«Montréal, je vous aime!»: Victoria Mboko est la grande championne de l’Omnium Banque Nationale

Jessica Lapinski
«Tout peut arriver», disait Victoria Mboko quelques instants après s’être qualifiée pour la finale de l’Omnium Banque Nationale de Montréal, mercredi. Vingt-quatre heures plus tard, elle peut maintenant dire: «Tout est arrivé».
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De joueuse méconnue à sensation des derniers jours au Stade IGA, la Canadienne invitée des organisateurs est finalement passée au statut de grande championne adorée jeudi. Grâce à une victoire de 2-6, 6-4 et 6-1 aux dépens de la Japonaise Naomi Osaka, 49e mondiale, mais ancienne reine de la WTA.

Une première à Montréal pour une joueuse du pays. À 18 ans et 348 jours, elle est entrée dans la légende en devenant la plus jeune raquette du Canada à triompher à l’Omnium, supplantant Bianca Andreescu il y a six ans, à Toronto.
L’exploit est immense. Avant de mettre les pieds dans la métropole, «Vicky» n’avait disputé que cinq tournois sur la WTA, le tout depuis mars seulement. Elle n’avait jamais dépassé la troisième ronde, mais, déjà, plusieurs de ses prestations avaient fait tourner les têtes.
On aurait pu croire qu'elle venait pour apprendre. Et pourtant...
La voici championne d’une épreuve de la catégorie WTA 1000, la plus importante derrière les quatre tournois du Grand Chelem. Chez elle, par surcroît. Là encore, seule Andreescu a réalisé l’exploit parmi les joueuses canadiennes, elle qui en compte deux.
Ce titre devrait aussi lui permettre de devenir, lundi, la joueuse de tennis la mieux classée au pays – 25e –, tous sexes confondus. Devant Félix, Leylah, «Shapo» et compagnie!
Le tout après avoir dû aller à l'hôpital, jeudi matin, parce que son poignet droit blessé lors d'une chute, la veille en demi-finale. Mboko a dû passer un test d'imagerie par résonance magnétique, mais les résultats se sont révélés positifs.
«Je n’aurais jamais pensé gagner un tournoi comme ça. Naomi est une grande joueuse, j’étais très nerveuse», a laissé tomber la championne sur le court, peu après son couronnement.

Elles ne voulaient pas perdre
Ç’a paru lors de cette grande finale, dont la qualité, en matière de jeu, était à des années-lumière de celle offerte par Mboko et la Kazakhe Elena Rybakina la veille.
Les deux jeunes dames étaient nerveuses. Ç’a paru à partir de la deuxième manche. Pour l’une comme pour l’autre, l’enjeu était immense.
On a beau dire qu’elles n’avaient rien à perdre, mais qui a envie de perdre, justement, si près du but?
Osaka était en quête d’un premier titre d’importance depuis les Internationaux d’Australie, en 2021. Il y avait longtemps que l’ancienne reine du circuit n’avait plus présenté un tennis aussi solide que celui qu’elle a joué dans les derniers jours à Montréal.

Et Mboko... La Torontoise n’avait peut-être aucune attente avant le début de ce tournoi, mais sa résilience et son courage sur le court tout au long des 12 derniers jours confirmaient que tout ce qui se disait à son sujet était vrai. «Vicky» déteste la défaite.
La première manche a tout de même offert un bon spectacle à ces quelque 12 500 spectateurs – une autre salle comble – qui s’étaient déplacés pour l’alléchante affiche.
Mais Mboko a eu du mal à s’ajuster au jeu puissant d’Osaka, mais surtout plus varié que celui auquel elle avait fait face mercredi, contre Rybakina.

La deuxième manche a été une comédie d’erreurs, de doubles fautes (10, dont huit pour Mboko) et, surtout, de bris de service. En fait, jusqu’au sixième jeu, aucune des deux femmes n’était parvenue à conserver le sien.
La débandade d’Osaka
La Canadienne a été la première à réussir, pendant qu’Osaka, elle, dépérissait à vue d’œil. Elle s’est d’abord plainte à l’arbitre de la foule qui placotait durant les points.
Aux changements de côtés, la Japonaise a commencé à se cacher la tête sous sa serviette.

Sa frustration était palpable. C’était elle, l’ancienne grande championne, et pourtant, c’était l’aspirante qui parvenait le mieux à garder son calme. À un moment, après avoir été brisée, elle a fait rebondir sa raquette et sa balle sur le central.
La Torontoise s’est accrochée pour remporter la deuxième manche devant une foule qui, à l’appel du pointage, s’est levée d’un bond pour l’acclamer. «Vicky! Vicky! Vicky!» a-t-on entendu résonner dans le stade.
De frustrée, Osaka a alors paru abattue. À chaque frappe ratée, elle semblait aux bords des larmes. La victoire était présentée sur un plateau d’argent à Mboko. C’était à elle de ne pas le laisser échapper.
Et elle a tenu. Quelque deux heures après être arrivée sur le court pour le plus grand moment de sa carrière, «Vicky» a finalement pu savourer l’instant sous un tonnerre d’applaudissements.
Une ado dans la cour des grandes
La balle de match jouée, Mboko a lâché sa raquette, puis s’est mise à genoux avant de se relever en portant ses mains à son visage. L’ado venait d’entrer dans la cour des grandes grâce à moult démonstrations de courage, de persévérance, mais aussi d’un immense talent.
Après les salutations avec Osaka – brèves –, elle a serré la main de l’arbitre, puis est allée enlacer ses entraîneurs, qui l’accompagnent depuis neuf mois.
Sa grande victoire a d’ailleurs été entendue jusque chez elle, à Toronto. La finale masculine a été temporairement mise sur pause parce que la foule s’est levée pour l’applaudir en plein match, à 550 kilomètres de Montréal.
«Je vous aime, Montréal!» a lancé la championne à la foule, avant de pouvoir finalement brandir à bout de bras le premier trophée WTA de sa carrière, sous les flashs d’une dizaine de photographes avides de capturer ce moment d’anthologie.
Montréal t’aime aussi, «Vicky». Aucun spectateur qui t’a vue sur un court dans le courant des 12 derniers jours n’oubliera ton nom. En fait, ils se souviendront même de ton surnom.