Voici l’offre finale que le Front commun ne pourra refuser
Je propose une hausse salariale de 19,2% sur 5 ans

Michel Girard
Permettez-moi de jouer au «médiateur salarial» dans la guerre ouverte que le Front commun, la FAE et la FIQ mènent contre le gouvernement de François Legault et sa ministre responsable des négociations, Sonia LeBel, présidente du Conseil du trésor.
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Voici donc ma proposition d’offre «finale» qui, en toute logique, devrait sceller le volet salarial du renouvellement des conventions collectives des 600 000 employés de l’État.
Roulement de tambour: je propose une hausse salariale de 19,2% sur 5 ans.
Cela m’apparaît être un très bon compromis entre les demandes des syndicats et les offres du gouvernement caquiste. Je vous rappelle que les syndicats des employés de la fonction publique et parapublique réclament une hausse salariale de 21% sur trois ans. Et le gouvernement Legault, lui, offre 16,7% sur cinq ans.
Je crois sincèrement qu’à 19,2% d’augmentation sur cinq ans, les deux parties sortiraient de l’impasse la tête haute. Et surtout, le gouvernement et les syndicats donneraient l’impression d’avoir conclu une entente salariale financièrement et socialement raisonnable aux yeux de l’ensemble des contribuables québécois.
D’où provient cette suggestion d’augmentation de «19,2%» sur cinq ans? Elle correspond à la croissance du PIB nominal que l’on retrouve dans les récentes perspectives économiques rapportées dans la Mise à jour économique et budgétaire du ministre des Finances, Eric Girard. Le PIB nominal représente la valeur en prix courants des biens et services que nous produisons, sans correction en fonction de l’inflation.
Quand les salaires suivent la croissance du PIB nominal, cela laisse présager que l’enrichissement des salariés se produit au rythme de la croissance économique.
Avec une telle augmentation de 19,2%, l’offre globale aux employés de l’État représenterait une colossale somme d’environ 10,35 milliards de dollars, soit 1,35 milliard de dollars de plus que la présente offre gouvernementale déposée cette semaine par la ministre Sonia LeBel.
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LA FANFARONNADE DES CHEFS SYNDICAUX
J’ai été estomaqué de voir la réaction des chefs syndicaux face à la dernière offre salariale aux 600 000 employés de l’État.
À peine était-elle déposée que le Front commun et les autres syndicats l’ont rejetée du revers de la main.
Et gonflés à bloc grâce à l’appui de la population, ils ont poussé la fanfaronnade jusqu’à maintenir le déclenchement de la grève, malgré l’ouverture du gouvernement et la bonification de ses offres.
Que les chefs syndicaux jugent insuffisante la hausse globale de 16,7% sur cinq ans passe encore.
Mais de là à dire que «[c]e serait un drame si on acceptait cette offre», comme l’a déclaré Magali Picard, la cheffe de la FTQ, ou de là à dire que «[ç]a frôle même l’insulte», comme l’a mentionné la présidente de la FIQ, Julie Bouchard, je me garderais une petite gêne.
On parle ici d’une offre d’augmentation salariale de 9 milliards de dollars. Par tête de syndiqué, l’offre gouvernementale équivaut à un montant additionnel de 15 000$.
Il n’y a quand même pas ici matière à déverser son fiel contre une telle somme de 9 milliards de dollars qui sera forcément épongée par l’ensemble des contribuables. Un peu d’empathie S.V.P. envers les millions de contribuables moins bien traités que les employés de l’État.
D’autant plus que la grande majorité des employés de l’État peuvent compter sur la sécurité d’emploi à vie et d’alléchants avantages sociaux (régimes de retraite, congés, assurances, etc.). En ces temps difficiles, ça vaut de l’or cette sécurité d’emploi!
Avis aux chefs syndicaux: il est grand temps de revenir sur terre avec des attentes salariales plus réalistes et de présenter un peu plus de souplesse dans la négociation des conditions de travail!
J’ai le sentiment que la population commence à en avoir ras-le-bol de la perturbation dans les écoles, les hôpitaux et autres milieux critiques.
QUELLE TOUR DE BABEL
À la décharge de François Legault et de Sonia LeBel qui se font crucifier chaque jour sur la place publique par les chefs syndicaux, voici dans quel genre d’univers bureaucratique se déroule la présente négociation avec les employés de l’État.
Le gouvernement est aux prises avec 103 conventions collectives et 81 tables de négociation dont:
- Au ministère de la Santé et des Services sociaux: 48 conventions collectives et 30 tables de négociation
- Au ministère de l’Éducation: 23 conventions collectives et 20 tables de négociation
- Au ministère de l’Enseignement supérieur: 10 conventions collectives et 9 tables de négociation
- À la fonction publique: 14 conventions collectives et 14 tables de négociation
- Au ministère de la Famille: 7 conventions collectives et 7 tables de négociation
- Au ministère de la Sécurité publique: 1 convention collective et 1 table de négociation
Et avec combien de syndicats le gouvernement doit-il négocier? Avec 71 syndicats.
LA CERISE SUR LE SUNDAE
Le gouvernement du Québec a également à sa charge 57 organismes gouvernementaux (sociétés d’État), dont la Caisse de dépôt et placement, Hydro-Québec, l’Autorité des marchés financiers, Investissement Québec, la SAQ, Loto-Québec, l’Agence du revenu du Québec, etc.
Savez-vous combien de conventions collectives chapeautent ces 57 organismes? Il y en a 200. Vous avez bien lu DEUX CENTS.
Dans cette «Tour de Babel» de la négociation au gouvernement du Québec, soulignons l’ampleur du défi que doivent relever la ministre responsable des négociations, Sonia LeBel, et son bras droit, Édith Lapointe, la secrétaire associée et négociatrice en chef du gouvernement.
Chapeau mesdames LeBel et Lapointe!