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L'article provient de TVA Nouvelles
Politique

Victime d'allégations mensongères: la descente aux enfers du député déchu Claude Surprenant

PHOTO DIDIER DEBUSSCHÈRE
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Gabriel Côté

2023-11-04T04:00:00Z
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Objet d’un blâme de l’Assemblée nationale après les allégations d’une ex-employée qui ont détruit sa vie professionnelle et sa famille, l’ex-député déchu Claude Surprenant espère laver sa réputation en publiant un livre racontant sa descente aux enfers.

• À lire aussi: L'ancienne attachée politique d'un ex-député accusée de fraude

«Je suis fatigué, je veux passer à autre chose. Cette affaire a mobilisé des années importantes de ma vie, et là, j’ai écrit un livre pour tourner la page sur tout ça», explique M. Surprenant en entrevue avec notre Bureau parlementaire.

Les yeux rivés sur la fenêtre, il regarde le parlement dans la lumière d’un jour de pluie. «Ça a été très dur, songe-t-il. Je n’aurais jamais pensé que ça prendrait aussi longtemps.» 

Élu député en 2014, Claude Surprenant engage Julie Nadeau dans son équipe au bureau de comté pour s’occuper des tâches administratives. «Elle prétendait avoir fait des études en droit, et c’était pour moi un gage de probité», explique-t-il.

L’ancien député Claude Surprenant (ici au parlement) publie le 4 novembre «Un fausse avocate berne l’Assemblée nationale. La vérité défendue avec courage» aux éditions Preztij.
L’ancien député Claude Surprenant (ici au parlement) publie le 4 novembre «Un fausse avocate berne l’Assemblée nationale. La vérité défendue avec courage» aux éditions Preztij. PHOTO DIDIER DEBUSSCHÈRE

Cette décision allait s’avérer fatale. Dès le mois d’août, Mme Nadeau commence à réaliser des transactions «irrégulières» avec le compte bancaire du bureau de circonscription. «Elle s’est même signé des chèques», s’indigne l’ancien élu. 

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Quand le subterfuge est découvert, M. Suprenant confronte son employée, qui se mettra en congé de maladie peu après, en fournissant un faux billet médical. Elle sera remerciée quelques mois plus tard, sur recommandation de la direction de l’Assemblée nationale. 

Spirale infernale

Mais entre-temps, la spirale infernale s’est enclenchée. Surprenant est éjecté du caucus de la CAQ en janvier 2017 à cause des irrégularités dans ses dépenses de députés, puis réprimandé quelques mois plus tard par le commissaire à l’éthique pour la même raison. 

«Le rapport était plein de faussetés, le commissaire s’était fié à Julie Nadeau. Je lui ai dit quand il me l’a remis dans mon bureau, mais il m’a répondu que son travail était de faire un rapport, et que c’était aux élus de l’adopter ou non.» 

Au Salon bleu, le résultat a été sans équivoque: hormis les députés de Québec solidaire qui se sont abstenus, tous ont voté en faveur du rapport, faisant de Claude Surprenant le premier élu à être l’objet d’un blâme du commissaire. «Le pire, c’est que des députés me disaient en privé qu’ils comprenaient ce que je vivais», se désole-t-il. 

PHOTO DIDIER DEBUSSCHÈRE
PHOTO DIDIER DEBUSSCHÈRE

 Dans son livre, l’ex-député raconte d’ailleurs qu’il a pu compter sur le support de deux collègues caquistes: Simon Jolin-Barrette et Chantale Soucy. «Ils voulaient que je puisse m’expliquer au caucus, relate-t-il. Mais des gens plus influents ont fait peser la balance de l’autre côté...»

Parmi ces personnes, Claude Surprenant cite Sonia LeBel, qui était alors une conseillère non élue de François Legault. «J’ai été stupéfait de l’entendre défendre [la gestion] des perceptions plutôt que le droit», dit-il.

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Une vie détruite

Depuis, sa version des faits a été accréditée par une décision du Tribunal administratif du travail et par le dépôt d’accusations au criminel contre Julie Nadeau par l’UPAC.

Les conséquences du blâme qu’a reçu M. Surprenant demeurent néanmoins gigantesques. Largué par la CAQ puis défait aux élections suivantes où il se présentait comme indépendant, il a eu du mal à se trouver du travail par la suite, car personne n’osait lui faire confiance. 

«Aujourd’hui encore, j’ai une entreprise, mais je reste dans l’ombre pour ne pas nuire à mes collaborateurs», souffle-t-il.  

Conséquemment, les dernières années ont été difficiles pour lui aussi sur le plan financier. «J’ai vendu des actifs pour assumer mes dépenses et mes revenus ont été faméliques», pose-t-il, lui qui réclame de l’Assemblée nationale une compensation financière de deux millions $ en plus d’excuses en bonne et due forme. 

Mais le pire aura été l’impact de cette histoire sur sa famille. «Je me suis séparé de ma femme et je me suis éloigné de mes enfants», laisse-t-il tomber, avec un sanglot dans la voix. «Ça a été très lourd.»

Le fil des événements  

  • Avril 2014: Claude Surprenant est élu député de la circonscription de Groulx. Il embauche Julie Nadeau comme attachée politique.
  • Novembre 2016: Un rapport juricomptable établit que Julie Nadeau a effectué 23 transactions irrégulières entre août 2014 et novembre 2015. 
  • Décembre 2016: Claude Surprenant congédie Julie Nadeau. Elle intentera une poursuite devant le Tribunal administratif du travail.
  • Janvier 2017: Julie Nadeau allègue dans les médias que Claude Surprenant a employé du personnel politique rémunéré par des fonds publics pour faire du travail partisan. Ouverture d’une enquête par le commissaire à l’éthique. Surprenant est exclu du caucus de la CAQ. 
  • Novembre – décembre 2017: Le commissaire à l’éthique blâme Claude Surprenant. 
  • Février 2022: Le Tribunal administratif du travail reconnaît que Claude Surprenant avait raison de congédier Julie Nadeau. 
  • Décembre 2022: Julie Nadeau est accusée de fraude, de parjure et d’usage de faux.  

Extraits du livre

«J’ai perdu de nombreuses années de relation avec mes fils, des années importantes de leur vie [...]. J’écoutais mon instinct de survie. À ce jour, je suis encore en mode réparation auprès de mes deux enfants et de mes petits-enfants. Je vacille à recréer ce solide noyau familial que nous avions.»

«Le lendemain du dépôt des accusations de l’UPAC contre mon ancienne employée en décembre 2022, j’ai visité la tombe de ma mère pour lui partager ce qui représentait pour moi la promesse que justice serait enfin rendue. Ma mère avait quitté ce monde alors que je vivais la pire crise de ma vie et je me plaisais à penser que cette nouvelle allait l’aider à reposer en paix.»

«Le code d’éthique [des députés] doit être révisé impérativement pour que la basse politicaillerie cesse de nuire aux intérêts supérieurs du Québec.»

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