeuses ont le mandat d’être bien mises, mais sans voler la vedette: ce sont les clientes qui doivent se sentir reines au sein des établissements. Si leur métier est prisé, il vient avec des conditions de travail exigeantes, soit fréquemment 12 heures debout. On apprend que c’est en 1901 qu’une première loi entre en vigueur afin de leur permettre de se reposer. Progressivement, les dirigeants instaurent même des garderies sur place pour aider à la conciliation travail-famille des mères. Les employés étaient aussi encouragés à prendre part à des compétitions sportives. Il n’y a aucun doute: les grands magasins étaient en avance sur leur temps!
Une perte de popularité, mais pas la disparition
Très vite, le modèle des grands magasins est imité dans le monde entier. Il faut dire qu'il est très lucratif. Aux États-Unis, on voit même naître The Bon Marché, une copie presque identique de son homologue français. Mais à la fin des années 1920, la crise économique frappe. De nouvelles enseignes comme Monoprix, plus petites, plus fonctionnelles, annoncent un tournant dans les habitudes de consommation. Ce n’est toutefois pas le déclin des grands magasins. Encore aujourd’hui, leurs vitrines de Noël émerveillent toutes les générations et leur architecture somptueuse continue d’impressionner.
Ne manquez pas La folle histoire des grands magasins, les palais de la tentation?, un documentaire captivant présenté à Télé-Québec, qui dévoile les facettes méconnues de ces temples de la consommation, jadis moteurs d’innovation et de rêve.