Récession «sévère», «boucherie» politique et «guerre nucléaire»: les alliés de Trump inquiets face aux tarifs douaniers

AFP
Entre craintes pour l'économie américaine et peurs pour leur propre avenir électoral, un nombre croissant d'alliés de Donald Trump font entendre une petite musique de contestation face aux droits de douane massifs annoncés par le président.
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«Si nous entrons en récession, particulièrement une récession sévère, 2026 sera très probablement une boucherie» politique, a lancé vendredi le sénateur républicain Ted Cruz sur son podcast.
L'élu du Texas évoquait les conséquences de droits de douane prolongés sur la croissance américaine et sur les chances des républicains aux élections législatives de mi-mandat en novembre 2026.
La défense du libre-échange est un principe fondamental du Parti républicain depuis de nombreuses décennies. La volte-face protectionniste amorcée par le locataire de la Maison-Blanche bouleverse donc la doctrine de son camp, sur lequel il conserve toutefois une main de fer.
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«Calmer les Bourses»
Tout en exprimant ses inquiétudes, Ted Cruz a ainsi défendu l'approche de Donald Trump.
«La raison pour laquelle le président Trump fait cela, c'est que nous avons observé, au cours des 50 dernières années, une éviscération de l'industrie manufacturière en Amérique», a-t-il justifié lundi.
Mais le sénateur texan craint que des conseillers à la Maison-Blanche ne souhaitent conserver ces droits de douane à long terme, au lieu de les utiliser comme leviers de négociation avec les pays étrangers pour obtenir des conditions commerciales plus avantageuses.
«J'exhorte le président à conclure des accords majeurs et à les conclure rapidement pour calmer les Bourses - quelques accords rapides, ça aiderait vraiment».
La semaine dernière, une poignée de sénateurs républicains s'étaient déjà désolidarisés de Donald Trump et s'étaient joints aux démocrates pour adopter une mesure symbolique s'opposant aux droits de douane imposés au Canada.
«La liberté et la paix s'appuient sur des marchés ouverts et le libre-échange», a écrit vendredi le républicain Rand Paul sur X.
«Hiver nucléaire»
Un autre sénateur conservateur, Chuck Grassley, a également présenté la semaine passée une proposition de loi qui imposerait au président américain d'obtenir l'approbation du Congrès pour tout nouveau droit de douane. Un texte similaire va être introduit à la Chambre des représentants, a annoncé dimanche l'élu républicain Don Bacon.
Leurs propositions respectives ne devraient toutefois pas être débattues dans l'immédiat au Congrès, et feraient face dans tous les cas au veto présidentiel.
Les élus républicains ne sont cependant pas les seuls alliés de Donald Trump à exprimer leur inquiétude, voire leur mécontentement face à la politique commerciale de la Maison-Blanche.
«Le président est en train de perdre la confiance des dirigeants d'entreprises à travers le monde», a lancé sur X dimanche le milliardaire Bill Ackman, qui avait soutenu le candidat républicain en novembre.
«Ce n'est pas ce pour quoi nous avons voté», a assuré ce patron d'un fonds d'investissement majeur à Wall Street, appelant Donald Trump à «dire pause» sur les droits de douane.
«Autrement, nous nous dirigeons vers un hiver nucléaire auto-infligé pour l'économie», a estimé Bill Ackman.
Le patron de la banque américaine JP Morgan Chase, Jamie Dimon, a aussi averti lundi que les droits de douane allaient «probablement augmenter l'inflation» et qu'ils ralentiraient la croissance.
Musk et Friedman
Considéré comme l'un des plus puissants dirigeants au monde, Jamie Dimon s'était opposé par le passé à Donald Trump, avant d'opérer un rapprochement marqué lors de la campagne de 2024, à l'instar de nombreux grands patrons de la finance ou de la tech.
Elon Musk, l'homme le plus riche du monde et important soutien financier de la campagne du milliardaire républicain, a lui-même marqué son opposition aux droits de douane.
Le patron de Tesla et SpaceX a posté dimanche sur sa plateforme X une vieille vidéo de l'économiste libéral Milton Friedman, dans laquelle il défend le libre-échange, et donc l'élimination des barrières douanières. Elon Musk a également dit samedi espérer que l'Union européenne et les États-Unis aboutissent à une situation de droits de douane nuls entre eux.
Mais si certaines voix commencent à se faire entendre à droite, la Maison-Blanche est loin de faire face à une rébellion ouverte. Et Donald Trump a répété dimanche qu'il ne bougerait pas.
«Ne soyez pas faibles ! Ne soyez pas stupides», a-t-il lancé face à la dégringolade des places financières.