Il tient la promesse faite à son père à sa mort il y a 10 ans: voici les sculptures cachées depuis plus de 50 ans d’un artiste québécois reconnu
Un ancien directeur de tournée de Garou et de Céline Dion présente des statues réalisées par son père dans les années 1950 et 1960


Louis-Philippe Messier
À Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Une exposition à Montréal dévoile des œuvres cachées durant plus de 50 ans par un sculpteur québécois réputé, dont les statues avaient déjà orné le site d’Expo 67, mais qui était devenu trop anxieux pour accepter de montrer ou de vendre son travail. Il avait fait promettre à son fils d’attendre au moins 10 ans après sa mort pour les exposer. Chose promise, chose due.
Un des fondateurs du Conseil de la sculpture du Québec, Mario Bartolini (1930-2015) exposait au Musée Rodin à Paris dans les années 1960.
Trois grandes statues en métal de son cru ornaient le site de l’Expo 67.
Bartolini a enseigné à l’École des Beaux-Arts, qui est devenue l’UQAM, jusqu’en 1986.
Cinq de ses œuvres se trouvent d’ailleurs au Musée national des beaux-arts du Québec.
Mais, pendant les années 1970, le maître-sculpteur s’est fait de plus en plus sauvage et hostile au monde des galeries et du commerce de l’art.
Tout en continuant de créer, il refusait d’exposer.
L’artiste cumulait ses statues, car il ne jetait rien, pas même ses croquis.

Inondé de statues
«J’ai grandi dans une maison où il y avait des statues partout dans chaque recoin, jusqu’à ne plus savoir quoi en faire, il y en avait aussi dehors dans le jardin, et c’était pareil dans le sous-sol chez mes grands-parents ou dans leur garage», raconte Dino Bartolini, l’aîné des quatre fils du sculpteur.

«Mon père avait des ennuis de santé mentale et il était devenu tellement réticent à l’idée de montrer son art qu’il m’a déjà demandé de tout brûler après sa mort», se souvient l’homme de 67 ans, qui organise l’exposition à la galerie Art Mûr, sur la rue Saint-Hubert.
«Heureusement, mon père a changé d’idée, mais la perspective d’une exposition l’effrayait tellement qu’il m’a fait jurer d’attendre au moins dix ans après son décès avant de procéder», poursuit M. Bartolini.
«Je te laisse imaginer ce que ça peut coûter de stocker des centaines de statues pendant dix ans, mais j’ai tenu la promesse», ajoute-t-il.
Combien ça vaut?
Les œuvres des années 1950 sont en terre cuite ou en bois.

Celles des années 1960 sont surtout en métal.

Grandes et effilées, certaines évoquent le style du sculpteur suisse Alberto Giacometti, célèbre pour ses silhouettes allongées.

Combien valent ces œuvres? La réponse ne va pas de soi. D’un côté, Bartolini est méconnu; de l’autre, il est déjà dans les musées, donc il est reconnu.
«Je déciderai du prix à la dernière minute et j’attendrai de parler aux visiteurs et aux connaisseurs sur place», répond M. Bartolini.
Impossible aussi de prévoir si les collectionneurs afflueront pour acheter...
C’est sûr qu’il y aura beaucoup de visiteurs toutefois parce que Dino Bartolini est, socialement parlant, le contraire de feu son père.
Dino connaît beaucoup de monde. Il a été le directeur de tournée des B.B. et de Mitsou au Québec, notamment, et de Céline Dion et de Garou à l’international.
L’exposition Rétro Barto occupera tout le troisième étage de la galerie Art Mûr jusqu’au 5 septembre. Attention: c’est fermé le dimanche et le lundi.