Marina Orsini s'est inspirée de son rôle dans «Une autre histoire» pour ce projet
L’album «Reconstruire les saisons» est disponible sur l’ensemble des plateformes numériques.

Patrick Delisle-Crevier
Sur sa liste de souhaits, Marina avait cette idée de faire un jour un album, une envie qu’elle caressait depuis fort longtemps. Une rencontre a été marquante pour elle, celle de Catherine Major, qui lui a donné l’envolée dont elle avait besoin pour faire l’album Reconstruire les saisons. Sur ce disque, elle écrit plusieurs des textes, emprunte aussi la plume d’artistes, comme Jeff Moran, Nelson Minville et Manuel Tadros, et chante également en duo avec, entre autres, Richard Séguin, Paul Piché et Manuel Tadros. Entrevue avec Marina sur la réalisation de son rêve et sur les projets qu’elle cumule et qui la nourrissent.
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Marina, nous pouvons dire, sans exagérer, que ce disque qui vient de sortir est le projet d’une vie pour toi.
Complètement! Je voulais faire un disque depuis fort longtemps et je pense que, dans la vie, tout est une question de timing. Je n’aurais pas pu faire un tel disque il y a 10 ans et pourtant, dans mes 40 ans de carrière, des albums, j’aurais pu en faire à quelques reprises. Mais je n’étais pas là-dedans. Par contre, le rêve, le désir de toucher à ça un jour était présent. Et mon métier m’a appelée à chanter ici et là sur des plateaux, dont à En direct de l’univers et au Bye Bye, il y a 30 ans. C’est rare que je refuse une proposition qui me demande de chanter, car j’adore ça. Mais là, c’est complètement autre chose, car la moitié de l’album part de mes écrits en collaboration avec d’autres personnes. Un jour, j’ai décidé qu’il était temps que je fasse cet album, et on dirait qu’à partir de ce moment tout a convergé pour que ça arrive. Ça fait 4 ans que je travaille sur ce projet et ça fait 10 ans que j’écris des textes.
Comment décrirais-tu ton album Reconstruire les saisons?
Pour le titre, c’était clair qu’il devait y avoir le mot saison, parce que ça parle des saisons de nos vies. Quand on écoute les chansons, ça parle du mois de novembre, de tempêtes et de tourments. Il faut dire que le processus d’écriture des chansons s’est aussi beaucoup passé chez moi, à la campagne, dans la nature. J’aimais aussi l’idée de reconstruire les saisons. C’est une lettre d’amour à l’amour et à l’amour de la vie, parce que dans notre vie, tout nous ramène à l’amour, avec toute sa beauté et sa fragilité.
Pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant de faire cet album?
Je pense que j’étais tout simplement ailleurs dans ma vie. Je crois beaucoup au destin et je pense que ce projet-là, je devais le faire avec Catherine Major, qui réalise et qui signe la musique, les orchestrations et tous les arrangements. Je l’ai rencontrée en 2015, à la radio, alors que j’animais une émission à Rouge FM. De là est née une amitié coup de cœur avec Catherine. Elle a été un pilier dans la création de cet album, mais aussi dans le processus qui m’a amenée à enfin me lancer dans la chanson. C’est une immense artiste, j’ai beaucoup apprécié mon travail avec elle et Jeff Moran, qui est lui aussi un grand artiste. J’adore sa façon d’écrire pour les femmes. D’avoir ces gens-là dans ma vie, ç’a été l’élément déclencheur de cette aventure, un trio parfait. Un jour, Catherine m’a convaincue que je devais chanter; c’est elle qui m’a poussée à faire ce disque. Elle m’a lancé: «On le fait, ton disque» en plein cœur de la pandémie. Ça m’a confrontée et ça m’a donné la poussée dont j’avais besoin pour me lancer tête première dans le projet, une validation en quelque sorte. C’est un rêve que je réalise, à 58 ans.
Et comment s'est passé l’enregistrement de ton premier album?
Je dois te confier que c’est en réalité mon deuxième album, parce que pour l’année de mes 50 ans, je m'étais fait la promesse de toucher à la musique. Je me suis payé le plus beau des cadeaux et je suis entrée en studio avec des musiciens. J’ai fait un album de 10 chansons, toutes des reprises de chansons populaires. Ce fut, en fait, un prélude pour moi, parce que j’avais besoin d’aller tester des choses pour savoir si j’étais capable de faire ça. Ça a donné un super beau résultat, que j’ai gardé complètement pour moi.
Tu signes en coécriture la moitié des textes de l’album. Parle-moi de l’écriture de ces chansons.
La vie, les passages obligés, ceux que, des fois, on ne voit pas venir, les rêves d’éternité avec quelqu’un, la déception amoureuse, ma mère, ce sont tous les sujets qui sont venus nourrir les textes. Pour moi, l’écriture est une façon de vider une peine, une déception, un fantasme ou un souhait. L’écriture a pris beaucoup de place à la campagne, alors que j’étais toute seule dans ma forêt. Ce fut très inspirant. J’ai traversé la vie, les décennies, j’ai regardé en arrière, j'ai revisité les saisons de ma vie et j’ai mieux compris certaines choses. J’ai aussi pu apprivoiser certains deuils.
Ce fut donc fort thérapeutique?
Totalement! Mettre ces mots-là en musique, c’est très bouleversant quand tu ne l’as jamais fait. J’ai souvent pleuré en faisant cet album.
On te connaît comme comédienne, comme animatrice, et voilà que tu arrives en tant que chanteuse. Comment te sens-tu de présenter ce volet de toi?
C’est le plus grand trac de ma vie! C’est certain que j’ai un peu eu le syndrome de l’imposteur, parce que je ne suis pas une chanteuse. Je pense que ça vient avec l’âge, mais on dirait que je suis prête à assumer tout ce qui vient, avec succès, ou pas. J’assume! Je suis fière de ce disque. J’avais besoin de faire ce projet et j’ai ce qu’il faut, à 58 ans, pour assumer tout ça.
Te souviens-tu de comment est née la chanteuse en toi?
Elle a toujours été là. À 15 ans, je faisais partie d’un groupe, et nous chantions du Journey. La musique est dans ma vie depuis toujours, et je ne pourrais pas vivre sans musique. J’ai tellement aimé faire ce disque que j’en ferais 10 autres parce que j’ai eu la piqûre. Mais si je n’en fais pas plus, ce sera bien correct. J’ai réalisé un rêve sur ma bucket list, et j’en suis heureuse.

Et quel est le prochain truc sur ta bucket list?
J’aimerais faire plus de voyages. J’ai beaucoup voyagé en 2024, et ce fut l’une des plus belles années de ma vie parce que j’ai eu du temps pour moi. Je suis allée en Espagne, je suis retournée en France, j’ai visité des amis dans Charlevoix et à Kamouraska. Ça a fait du bien de me laisser porter par le temps et d’avoir le luxe de pouvoir le faire. Je me souhaite de continuer comme ça. Je dois aussi dire que j’ai toujours eu le privilège d’être là où j’avais envie d’être dans ma carrière, et c’est encore le cas avec cet album. Je développe aussi deux projets de séries documentaires et je vais faire une autre saison de mon balado sur les proches aidants. J’aime tellement le documentaire que je ferais juste ça. C’est mon expérience à Deuxième chance qui m’a amenée vers ça.
Est-ce que la comédienne en toi est rassasiée?
Je ne vais jamais être rassasiée de ce métier que j’aime tant. Même que j’ai envie de continuer, tant que ce sera possible. Mon dernier rôle, celui d’Anémone dans Une autre histoire, en fut un marquant pour moi. La dernière chanson sur mon album a pour titre Les anémones, et c’est la chanson du dernier épisode que Catherine et moi avions faite en duo et que je reprends en solo sur le disque.
Est-ce difficile pour toi de vieillir à l’écran?
Pas vraiment. Il y a parfois des affaires qui me chicotent, parce que je suis coquette. Quand je vois, par exemple, mon double menton, je demande qu’on lève la caméra un peu. Mais je pense que le fait d’être comédienne, ça m’aide sur le plan du vieillissement, parce que si j’étais juste animatrice, ce serait autre chose. Mais en tant qu’actrice, on m’a tellement vue dans toutes sortes de contextes: maganée, pas maquillée, cernée, de face, de profil... Tout ça m’a donc aidée à accepter de vieillir.
Jusqu'à maintenant, as-tu eu la vie que tu voulais sur le plan personnel?
Je voulais un enfant et j’ai eu mon fils, Thomas. Ça me comble tellement! Mais c’est certain que j’aurais voulu d’une vie de couple qui dure. Me séparer, ça faisait en sorte que je devais me séparer de mon fils une semaine sur deux et, pour moi, tout ça était inconcevable. Mais on a été chanceux au bout du compte, car on a réussi notre séparation. Serge et moi sommes devenus les meilleurs amis du monde et c’est précieux, tout ça malgré la peine, et tout ce qui vient avec une séparation.
Crois-tu encore au grand amour?
Oui, j’y crois encore. Mais ça change en vieillissant, car c’est pas mal certain que je ne vais pas passer les 40 prochaines années avec quelqu’un. Je suis célibataire depuis quatre ans et je suis heureuse toute seule. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu des passages difficiles, parce que se séparer, c’est douloureux. En vieillissant, on sait beaucoup plus ce que l’on veut et ce que l’on ne veut pas. Je me trouve chanceuse d’être bien, d’être indépendante et autonome. Je ne m’ennuie jamais dans ma vie. Je veux vieillir en harmonie et dans une vie simple, et si un homme entre dans ma vie, ça va être ça.
Tu es maman de Thomas; aurais-tu aimé avoir d’autres enfants?
Oh que oui! J’aurais aimé en avoir au moins deux ou trois. Mais ça n’a pas été ça. J’ai toujours été une maman très présente pour mon fils et c’est un garçon extraordinaire! Nous avons une belle relation, lui et moi. Il a déjà 22 ans et il est dans la musique. Il fait son chemin et il est lui aussi là où il souhaite être. Mais pour lui, les choses ne vont jamais assez vite. Je tente de lui dire de prendre son temps. Dans le métier qu’il a choisi, il faut y aller étape par étape. La musique fait partie de sa vie et je pense qu’il avait 10 ans lorsqu’il a surpris son père à En direct de l’univers. Il a grandi dans les coulisses des comédies musicales de son père, il venait à la radio avec moi quand il était petit. La musique a donc fait partie de sa vie depuis son enfance et — je ne dis pas ça parce que c’est mon fils — il a un magnifique talent! Je tente de l’accompagner là-dedans.
Tu ne fais pas de télévision en ce moment. Est-ce que ça te manque?
Non, car je l’ai beaucoup fait. C’est ça, la beauté de ne pas être qu’une seule chose, de toujours avoir des projets et de toujours cultiver quelque chose. Je vais au théâtre, au cinéma et voir des spectacles. Il faut que je reste branchée sur ma vie et je tiens ça de ma mère. Elle est décédée à 75 ans, et jusqu’à ce qu’elle tombe malade, elle avait un horaire plus occupé que le mien. Elle était toujours juste sur une patte, à travailler, à se réinventer, et elle me disait toujours que «mes désirs sont plus grands que mes peurs». Ce projet d’album, c’est ça. Mon désir de le faire était plus grand que la peur que ça créait. Je vais garder ça en moi toute ma vie.