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L'article provient de Le Journal de Québec

«Une social-démocratie ne fabrique pas des millionnaires avec de l’argent public», rappelle un observateur

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Gabriel Côté

2025-06-05T04:00:00Z
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Les salaires toujours plus énormes des hauts dirigeants des sociétés d’État sont un signe que nous avons perdu le sens du service public, déplore un politologue.

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«Au Québec, on aime se péter les bretelles en disant qu’on est une petite Suède d’Amérique du Nord, une social-démocratie. Bien je m’excuse, mais une social-démocratie ne fabrique pas des millionnaires avec de l’argent public», tonne Marc Chevrier, en entrevue avec Le Journal.

De fait, les exemples de salaires mirobolants dans l’appareil public sont légion. L’an dernier, le président et chef de la direction de la Caisse de dépôt, Charles Émond, a touché une rémunération globale de 4,95 M$. Le PDG d’Hydro-Québec, Michael Sabia, a pour sa part empoché 840 000$.

Plus loin des feux de la rampe, il n’est pas difficile de trouver des salaires de plus de 250 000$, même chez des «cadres de deuxième catégorie».

L’idéal du service public

Pour justifier ces salaires, on soutient habituellement que les bons candidats ne viendront pas travailler au public si on ne leur offre pas des montants équivalents à ce qu’ils pourraient gagner au privé.

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«C’est un argument assez faible, affirme M. Chevrier. En disant cela, on admet que servir l’État, au Québec, n’est pas une source de prestige. C’est comme si on suppliait nos élites administratives de venir servir l’État!»

«Mais dans une démocratie, en principe, le service public ne sert pas à s’enrichir, renchérit-il. Servir l’État implique des responsabilités qui justifient un salaire approprié en fonction de la complexité de la tâche, mais il y a une limite, car le but du service public est de servir adéquatement l’intérêt général.»

Modération

Ailleurs dans le monde, ce principe est enchâssé dans les lignes directrices concernant la rémunération des emplois supérieurs.

En Suède, il est précisé que la rémunération globale des cadres dirigeants doit être «raisonnable et réfléchie», «plafonnée et adaptée à l’objectif visé», et qu’elle ne doit pas se calculer «à l’aune d’entreprises comparables, mais se caractériser par une certaine modération».

Dans le même esprit, la France a adopté une «politique de modération»plafonnant la rémunération des dirigeants des entreprises de l’État à 450 000 euros par an.

Au Québec, ce mot de «modération» n’apparaît nulle part dans la loi sur la gouvernance des sociétés d’État ni dans les décrets concernant la rémunération et les conditions de travail des titulaires d’un emploi supérieur.

«Est-ce qu’on veut que la norme soit de s’aligner sur les salaires dans les grandes entreprises ou des fonds d’investissement privés? C’est une question, et je n’ai pas la réponse. Mais il faut un débat, et ce débat n’a pas lieu en ce moment», conclut M. Chevrier.

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