1 lac sur 10 au Québec a des problèmes; consultez notre carte interactive
Un nombre record de lacs est toutefois suivi dans la province
Philippe Langlois et Annabelle Blais
Vingt-trois nouveaux lacs québécois ont rejoint un groupe d'environ 200 plans d'eau dans la province qui sont dans un état préoccupant.
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Ces 23 lacs ont été identifiés en 2022 dans le cadre des activités du Réseau de surveillance volontaire des lacs (RSVL) du ministère de l’Environnement. On compte notamment le lac Jean-Venne, dans la municipalité de La Pêche, en Outaouais, ou le lac à Lunette, à Chertsey, qui sont à un stade intermédiaire d'eutrophisation.
En tout, 844 lacs sont maintenant membres actifs de ce réseau. Il s'agit d'un nombre record depuis sa création en 2002. L'objectif du Forum d’action sur l’eau, créé par le gouvernement en 2020, était toutefois d'en surveiller 900, d'ici 2023.
Vous pouvez consulter leur état sur notre carte interactive.
Sur les 765 lacs pour lesquels nous avons des données récentes :
- 10 sont considérés comme hypereutrophes, soit le pire stade, et 19 sont eutrophes (l’avant-dernier stade).
- En tout 204 sont dans un état préoccupant.
«L'état général des lacs [...] du réseau n'est pas alarmant», juge toutefois Manon Ouellet, coordonnatrice de l’équipe du suivi et de l’évaluation de l’état des lacs au ministère de l’Environnement.
Mais comme nous le documentons depuis cinq ans, les défis sont énormes: cyanobactéries (algues bleu-vert), plantes exotiques envahissantes, comme le myriophylle à épis, ou encore eutrophisation accélérée due aux activités humaines (agriculture, changements climatiques, déforestation, fosses septiques, engrais à pelouse).

10%
Dans l’ensemble du Québec, environ 10% des lacs habités ont des problèmes, selon Richard Carignan, professeur honoraire à l’Université de Montréal, qui a grandement étudié l’eutrophisation accélérée des lacs. Parmi ces problèmes, il ya l'eutrophisation (vieillissement accéléré), les cyanobactéries ou encore une zone littorale étouffée par la végétation aquatique.

Un premier lac eutrophe dans les Laurentides
À première vue, il n'y aurait pas de lac eutrophe dans les Laurentides. Or, le Conseil régional de l'environnement (CRE) des Laurentides en mentionne un: le lac Maskinongé.
Selon les données de la Ville de Mont-Tremblant, ce lac est bien eutrophe (vieillissement accéléré). On y trouve du périphyton, soit des algues et des bactéries dans le littoral. On note aussi la présence du myriophylle à épis, notamment.
«Si vous allez au bord de ce lac, imaginez un potage de brocoli», illustre Anne Léger, directrice générale du Conseil régional de l'environnement (CRE) des Laurentides, qui organisait d’ailleurs le Forum national sur les lacs en juin dernier.
Selon le RSVL, il est classé comme étant méso-eutrophe, un stade intermédiaire avancé d'eutrophisation. Mais les analyses du RSVL ne sont pas aussi complètes que celles réalisées pour la Ville de Mont-Tremblant.
Ce serait toutefois le seul lac eutrophe dans cette région où les associations de lacs sont nombreuses. D'ailleurs 35% des lacs inscrits sur le RSVL sont situés dans les Laurentides.
«On peut penser qu'il y a beaucoup moins de lacs eutrophes ici que dans les régions où il y a beaucoup d'agriculture», souligne Mme Léger.

Les défis pour les lacs de cette région, ce sont surtout les pressions reliées au développement touristique et domiciliaire.
«Avec le télétravail, les gens veulent se rapprocher des milieux naturels. Ça fait une pression de développement qui est très importante et les gens sont très inquiets», explique Mme Léger. Les municipalités ne sont pas nécessairement outillées pour faire face aux promoteurs.
Des Lacs témoins
Un nouveau projet vise à améliorer nos connaissances de l’état des lacs. Un réseau de lacs témoins élaboré depuis cinq ans en est à sa première année officielle, souligne Manon Ouellet du ministère de l’Environnement.
«On a choisi avec énormément de minutie 15 lacs qui sont représentatifs des lacs du RSVL et des régions naturelles», explique-t-elle. Les suivis sur ces lacs sont annuels et beaucoup plus exhaustifs que ceux sur le réseau de base. Par exemple, leur température est mesurée en continu pour documenter notamment les changements climatiques.