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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

Clova a vu des soldats allemands défiler: le village de Haute-Mauricie résiste au temps et aux flammes

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Photo portrait de Mathieu-Robert Sauvé

Mathieu-Robert Sauvé

2023-06-10T23:00:00Z
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Né avec la colonisation du Nord, Clova a une histoire méconnue. Le médecin du village y a notamment évité l’évasion de prisonniers allemands en 1943. 

• À lire aussi: Des vestiges de la Guerre froide en pleine forêt

Une centaine de soldats allemands ainsi que des marins et officiers du Bismarck capturés en Angleterre et gardés prisonniers au nord du Québec descendent la grande rue de Clova sous le regard du médecin militaire Paul Rivard. 

Prisonniers allemands au camp de Sherbrooke, 23 novembre 1945. L’écriteau Ausgang nur in pow unifrom signifie « Permission de sortir, mais seulement avec l’uniforme de prisonnier de guerre ».
Prisonniers allemands au camp de Sherbrooke, 23 novembre 1945. L’écriteau Ausgang nur in pow unifrom signifie « Permission de sortir, mais seulement avec l’uniforme de prisonnier de guerre ». Photo fournie par Canada. Ministère de la défense nationale /Bibliothèque et Archives Canada

Quand il apprend que certains d’entre eux fomentent un plan pour s’évader, il transmet l’information à ses supérieurs. 

« Deux jours plus tard, une unité de camions traverse Clova, les prisonniers à son bord, vers d’autres camps. Quant aux instigateurs de cette fuite : destination inconnue pour interrogatoire ! » raconte Hervé Tremblay, de La Tuque, dans un document sur l’histoire de la Haute-Mauricie. 

Le Dr Rivard passera à l’histoire, quelques années plus tard, quand il fera l’objet d’un film de l’Office national du film intitulé Le médecin du Nord (1954) où on le voit se rendre en traîneau à chiens soigner une famille autochtone atteinte de tuberculose. 

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Le Dr Paul-Léon Rivard habitait Clova dans les années 1950. Dans Le Médecin du Nord, le cinéaste Jean Pallardy le suit dans sa pratique quotidienne, notamment auprès des Autochtones.
Le Dr Paul-Léon Rivard habitait Clova dans les années 1950. Dans Le Médecin du Nord, le cinéaste Jean Pallardy le suit dans sa pratique quotidienne, notamment auprès des Autochtones. Photo fournie par l'ONF

Laisser brûler l’histoire 

Clova, que le premier ministre François Legault a cru devoir « laisser brûler », est un « hameau forestier comptant une trentaine de familles », comme l’écrit la Commission de toponymie du Québec. Longtemps propriété de la Compagnie internationale de papier, il a été cédé à un groupe d’hommes d’affaires en 1978. Ils ont fondé par la suite des pourvoiries dans la région. 

Avant de devenir un village, Clova était le nom de l’ancienne gare construite au début du XXe siècle, puis du bureau de poste ouvert en 1925. Ce sont les Écossais de passage qui l’ont baptisé. Il existe deux villes en Écosse qui portent ce nom. La gare est aujourd’hui citée parmi les gares patrimoniales sur les sites historiques nationaux du Canada. 

Au plus fort de l’exploitation forestière, le village comptait 600 âmes. L’écrivain Yves Beauchemin y a passé une partie de son enfance. 

Vers 1930, la gare de Clova marquait une étape ferroviaire vers l’Abitibi. 

« La plupart des colons en route vers cette région sont passés par Clova » relate la Commission de toponymie. 

Gare patrimoniale 

« Le chemin de fer reliant La Tuque à Senneterre est jalonné de sites historiques précieux que nous avons voulu mettre en valeur », commente Benoit Laporte, qui a travaillé au service de communication de VIA Rail jusqu’en 2019.  

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La gare de Clova a été construite entre 1915 et 1920 par le National Transcontinental Railway. Elle est devenue une gare patrimoniale du Canada en 1995.
La gare de Clova a été construite entre 1915 et 1920 par le National Transcontinental Railway. Elle est devenue une gare patrimoniale du Canada en 1995. Photo Gérard Arbour, Les vieilles gares du Québec

M. Laporte a obtenu de la compagnie ferroviaire l’autorisation de changer l’horaire du train de nuit pour développer son potentiel récréotouristique. 

« Nous voulions en faire une destination de prestige avec fenêtres panoramiques, un peu comme on le voit dans les Rocheuses canadiennes. » 

Toujours en fonction, la liaison La Tuque-Senneterre a tenu ses promesses. Les voyageurs peuvent consulter un document relatant les points d’intérêt de cette région touchée aujourd’hui par les feux de forêt. 

La drogue du lac Stone 

Clova a fait les manchettes des médias nationaux le 10 septembre 1996, lorsque des narcotrafiquants ont largué de la drogue dans un lac de la région, le lac... Stone. 

Pas moins de 490 kilos de cocaïne ont été retrouvés par la police dans le lac situé à quelques kilomètres du village. Cinq personnes avaient été arrêtées à la suite de cette affaire dans un chalet des environs, au bord du réservoir Gouin. 

L’avion en provenance de Colombie avait été identifié par les services secrets américains, et c’est pour se débarrasser des preuves que le pilote a largué sa cargaison. 

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