Cette mairesse de banlieue n’a pas d’auto

Élizabeth Ménard
La mairesse de Chambly n’a ni voiture ni permis de conduire. C’est plutôt sur ses deux pieds, en autobus ou parfois en longboard qu’elle se déplace. Au pays de l’auto-solo, elle détonne.
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Rares sont les élus qui n’ont pas de voiture au Québec. «Ça se fait d’avoir deux jeunes enfants sans avoir de voiture, mais il faut avoir des options», déclarait récemment la mairesse de Montréal Valérie Plante. Celle-ci n’a pas eu d’auto jusqu’à son élection. Elle affirme avoir élevé ses deux enfants sans auto, entre autres grâce au fait qu’elle habitait un quartier central près de deux lignes de métro et à un abonnement au service d’autopartage Communauto.
En banlieue, la réalité est toute autre.
Mais Alexandra Labbé, mairesse de Chambly depuis 2019, n’a jamais eu d’auto.
«Les coûts, les entretiens, les changements de pneus: je l’ai toujours vu comme un fardeau. J’ai organisé ma vie en fonction du fait que je n’ai pas de voiture. Ce n’est pas un sacrifice», dit la femme de 41 ans qui n’a pas d’enfant.
Une auto pour les grands déplacements
Dans les rues de cette petite ville de la Rive-Sud, elle se déplace surtout à pied et en utilisant le service d’autobus gratuit de la municipalité. Jadis, on pouvait même la voir sur son longboard. «Mais ça fait longtemps que je n’en ai pas fait!» avoue cette native de Chambly qui partage une maison bigénérationnelle avec ses parents.
Son conjoint a une auto, hybride, précise-t-elle, que le couple utilise parfois pour sortir de la ville et l’épicerie.
«Je ne veux pas avoir l’air de la vertueuse qui fait tout mieux que les autres, confie-t-elle. On a quand même une auto pour la famille. Pour les grands déplacements, ça s’impose, parce qu’il n’y en a pas, du transport en commun, ou si peu. Mais peut-être que si on habitait à Montréal on n’en aurait même pas, d’auto.»
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Ses déplacements personnels et liés à ses fonctions se font majoritairement en transport en commun (REM, autobus, métro et taxi lorsqu’elle est à Montréal) ou en covoiturage avec des collègues lorsqu’elle doit aller plus loin.
Lors des événements réunissant ses homologues, elle est souvent la seule à s’être rendue en transport en commun, constate-t-elle.
Prêcher par l’exemple
Avec la crise climatique, il est évident, pour Mme Labbé, qu’il faut délaisser l’auto-solo et développer massivement le transport en commun.
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«C’est tellement une évidence que, sans le transport en commun, on ne peut plus avancer, que je suis toujours surprise qu’on ait encore à faire cette démonstration-là», dit-elle.
Mais il faut le faire dans le respect des citoyens qui ne sont pas tous prêts ou capables d’abandonner leur voiture, en prêchant par l’exemple et en développement des quartiers à échelle humaine, croit la mairesse.
«Je me questionne toujours à savoir: est-ce que je suis à contre-courant? Est-ce que ça va résonner à la bonne place avec le monde sur le terrain? Est-ce que c’est ça que les gens veulent? Parce que sinon, moi, l’année, prochaine, je ne suis plus là», confie-t-elle.
Mais pour le moment, aucun nuage noir à l’horizon, bien au contraire.
Élue en 2019 à la suite du départ dans la controverse de Denis Lavoie, Alexandra Labbé a été réélue en 2021 à 71% des voix, un résultat «presque soviétique» blague-t-elle.