Vous êtes peut-être un proche aidant sans le savoir: voici pourquoi

Jessica Potsou
Que ce soit pour une personne âgée, un enfant malade ou un ami lourdement blessé lors d’un accident, plus d’un cinquième des Québécois porterait le chapeau de proche aidant au quotidien en endossant le poids que le rôle implique, et parfois, sans même le savoir.
«La proche aidance n’a pas juste un visage [...] Le proche aidant peut être n’importe qui et le proche aidé peut être n’importe qui, [car] tout le monde est susceptible de [le] devenir», a expliqué la professeure Sophie Éthier, chercheure à l’École de travail social et de criminologie de l’Université Laval, en entrevue avec l’Agence QMI.
Dans le cadre de la semaine de la proche aidance, elle a rappelé que personne n’est à l’abri de maladie ou d’un accident et que plus d’un Québécois sur cinq (21,1%) serait en réalité un proche aidant, selon des données compilées en 2022 par l’Institut de la statistique du Québec.
Pour le gouvernement provincial, est considérée comme proche aidant «toute personne qui apporte un soutien à un ou à plusieurs membres de son entourage qui présentent une incapacité temporaire ou permanente de nature physique, psychologique, psychosociale ou autre».
Aucun profil n’est identique lorsqu’il est question de proche aidance. De l’adolescent qui s’occupe de son parent toxicomane, à la personne qui s’occupe de son conjoint atteint d’un cancer, les exemples sont multiples, a illustré Mme Éthier, également présidente du Conseil d’administration du Carrefour des proches aidants de Québec.
Aider au point de s’oublier
Même si quelqu’un peut avoir plusieurs aidants naturels, c’est souvent une seule personne – qualifiée de proche aidant principal – qui se retrouve avec la majorité des tâches.
«Il y a une plus grande partie de la charge qui va revenir à cette personne. Il y a des proches aidants qu’on appelle secondaires qui vont aussi graviter autour, dont le soutien est plus ponctuel», a souligné Guillaume Joseph, directeur général de L’Appui, un organisme venant en aide aux proches aidants.
Ce dernier a précisé que plus de 300 000 aidants naturels passeraient plus de 20 heures par semaine à soutenir un proche.
Lorsqu’on consacre autant de temps à prendre soin d’une personne, on peut commencer à s’oublier, selon M. Joseph, ajoutant que c’est à ce moment que la surcharge, l’épuisement et la maladie embarquent.
«C’est documenté depuis longtemps qu’il y a des conséquences sur la santé physique des proches aidants qui ont un taux de mortalité plus élevé que les personnes du même âge qui n’ont pas [ces] responsabilités», a soutenu Sophie Éthier
Il s’agit également d’une réalité aussi observée à l’hôpital.
«Souvent, quand [l’aidé] arrive à l’hôpital, c’est parce que le proche aidant est vraiment, vraiment en épuisement. [...] La personne est dépassée par les événements, même si on essaie d’arrimer le soutien à domicile du CLSC», a expliqué Marianne Desrochers, intervenante sociale à l’unité d’oncologie à l’Hôpital Pierre-Le Gardeur.
Plusieurs se retrouvent dans une situation financière précaire étant souvent contraints de réduire leur nombre d’heures de travail ou de quitter leur emploi pour prendre soin de leur proche, même s’ils disposent de congés supplémentaires accordés par la loi, selon Mme Éthier et M. Joseph.
Que ce soit pour administrer des médicaments, prodiguer des soins ou amener l’aidé à ses rendez-vous, le proche aidant doit souvent s’absenter du bureau. Certains employeurs sont compréhensifs face à cette situation et permettent aux travailleurs de reprendre les heures de travail manquées ou de faire du télétravail. Il reste toutefois bien du chemin pour faciliter la conciliation proche aidance et travail, estime la professeure.
Il existe toutefois des programmes de crédit d’impôt et d’assurance-emploi afin d’aider financièrement ces personnes.
Être aidé à son tour
D’autres outils permettent de venir en aide autrement aux proches aidants. «Il y a des associations pour à peu près toutes les maladies. La première chose à faire est de contacter ces associations-là [qui] aident aussi les familles et les proches aidants», a précisé Mme Éthier.
De nombreux professionnels de la santé recommandent d’aller chercher de l’aide auprès d’organisme comme L’Appui pour les orienter vers les ressources adéquates, que ce soit pour du répit, des services administratifs ou même juridique. Une ligne téléphonique d’écoute, Info-aidant, existe aussi.
Afin d’avoir plus d’aide les proches aidants peuvent contacter la ligne Info-aidant en composant le 1(855)852-7784 ou se référer au site de l’Appui.