Vivre sa vie comme Dryden
Avez-vous déjà vu une personne plus cool?


Richard Martineau
Ado, je ne connaissais rien au hockey, ça ne m’intéressait pas vraiment, je fréquentais plus les bibliothèques que les patinoires, mais j’étais un fan fini de Ken Dryden.
En 2007, lorsque le journaliste Jocelyn Coulon s’est présenté en politique pour le PLC à Outremont, Ken Dryden l’a accompagné pour aller serrer des mains devant l’épicerie Les Cinq Saisons (qu’on appelait «Les Cinq Voleurs», car tout était hors de prix).
Quand je l’ai vu, j’ai figé.
Ken Dryden!
Ken F***g Dryden!
À côté de Jocelyn Coulon, qui n’est pas très grand, l’ex-numéro 29 avait l’air d’un géant.
Comme dans l’émission pour enfants The Friendly Giant, que je regardais à la CBC, en pyjama, quand j’étais tout petit.
J’étais tellement éberlué que j’ai pensé voter libéral pendant quelques secondes.
Bon, arrivé chez nous, je suis revenu à la raison.
Mais je pense que je ne me suis pas lavé la main droite pendant trois jours.
Je prenais quasiment ma douche avec un gant.
• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission de Richard Martineau, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
UN SURHOMME
Pour moi, Dryden était un homme total.
Comme les astronautes.
Un athlète, un intellectuel, un auteur, un avocat, grand, beau, fort, brillant, gentil.
Et le style!
Cette façon qu’il avait de s’appuyer sur son bâton quand l’action se déroulait plus loin sur la patinoire!
Avez-vous déjà vu quelque chose de plus cool?
Même Springsteen sur la pochette de l’album Born to Run n’était pas aussi cool!
Même Donald Lautrec dans ses bonnes années, avec sa moustache noire et ses danseuses à gogo!
«Grace under pressure», comme disent les Anglais.
Et on sentait qu’il ne faisait pas ça pour la galerie, ou parce que ça faisait de belles photos.
C’était lui.
Sa façon d’aborder la vie.
Ça va chauffer, ça va brasser, mais d’ici là, respirons par le nez et profitons de l’instant présent.
Y a pas de passé, pas d’avenir.
Juste «Ici. Maintenant».
À côté de Dryden appuyé stoïquement sur son bâton, Bouddha a l’air d’un écureuil sur un double espresso.
C’est ça que je voulais.
Vivre comme Dryden.
Affronter le monde et la vie comme Dryden.
Impassible. Imperturbable.
Au lieu d’être un p’tit nerveux.
Comment il faisait? C’était quoi, son secret?
• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission de Richard Martineau, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
DEBOUT DANS LA TEMPÊTE
Les grands connaisseurs de hockey, qui peuvent vous dire en 2,3 secondes quel joueur gaucher a compté le plus de buts en supériorité numérique dans des matches joués à domicile, sont tous d’accord pour dire que The Game, de Dryden, est le meilleur livre jamais écrit sur le hockey, voire sur n’importe quel sport.
Non seulement Ken Dryden était un athlète formidable, mais il était un grand auteur!
Et un gentleman, paraît-il!
Un bon mari, un bon père de famille!
À cette époque de fous, où tout craque de partout, où plus rien n’a de sens et où il se vend plus d’antidépresseurs que de Smarties et de M&Ms réunis, on aimerait tous être comme Dryden.
Les deux pieds bien plantés sur le sol.
Les yeux fixés sur l’horizon.
Le menton appuyé sur nos mains.
Dans notre bulle.
Entendant le brouhaha, mais ne l’écoutant pas.
«Checkant la game» de loin.
Prêt à tout.
Ne craignant rien.