Bûcheronnage sportif : un record du monde inusité pour une Québécoise
C'est avec une hache que Stéphanie Naud se démarque.
Mylène Richard
Elle manie la hache comme certains font de la magie avec un bâton de hockey ou une raquette de tennis. Stéphanie Naud est une redoutable bûcheronne, détentrice d’un record mondial.
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Comme chaque été depuis sept ans, Naud participe à une douzaine de compétitions professionnelles de lumberjack ou de « bûcheronnage sportif » en français. Son fait d’armes de l’année est survenu en août à Chilliwack, en Colombie-Britannique, lors des Championnats canadiens STIHL Timbersports quand elle a réussi le meilleur chrono féminin à la hache horizontale.
Les deux pieds solidement plantés sur un billot, en parfait équilibre et en contrôle, Naud a multiplié les coups entre ses jambes à un rythme déchaîné pour fendre le bois en 28,62 secondes.
« C’était une surprise, parce que je ne connaissais pas l’ancien record du monde. J’allais là pour gagner la discipline, mais je ne pensais pas au record », indique-t-elle au Journal tout en conduisant vers le Nouveau-Brunswick pour un événement.
« Ce n’était pas une coupe exceptionnelle quand je pense à ce que je suis capable de faire. Mais un record du monde STIHL, c’est un petit bonus ! »
Pas une première
La Québécoise de 28 ans avait aussi établi l’an dernier une nouvelle marque lors de mondiaux indépendants au Wisconsin avec un temps de 24,25 secondes à la hache horizontale, en plus de terminer à égalité au classement général.
À l’image de la boxe, il y a plusieurs organisations qui présentent des événements de bûcheronnage, dont les façons de chronométrer peuvent différer. Ceux de la série STIHL sont les plus renommés mondialement. D’ailleurs, Naud a été sacrée championne à Chilliwack au cumulatif des quatre épreuves féminines (voir le tableau ci-dessous), ce qui lui a assuré une place aux Championnats du monde qui devraient avoir lieu en Europe au printemps.
Aux Nationaux, elle n’était pas la seule Québécoise. Andréanne La Salle, une ancienne athlète que Naud a dirigée et qui est maintenant entraîneuse à l’Université McGill, a fini quatrième sur un total de huit participantes.

De longues distances
Au Québec, la discipline n’est pas très populaire malgré un historique d’activités forestières. Elle attire les regards ailleurs au Canada ainsi qu’aux États-Unis. Naud parcourt donc des milliers de kilomètres durant l’été, accompagnée de son entraîneur Jean-Pierre Mercier, « le meilleur affileur de scie au monde », lance-t-elle.
« On voyage en moyenne huit heures pour aller à une compétition, calcule la résidente de Brigham, en Estrie. Au Wisconsin, c’était 20 heures de route. On le fait en auto, à cause de nos nombreux équipements [haches, scies, pièces de protection, etc.]. À Chilliwack, on y est allés en avion [45 heures en auto], mais j’ai apporté seulement une scie et trois haches, le strict minimum. »
Et malgré ce qu’on pourrait penser, il n’est pas difficile de traverser la frontière canado-américaine avec des outils aussi tranchants.
« Les douaniers sont parfois surpris d’apprendre que je participe à des compétitions de lumberjack. Ils trouvent ça cool et me posent des questions sur les épreuves. Parfois, ils veulent voir nos équipements, mais c’est par simple curiosité », soutient Naud.

Battre des hommes
Cette dernière ne participe pas souvent à des épreuves mixtes, mais elle peut tenir son bout face à des hommes.
« Je ne peux pas battre des gars de haut niveau, car je ne peux pas rivaliser avec leur force physique, mais je peux faire mieux que des débutants ou ceux avec seulement quelques années d’expérience. »
Lors du Festival du bûcheux de Saint-Pamphile, en Chaudière-Appalaches, la femme de presque 6 pi et 1 po a réussi le troisième meilleur chrono, hommes et femmes confondus.
« Tout le monde a scié dans le même bois en plus ! » précise-t-elle avec fierté.
« Souvent, les gars tiennent ça mort, ils n’en parlent pas trop. Je pense que c’est dur sur l’orgueil », prétend Naud.
Les quatre disciplines féminines de bûcheronnage sportif
■ La coupe à la hache horizontale
■ La coupe à la hache verticale
■ La coupe à la scie godendard
■ La coupe à la scie à chaîne
Les hommes participent aussi à la coupe à la hache sur tremplin ainsi qu’à la coupe à la scie à chaîne classe ouverte.
« Je suis bien contente de ne pas faire la scie à la chaîne modifiée [classe ouverte], parce que ces scies valent entre 10 000 $ et 15 000 $, en plus de peser environ 50-60 lb», indique Stéphanie Naud.