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L'article provient de Le Journal de Montréal

70 ans d’histoire, quatre familles, trois continents: un premier roman ambitieux pour Agnès Gruda

Photo fournie par les Éditions Boréal
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Josée Boileau

2025-04-13T13:00:00Z
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Agnès Gruda a placé la barre haut pour son premier roman: raconter l’histoire de quatre familles, étalée sur sept décennies et trois continents. Quel beau récit!

Il y a un peu de son autrice dans Ça finit quand, toujours? Agnès Gruda est d’origine polonaise, arrivée au Québec à l’âge de 12 ans. De même, son roman commence à Varsovie et ses protagonistes finiront par s’exiler, notamment au Québec.

La journaliste qu’a été Agnès Gruda pendant quelque quarante ans imprègne aussi sa manière de mettre en scène ses personnages. Son récit avance au gré des grands moments qui ont marqué le monde depuis les années 1950, ce qui le rend passionnant.

L’assise de tout cela, c’est la rencontre entre deux jeunes femmes sur le point d’accoucher dans une maternité de Varsovie. Nina et Pola se lient ainsi d’amitié. Puis leurs familles s’agrandissent, d’autres amis vont s’y joindre; leurs enfants, devenus grands, auront à leur tour conjoints et rejetons.

Au final, cinq générations se côtoient dans ce livre sensible et touffu, ce qui est tout un défi à relever pour une autrice qui jusqu’ici avait signé deux recueils de nouvelles. Mais on ne perd jamais le fil et la cohérence est au rendez-vous.

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La première partie se déroule en Pologne. La vie n’est pas facile sous le régime communiste, mais à la mort de Staline, l’espoir d’un assouplissement est grand. Nina, Pola et leur bande y croient.

Hélas, non seulement l’étau reste en place, mais les Juifs sont de plus en plus stigmatisés, même s’ils sont non-pratiquants comme c’est le cas des protagonistes. Gruda décrit avec précision cette période méconnue qui va pousser des Polonais à fuir leur pays.

C’est ainsi que la famille Gutkowksi, celle de Nina, se rendra à Trois-Rivières; les Rotfeld s’établiront aux États-Unis; alors que les Ulman, qui comprend Pola, trouveront refuge en Israël. Sabina, elle, restera à Varsovie avec sa fille.

Échanges de lettres

Des échanges de lettres, qui vont de l’automne 1968 au printemps 1970, montrent toutefois les doutes et les errances qui précèdent ces destinations finales. Soucieux de rester en contact, jeunes et vieux s’écrivent pour se donner des nouvelles. Sous le titre «Là où nous sommes allés», c’est la deuxième partie du roman.

C’est aussi là la meilleure démonstration du talent d’écrivaine de Gruda. Les lettres ont différents signataires, pourtant elle arrive à donner à chacun un style d’écriture, des préoccupations particulières, des espoirs personnels. Toutes ces vies sont en suspens.

Et puis, chacun se pose. Il s’agit maintenant de s’intégrer dans un quotidien bien différent de celui de la Pologne tout en suivant les soubresauts de sa société d’accueil: guerre de Kippour en Israël, référendum au Québec, crise économique aux États-Unis...

Chaque lecteur trouvera à qui s’attacher parmi la vingtaine de personnages présentés. De même, une foule de souvenirs de l’actualité sont ravivés, mais à une prenante hauteur humaine. Alors quand ça finit, on a une seule pensée: quoi, déjà?

Ça finit quand, toujours?
Agnès Gruda
Boréal
480 pages
2025

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