Une dérèglementation souhaitée par les multinationales américaines?

Rosannie Filato, Directrice Montréal, TUAC 500
Le gouvernement de la CAQ parle des deux côtés de la bouche. Pendant que les citoyens et des élus sont de plus en plus nombreux à se mobiliser pour protéger et encourager l’économie québécoise contre les assauts des États-Unis contre nos entreprises, voilà que le gouvernement Legault cherche visiblement à accommoder des multinationales américaines en acquiesçant à leurs demandes d’ouvrir leurs commerces comme bon leur semble.
Le projet de loi 85 du ministre Christopher Skeete propose d’élargir les périodes d’admission du public dans les établissements commerciaux, et par conséquent d’accorder une marge de manœuvre importante aux épiceries en leur permettant de prolonger leurs heures d’ouverture jusqu’à 24 heures par jour et d’attribuer des quarts de travail de nuit à un nombre illimité d’employés.
La prochaine étape est-elle de permettre aux commerçants non-alimentaires américains qui vendent de l’alimentation d’étendre leurs heures d’ouverture?
Satisfaction
Mais on peut se demander qui veut vraiment que les épiceries soient ouvertes 24 h par jour et 7 jours sur 7. Les résultats d’un sondage Léger que nous avons commandé sont clairs: 94 % des consommateurs québécois sont satisfaits des heures d’ouverture actuelles. Même qu’une majorité (57%) considère que l’ouverture des épiceries 24/7 serait une mauvaise mesure.
Pour 78 % des Québécois, l’encadrement actuel des heures d’ouverture des épiceries protège adéquatement l’équilibre travail-vie personnelle des personnes qui y travaillent, alors que 72 % croient que la dérèglementation du ministre Skeete se ferait au détriment des petites épiceries et des dépanneurs.
On apprenait récemment que les principaux acteurs du milieu de l’alimentation ne voulaient pas non plus de cette dérèglementation. Les représentants des dépanneurs, des commerces d’alimentation et les propriétaires de franchises d’alimentation ont tous affirmé au ministre pendant la commission parlementaire que les heures d’ouverture des commerces étaient suffisamment vastes pour accommoder tous les profils de clients, qu’ils travaillent de jour ou de soir.
Craintes
Aux TUAC 500, nous représentons plus de 39 000 travailleurs (dont 60 % de nos membres ont moins de 30 ans) qui sont répartis au sein de différentes bannières comme Métro, Super C, Adonis, IGA, Provigo et Maxi. Nous avons déjà manifesté nos craintes au ministre Skeete parce que son initiative se traduirait vraisemblablement par une sollicitation accrue des jeunes caissières et commis d’épicerie qui occupent ces emplois à temps partiel parallèlement à leurs études, pour ces emplois de soir et de nuit.
Rappelons que depuis 2008, la Loi sur les heures et les jours d’admission dans les établissements commerciaux encadre les heures d’ouverture des établissements d’alimentation. Cette loi repose sur un équilibre qui convient à la majorité des parties prenantes du secteur, y compris les employeurs, les travailleurs, ainsi que les consommateurs.
Cette soudaine volonté de dérèglementer les heures d’ouverture constitue un revirement spectaculaire des élus de la CAQ et un affront direct aux travailleurs de l’alimentation.
Monsieur le premier ministre Legault, monsieur le ministre Skeete, si ce n’est pas les commerces d’ici et les Québécois qui souhaitent la dérèglementation des heures d’ouverture en épicerie, qui fait pression sur vous pour que vous adoptiez cette mesure?

Rosannie Filato
Directrice Montréal
TUAC 500