Une pause salutaire pour Radio Radio

Félix Desjardins
Après presque six ans d’absence, la sympathique paire acadienne Radio Radio revient à la charge en français sur À la carte, album de « hip-hop festif » posant un regard sur la culture de l’instantanéité.
Selon Gabriel Louis Bernard Malenfant, moitié du duo qui œuvre depuis 13 ans, les gens sont conditionnés à pouvoir prendre des décisions comme on choisit un plat au restaurant.
« C’est un phénomène qui existe depuis l’internet, qui a été multiplié fois mille depuis la pandémie, parce que tout le monde passe de longues journées sur le web », exprime le rappeur de 41 ans.
Cette pandémie a d’ailleurs prolongé la pause que s’étaient imposée les deux membres de Radio Radio, qui voulaient « se retrouver comme amis et partenaires de travail et retrouver l’amour pour la musique », indique Jacques Doucet, alias Jacobus.
Avec maintenant six albums et plusieurs centaines de spectacles, Radio Radio a développé un fanbase nombreux et fidèle au Québec et dans les Maritimes, en plus de s’attirer les éloges de la critique avec son mélange de rap, d’électro et d’humour. Son album Belmundo Regal a figuré sur la courte liste du Prix de musique Polaris de 2010 et ses succès Jacuzzi, Dekshoo et Ej feel zoo lui ont permis d’être un des premiers groupes de hip-hop à bénéficier d’une grande visibilité médiatique dans la province.
Sur À la carte, les rappeurs ne dérogent pas de leur recette gagnante en présentant 10 chansons entraînantes où ils allient leur prosodie unique à des productions électroniques.
On note que leurs paroles y sont davantage mises en valeur que sur leur opus précédent, Light the Sky, album entièrement anglophone et destiné aux pistes de danse.
Et même s’il ne désire pas être considéré comme « des clowns », le duo ne peut se détacher de son ton désopilant, qui lui permet d’aborder des sujets plus sérieux.
« Ma grand-mère n’a jamais parlé en mal de personne, mais ce n’est pas parce que c’était une femme passive, explique Gabriel Malenfant. C’est juste qu’elle avait une distance sur tout, une façon d’aborder les choses avec respect et sagesse. C’est ce qu’on essaie de faire. »
Mettre l’accent ailleurs
Radio Radio a dévoilé un quatrième morceau de son nouvel album à la fin du mois d’octobre, Phoque avec son ballon, où les rappeurs avouent se sentir comme des bêtes de cirque en raison de leur accent, qui entremêle le français, l’anglais et le chiac.
« Quand un autre artiste a une plateforme, on lui demande : “Comment va ton projet ?” Nous, c’est : “Pouvez-vous dire ça en chiac ?” On est plus que seulement notre accent », défend Jacobus.
« C’est une tendance humaine de vouloir catégoriser les trucs. [Mais] si des extraterrestres débarquaient sur la planète, je pense qu’on serait plus intéressé de savoir c’est quoi leur philosophie de vie que comment ils ont choisi la couleur de leur spaceship », image Gabriel Malenfant.
Le nouvel album de Radio Radio, À la carte, est disponible depuis vendredi.