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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Une mauvaise blague qui en dit long sur la CAQ

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Photo portrait de Richard Martineau

Richard Martineau

2022-04-27T20:00:00Z
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C’est une mauvaise blague. Pas de quoi en faire un drame ni déchirer sa chemise.

Mais c’est le genre de mauvaise blague qui en dit long.

Dans son salon

Je parle bien sûr de la phrase que François Legault a lancée quand le président de l’Assemblée nationale a annoncé que le député libéral Pierre Arcand avait une question à poser.

«Il est pas mort, lui?»

Piqué par la vanne du premier ministre, M. Arcand (qui est un ami de François Legault, soulignons-le) s’est dit «fortement ébranlé».

Quoi, le député libéral a cru pendant deux secondes qu’il était bel et bien mort?

Il a douté de son état de santé?

On comprend que, pour le PLQ, ces temps-ci, toutes les occasions sont bonnes pour monter sur ses grands chevaux et rappeler aux électeurs que le parti de Jean Lesage et de Robert Bourassa existe toujours, mais, bon, allons-y mollo sur l’indignation, s’il vous plaît, car, parfois, trop, c’est comme pas assez... 

Reste que cette blague déplacée montre à quel point la CAQ en mène large et prend ses aises à l’Assemblée nationale.

Comme si c’était le salon personnel de monsieur Legault. 

Bientôt, si ça continue, notre premier ministre va tellement se sentir chez lui à l’Assemblée nationale qu’il va entrer dans le Salon bleu en robe de chambre et en pantoufles. 

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C’est ça, quand tu n’as pas d’opposition. 

Tu te crois tout permis. La Chambre où se déroule la joute démocratique devient ton carré de sable, et les électeurs, tes amis.  

Un «ami de la famille»

À force de trôner en tête des sondages quoi qu’il arrive, quoi qu’il advienne, M. Legault a peut-être fini par croire qu’il est «notre ami» plutôt que notre premier ministre.  

Une sorte de mononcle sympathique. 

Gabriel Nadeau-Dubois (que le premier ministre traite de «woke») aime comparer François Legault à Maurice Duplessis. 

Le côté «petit père du peuple».

J’opterais plutôt pour un autre personnage légendaire de notre mythologie populaire: le père Gédéon. 

Le mononcle rigolo et coloré qui l’échappe parfois. 

Mais on pardonne ses écarts et ses blagues grasses, parce qu’on l’aime bien. Et qu’il donne de beaux cadeaux à Noël. 

Sauf que... on est en 2022.

Le père Gédéon, par moments, paraît aussi anachronique que les vieilles tounes de feu Paolo Noël (T’as donc des beaux bip bop!).

Rappelez-vous la «blague» de monsieur Legault sur la pilosité de Manon Massé. 

Je ne suis pas un grand fan de QS et je déteste la rectitude politique, mais, même moi, j’ai ressenti un gros malaise quand je l’ai entendue. 

Coudonc, me suis-je dit, on est à l’Assemblée nationale ou à Soirée canadienne?

Roméo Pérusse, sors de ce corps!

Le piège de l'arrogance

En 2018, la CAQ a remporté 37,4% des voix. Contre 57, 98% pour les trois autres partis. 

Le premier ministre a tendance à l’oublier trop souvent. 

Surtout lorsqu’il laisse sous-entendre (sans grande subtilité) que les bons Québécois sont caquistes. 

Et vice-versa. 

«L’arrogance est le défaut des bons chefs», a dit l’écrivain Ken Follet.

Peut-être. 

Mais il faut aussi se souvenir de cette phrase de Lao Tseu: «Trop de succès engendre l’arrogance, et l’arrogance provoque la chute.»

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