3e lien: 10 minutes d’écart pour rayer un projet de 10 G$
Les temps de parcours, qui motivent l’abandon du troisième lien routier, n’ont pas tellement diminué


Marc-André Gagnon
L’amélioration des temps de parcours entre le centre-ville de Lévis et celui de Québec serait donc « l’élément essentiel » qui a poussé François Legault à abandonner sa promesse d’un troisième lien routier. Dans les faits, on parle d’entre 4 et 11 minutes, selon les études du gouvernement.
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« Je vous l’ai dit depuis le début. L’élément essentiel, c’est le temps de parcours. Ce qu’on se rend compte, c’est que le temps de parcours en auto a beaucoup diminué », a répété le premier ministre, en répondant aux journalistes, jeudi.
Si l’on se réfère aux 6000 nouvelles pages de documents rendues publiques lorsque Geneviève Guilbault a confirmé que le troisième lien serait dédié exclusivement au transport collectif, on constate qu’avant la pandémie, il fallait passer une dizaine de minutes de plus dans sa voiture pour se déplacer d’un centre-ville à l’autre, en traversant le fleuve par les deux ponts actuels.
Du Centre des congrès de Lévis au Centre des congrès de Québec, le temps de déplacement à l’heure de pointe du matin, qui était de 39 minutes, en 2019, est passé à 30 minutes, en 2022, une différence de 9 minutes.
Pendant la période de pointe de l’après-midi, il fallait compter 28 minutes pour parcourir les mêmes 26 kilomètres, alors qu’on parle maintenant de 24 minutes, une amélioration de... 4 minutes.
Si on prend l’ensemble des parcours analysés à la demande du gouvernement Legault pour mesurer l’effet du télétravail sur les habitudes de déplacement, on constate que le gain moyen est de 9,4 minutes le matin et de 6,5 minutes l’après-midi, aux heures de pointe.
Quant au temps de parcours en transport collectif, qui « est trop élevé » pour François Legault – ce qui justifie un troisième lien sans voitures –, on note aussi « une amélioration [...] pouvant atteindre 10 minutes » depuis 2019.
« À l’impossible, nul n’est tenu »
Et « si les chiffres d’aujourd’hui étaient ceux d’avant la pandémie, le faites-vous, le troisième lien », a demandé Marc Tanguay à François Legault, lors de l’étude des crédits budgétaires, mercredi.
« Oui », a répondu le chef caquiste, deux fois plutôt qu’une, au chef libéral par intérim.
« Est-ce qu’il y a 6 ans je pouvais savoir qu’il y aurait une pandémie ? a alors observé M. Legault. Est-ce que je pouvais prévoir que les chiffres de temps de parcours moyens pour l’année 2022 seraient beaucoup plus bas que ceux de 2019 ? Je ne pouvais pas prévoir ça. Donc à l’impossible, nul n’est tenu. »
Les coûts ont dû peser lourd
Évidemment, parmi les facteurs qui l’ont amené ultimement à prendre la décision difficile d’abandonner la portion autoroutière du projet de tunnel Québec-Lévis, « il n’y a pas juste la pandémie », a reconnu le premier ministre. Les coûts ont aussi pesé dans la balance. Lors du dévoilement du troisième lien en formule « bitube », en avril 2022, les coûts de réalisation du projet étaient estimés à 6,5 milliards $.
Même si une estimation sommaire des coûts de réalisation d’un tunnel dédié à des autobus électriques ou à un tramway est précisée dans l’étude d’avant-projet dont dispose le gouvernement, François Legault refuse d’en dévoiler l’ampleur, du moins jusqu’à ce que le mode de transport collectif soit déterminé.
Depuis 2018, des contrats totalisant 58,76 millions $ ont été octroyés pour différentes études, dont celles d’opportunité, d’avant-projet, d’impact sur l’environnement, en plus de travaux d’arpentage et de sondages géotechniques.
Sur cette somme, 28,78 millions $ ont été dépensés par le bureau de projet du troisième lien, essentiellement en « rémunération et honoraires professionnels », a rapporté François Legault, mercredi.
« Ce sont des investissements qui vont être très utiles pour le projet qu’on regarde, de tunnel en transport en commun Québec-Lévis », a fait valoir le premier ministre.

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