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L'article provient de Le Journal de Montréal
Politique

Une réforme devenue nécessaire

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Photo portrait de Josée Legault

Josée Legault

2022-10-13T21:00:00Z
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Un sondage Léger/Le Journal publié hier a posé LA question. Souhaitez-vous une réforme ou non du mode de scrutin actuel? Une majorité claire de Québécois (53%) répond oui, je le veux, incluant 30% d’électeurs caquistes.  

Sur l’écart qui se creuse entre le pourcentage des voix remportées par chaque parti et son nombre de sièges à l’Assemblée nationale, le sondage a demandé si «cette situation est un problème selon vous».

Pour 61% des répondants, la réponse est oui, dont 38% d’électeurs caquistes. Ça commence à faire beaucoup de monde. Comme quoi les distorsions majeures issues des élections du 3 octobre inquiètent de très nombreux Québécois. 

Pendant la campagne, malgré qu’il s’y soit engagé en 2018, François Legault s’est toutefois refusé à réformer le mode de scrutin pour le rendre plus représentatif de la volonté populaire.  

Selon le premier ministre, le sujet «n’intéresse pas la population, à part quelques intellectuels». Or, à moins que le Québec soit la seule société au monde à compter 53% d’intellectuels, le sujet intéresse pas mal de monde.

À sa décharge, M. Legault n’est pas le premier chef de gouvernement à avoir renié sa promesse de changer le mode de scrutin. Avant lui, il y a eu René Lévesque, Jean Charest, Justin Trudeau, etc.

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Absurdistan

François Legault est néanmoins le premier du lot à être témoin de la pire distorsion à ce jour au Québec entre le vote populaire et le nombre de sièges récoltés par chaque parti.

Face à quatre partis d’opposition, il est aussi le premier à entrer de plain-pied dans une nouvelle ère de multipartisme. Ce que le mode actuel de scrutin, taillé sur mesure pour le bipartisme, est incapable de représenter équitablement lorsqu’il y a plusieurs partis.

À preuve, avec 41% des voix, la Coalition Avenir Québec (CAQ) a raflé 72% des sièges à l’Assemblée nationale (90 sur 125). Avec 14,6% des votes, la députation du Parti Québécois (PQ) a carrément fondu à trois élus.

Avec un appui semblable (14,4%), le Parti libéral du Québec a remporté 21 sièges, soit 7 fois plus que le PQ. Tandis que Québec solidaire (QS), à 15,43%, a dû se contenter de 11 sièges.

La cerise sur le gâteau: avec 13% des votes, les conservateurs ont eu zéro siège. Bienvenue en Absurdistan. 

La clé de l’inquiétude

La clé du 53% d’appuis à une réforme du mode de scrutin – et du 61% pour qui le statu quo pose problème – se trouve dans ces résultats absurdes. Le premier ministre fermant la porte à tout changement, le danger est que le sujet finisse par sombrer dans l’oubli. 

Pour calmer le jeu, M. Legault compte aussi sur quelques accommodements qui, si la cheffe libérale y consent, pourraient allouer au PQ et à QS de meilleurs budgets et plus de temps de parole au Salon bleu.

Ce serait déjà mieux que le statu quo, mais cette «solution» ne serait qu’un cataplasme. Le vrai bobo, lui, resterait non soigné. 

Un autre danger est qu’aux élections de 2026, les Québécois se réveillent confrontés au même problème. Ce qui, en amont, pourrait faire chuter encore plus les taux de participation.

Le multipartisme s’incrustant dans le décor, si le mode de scrutin n’est pas réformé, cette patate chaude risque en effet de revenir hanter les prochains gouvernements.

À date fixe, comme un vieux fantôme malicieux, elle viendra nous rappeler le prix à payer pour n’avoir rien fait.

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