Vers la fin du profilage racial dans les corps policiers au Québec ?
Sacha-Wilky Merazil
Que ce soit ici ou ailleurs, aux États-Unis notamment, de nombreuses vidéos montrant des cas allégués de profilage racial font quotidiennement le tour de la toile.
Au cours des dernières années, de nombreux conducteurs québécois, issus des minorités, ont dénoncé des contrôles abusifs. Plus tôt cette semaine, le juge Michel Yergeau de la Cour supérieure a rendu un jugement qui a fermé le débat en plus d’en ouvrir un autre : est-ce que le profilage racial est nécessaire comme méthode ?
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Mon expérience
Je me suis fait intercepter de nombreuses fois sans motif raisonnable et sans avoir commis d’infraction. « Monsieur, je vous intercepte, car vous roulez dans un véhicule de location. » « Monsieur, je vous arrête, car le véhicule est au nom d’une femme. » « Monsieur, je vous intercepte parce que j’ai le droit... même si vous n’avez rien fait ! »
À chaque fois que je relatais mes histoires ou que je publiais les interventions, des Blancs m’ont confié sur mes différents réseaux sociaux ne jamais avoir subi ce type d’interventions. Une étude commandée par le SPVM démontre que les personnes noires étaient jusqu’à 4,2 fois plus interpellées que les personnes blanches.
Dans sa décision, le juge Yergeau a ordonné la fin des interpellations non justifiées tout en soulignant l’existence du profilage racial. Ceci constitue une première reconnaissance pour le droit des personnes racisées, qui n’ont rien à se reprocher, de conduire librement. Une petite victoire pour les conducteurs des groupes minoritaires.
Rebâtir les ponts avec la police
Face à une recrudescence de la violence armée à Montréal et dans d’autres villes québécoises, il faut plus que jamais rassurer la population et parallèlement fournir des outils nécessaires aux agents de la paix qui protègent et servent d’un bout à l’autre de la Belle Province. Que ce soit sur l’île de Montréal ou à l’extérieur, pour beaucoup de personnes racisées sans histoire, la police rime avec une perception négative, et pour bien des policiers, ils associent la criminalité aux personnes de groupes ethnoculturels.
Quoi qu’il en soit, avec une telle nouvelle, l’heure est à la réconciliation et à l’avancement collectif pour l’édification de la police de demain.
Quoique souvent réfuté, le racisme systémique existe au Québec. Pour le premier ministre Legault et son gouvernement, le racisme systémique n’existe pas et n’est qu’une question de sémantique. Je suis de ceux qui croient que le moment est venu pour le gouvernement caquiste d’officiellement reconnaître l’existence du racisme systémique au Québec.
L’homme de la situation ?
Qui de mieux pour le faire ? Le nouveau ministre responsable de la Lutte contre le racisme, Christopher Skeete. Il est lui-même un élu noir, et avec son expérience personnelle et politique il saura piloter les dossiers de réconciliation entre la police et les minorités en plus d’officiellement, souhaitons-le, faire reconnaître le caractère institutionnel et systémique du racisme au Québec par son chef et ses collègues.
Je me réjouis de ne plus avoir à me justifier d’être une personne noire et innocente derrière un volant. Je ne suis pas seulement une personne noire, mais avant tout un citoyen québécois qui a des droits.
À présent, je n’entendrai plus dire : « Si tu n’as rien à te reprocher, donne-nous ton permis qu’on enquête sur toi ».

Sacha-Wilky Merazil, Titulaire d’un diplôme de 1er cycle en immigration et relations interethniques, ex-candidat aux élections municipales et citoyen de Montréal