La ministre des Transports Geneviève Guilbault ne porte pas toujours sa ceinture de sécurité en voiture
Des photos de la ministre sur les réseaux sociaux démontrent qu’elle ne donne pas toujours l’exemple en matière de sécurité routière

Annabelle Blais
La ministre des Transports Geneviève Guilbault, qui encore la semaine dernière incitait les Québécois à être plus responsables sur les routes, ne prêche pas par l’exemple. Plusieurs photos publiées sur ses réseaux sociaux démontrent qu’à maintes occasions, elle ne porte pas sa ceinture de sécurité en voiture.
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Cinq photos où on la voit sans ceinture ont été publiées au cours des trois dernières années alors qu’elle était ministre de la Sécurité publique, et plus récemment, des Transports.
À une occasion, elle est au volant, et quatre autres fois, elle est passagère. Dans tous ces cas, le Code de la sécurité routière, dont la ministre est responsable, rend obligatoire le port de la ceinture (voir encadré).
«On s’attend toujours à ce que nos élus prêchent par l’exemplarité, qu’ils soient à leur affaire et montrent l’exemple, qu’ils soient des modèles», souligne Mireille Lalancette professeure en communication politique à l’Université du Québec à Trois-Rivières.
L’experte fait remarquer qu’il ne s’agit pas ici simplement de montrer le bon exemple.
«Ne pas mettre une tuque en hiver, c’est un choix personnel. Alors que porter une ceinture en voiture, c’est obligatoire [...], c’est non négociable», dit-elle.

Contactée par Le Journal, la ministre Guilbault a aussitôt présenté ses excuses.
«Mme Guilbault est désolée et tient à rappeler l’importance de porter sa ceinture de sécurité lors de tout déplacement», a déclaré son attachée Léonie Bernard-Abel.
Mme Lalancette nuance la portée des quelques photos de la ministre sur l’ensemble de ses très nombreuses publications. «Elle est très active sur les réseaux sociaux [...] donc ce sont des images parmi d’autres, c’est dilué.»
- Écoutez la chronique Crime et Société avec Félix Séguin, journaliste au Bureau d’enquête de Québecor via QUB radio :
Contexte particulier
Ces infractions apparentes au Code de la sécurité routière surviennent dans un contexte où de plus en plus de personnes meurent sur les routes et qu’une plus grande proportion d’entre eux, soit environ le tiers, ne portent pas la ceinture de sécurité.
En effet, depuis la pandémie, les bilans routiers ne cessent de s’aggraver. L’année 2022 marque même le pire bilan de la décennie avec 392 décès.
La ministre a d’ailleurs présenté, la semaine dernière, son plan d’action en sécurité routière afin de rendre nos routes plus sécuritaires.

Un projet de loi est également prévu à l’automne de même qu’une campagne de sensibilisation sur la sécurité routière.
Les personnes âgées de 25 à 54 ans sont plus nombreuses à ne pas porter la ceinture (36%) selon les données de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ). Mme Guilbault se trouve d’ailleurs dans ce groupe d’âge.
En 2021, à la suite du décès d’une jeune passagère qui ne portait pas la ceinture, le coroner Alain Manseau avait recommandé à la SAAQ de « poursuivre et d’intensifier ses efforts à l’aide d’activités de sensibilisation afin d’inciter tous les occupants d’un véhicule automobile à porter la ceinture. »
Or, le nouveau plan d’action de la ministre ne comporte pas d’objectif en matière de port de ceinture et la dernière campagne de la SAAQ sur ce thème remonte à 2019.
«Le port de la ceinture est toutefois traité dans nos actions de prévention terrain réalisées par l’équipe des conseillers en relation avec le milieu lors de conférences auprès des jeunes, des ainés et des nouveaux arrivants», précise la SAAQ. En 2018, l’amende pour ne pas avoir porté la ceinture a aussi été augmentée.
Elle ajoute que le port de la ceinture «réduit de moitié les risques d’être tué ou blessé gravement dans un accident».
-Avec la collaboration de Philippe Langlois et Jean-Louis Fortin

Des chiffres préoccupants
En moyenne (de 2018 à 2022), ce sont 28% des personnes décédées, qu’ils soient conducteurs ou passagers, qui ne portaient pas leur ceinture.
2022: 31,3%
2021: 28,3%
2020: 33,1%
2019: 21,3%
2018: 26,6%
Cela représente environ chaque année:
• 50 décès
• 125 blessés graves
Le nombre d’infractions liées au non-port de la ceinture de sécurité a été en moyenne de 25 444 chaque année, de 2016 à 2020.
Source SAAQ
Obligatoire pour tous
«Le Code de la sécurité routière est clair: il est obligatoire de porter correctement sa ceinture de sécurité, sous peine de recevoir une amende et de voir inscrire 3 points d'inaptitude à son dossier de conduite», peut-on lire sur le site de la SAAQ.
Tant les conducteurs que les passagers doivent obligatoirement boucler leur ceinture, qu’ils soient à l’avant ou à l’arrière du véhicule, même dans un taxi.
Sanctions pour ceux qui ne s’attachent pas
- Amende de 200$ à 300$
- 3 points d’inaptitude
Source SAAQ
Elle a dit
«Je sens qu'aujourd'hui, on est dans un moment crucial où toute la société souhaite embarquer dans cet élan [...] Chaque personne détentrice d'un permis, piéton ou vélo ou autre, doit prendre conscience de sa propre responsabilité. » – Geneviève Guilbault, ministre des Transports, le 22 août dernier lors de la présentation de son plan d’action en sécurité routière.

D’autres ministres des Transports pris en flagrant délit
• En septembre 2001, la voiture du ministre péquiste Guy Chevrette avait été suivie par des journalistes du Journal de Montréal qui avaient constaté plusieurs excès de vitesse. La voiture du ministre avait roulé jusqu’à 132 km/h ou encore 120 km/h dans une zone de 70 km/h. Dans les mois précédents, M. Chevrette dénonçait les conducteurs qui voyaient les limites de vitesse comme une suggestion plutôt qu’une obligation à respecter.
• En novembre 2007, la limousine de la ministre libérale Julie Boulet avait été suivie par nos journalistes après une conférence de presse. Ces derniers avaient été témoins de nombreuses infractions au Code, dont des excès de vitesse jusqu’à 130 km/h ainsi qu’un dépassement illégal. La ministre s’était retrouvée dans l’embarras puisqu’elle venait, quelques jours plus tôt, de déposer un projet de loi afin de serrer la vis contre les excès de vitesse, notamment. Elle s’était défendue en affirmant qu’elle dormait lors de ce trajet et ne s’était pas rendu compte du comportement de son chauffeur. Ce dernier avait été affecté à d’autres tâches après la publication de notre article.
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