«Xavier Dolan, à l’impossible je suis tenu»: Ses proches racontent l'homme derrière le génie
Un documentaire poignant sur le réalisateur.
Steve Martin
À travers des entretiens et des extraits de films, le cinéaste québécois que plusieurs ont qualifié de jeune prodige à ses débuts dévoile les multiples facettes de sa personnalité, dont sa créativité, son exigence artistique et sa quête constante de perfection.
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Le documentaire de Benoît Puichaud retrace les jalons de la carrière de Xavier Dolan, depuis ses premiers pas en tant qu’enfant acteur jusqu’à son ascension fulgurante comme réalisateur d'œuvres marquantes, telles que J’ai tué ma mère, Les amours imaginaires et Mommy. Chacune de ses créations témoigne d’une sensibilité particulière et d’une capacité à capturer des émotions brutes. Ses films mettent également en lumière les thèmes chers à Dolan, soit les relations familiales complexes, l’identité sexuelle et les conflits émotionnels.
Ces thèmes fétiches, qui vont le suivre à chaque ajout à sa filmographie, sont déjà mis de l'avant lorsque, à 17 ans, il se lance dans la réalisation de J’ai tué ma mère. Ce qui a débuté comme un projet modeste est vite devenu un succès international, salué pour la force avec laquelle le cinéaste dépeint les émotions aussi intenses que conflictuelles qui séparent et unissent une mère et son fils. Le documentaire revient sur ce moment-clé, expliquant comment Dolan a capturé l’attention du monde avec un budget limité.
Un artiste entier
Au cours des années suivantes, le réalisateur autodidacte qui polarise les opinions poursuit son chemin en abordant les mêmes sujets. Il crée ainsi une galerie de personnages chargés d’une énergie singulière, qui évoquent la personnalité de leur créateur et touchent des publics variés. Ouvertement gai, le réalisateur développe notamment des personnages et des histoires qui reflètent les diverses facettes de la communauté LGBTQ+. Laurence Anyways, par exemple, explore les défis d’une relation impliquant une personne transgenre, un sujet rarement traité avec autant de profondeur au cinéma.
Au-delà de son œuvre, le documentaire révèle un Xavier vulnérable, parfois épuisé par la pression du succès et de son propre perfectionnisme. D'ailleurs, le titre du documentaire, une citation de Jean Cocteau qu’il s’est fait tatouer sur l’épaule gauche, reflète cette tension entre son ambition sans limites et les défis personnels qu’il doit affronter. «Dolan n’est pas qu’un réalisateur, c’est un écorché vif qui grave sa vie sur pellicule, sans jamais rien déléguer, dira-t-on de celui qui laisse peu de place aux initiatives improvisées. Un control freak qui supervise tout: scénario, costumes, montage, et même les bandes-annonces et les sous-titres. Il fait tout lui-même. Alors il agace. Un peu. Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, il se livre comme ça, entier.»
Derrière l'image
Le documentaire nous amène également à la rencontre de nombreuses personnalités qui ont eu l'occasion de travailler avec le réalisateur et qui en dessinent le portrait. Parmi celles-ci, on retrouve les comédiens Monia Chokri, Anne Dorval, Vincent Cassel, Niels Schneider, Melvil Poupaud, Nathalie Baye ainsi que les réalisateurs Jane Campion et Gus Van Sant. Les témoignages d’amis proches permettent également de mieux comprendre ce qui motive cet artiste intransigeant et intrigant.
L’un des points saillants du film est son analyse de l’esthétique et des choix narratifs de Dolan. Ses films, empreints d’une intensité visuelle et sonore, sont décrits comme des explorations des émotions humaines dans leur état le plus brut. Le documentaire dévoile aussi les coulisses de ses réalisations, mettant en évidence les exigences artistiques de Dolan, qui perçoit chaque détail, du cadrage à la musique, comme essentiel pour transmettre l’émotion. Des séquences sur la production de Mommy, par exemple, illustrent comment son utilisation du format d'image carré symbolise l’étouffement émotionnel des personnages — une décision audacieuse qui enrichit la narration et prouve que le réalisateur sait faire preuve d'innovation. Le film vaudra d’ailleurs à Dolan de multiples récompenses, dont le prestigieux Prix du jury au Festival de Cannes. À peine sa carrière entamée, Xavier Dolan atteint ainsi un niveau de reconnaissance que peu de cinéastes de son âge ont connu. Derrière ce succès se cache toutefois une réalité plus complexe, celle d’un artiste souvent vulnérable, en proie à des doutes et à la pression de la célébrité...