La crise en Afghanistan ravive de douloureux souvenirs pour Kim Thúy
TVA Nouvelles
La crise en Afghanistan, qui est tombé aux mains des talibans après les retraits des troupes américaines, ravive de douloureux souvenirs pour l’auteure Kim Thúy qui a connu une situation similaire au Vietnam lorsqu’elle était enfant.
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«C’est une déstabilisation qu’on a de la difficulté à imaginer. Quand on vit dans un pays en guerre, on ne peut pas imaginer que du jour au lendemain tout l’appareil gouvernemental change. Il n’y a plus rien qui fonctionne comme avant», se rappelle-t-elle.
Kim Thúy, qui a quitté le Vietnam à l’âge de 10 ans avec sa famille, raconte la peur qui s’est installée dans le pays.
«On ne savait tellement pas quoi faire que je me souviens que quand on voyait les chars d’assaut arriver avec le nouveau drapeau du Parti communiste, mes parents nous ont demandé de nous cacher derrière un sofa», mentionne Mme Thúy.
Et pour ceux et celles qui décident de prendre la fuite, l’espoir est à son plus profond.
«Il faut accepter d’avance qu’on va mourir. Quand on accepte de s’enfuir, c’est qu’on a pu d’options. Qu’on meure sur place ou en mer, c’est la même option. C’est pour ça que vous osez vous enfuir», dit celle qui revisite son parcours dans son roman «Em».
Mais malgré les similarités, Kim Thúy note une différence assez importante entre les deux conflits.
«Je sais qu’on fait beaucoup de lien avec le Vietnam, mais au moins au Vietnam je vous dirais que les femmes n’étaient pas particulièrement ciblées, alors qu’en Afghanistan ce sera le cas. Au Vietnam, j’avais l’impression que c’était un changement très brusque au niveau politique/économique, mais pas au niveau religieux», explique-t-elle.
Pour le lieutenant-général à la retraite Roméo Dallaire, qui a vécu le génocide au Rwanda dans les années 1990, la situation est choquante.
«J’ai une certaine rage de voir qu’après les expériences [passées], les Américains n’ont pas appris de leçons. Ils le disent eux-mêmes. Après le Rwanda, quand on a vu un scénario semblable de ruée vers l’aéroport (...), ce scénario grotesque qui existe, on n’a pas réussi à anticiper comment réagir d’une façon beaucoup plus concrète», déplore M. Dallaire.
Selon l’ex-militaire, ceci s’explique par le manque de volonté de prendre des risques. En ce sens, M. Dallaire n’est pas tendre à l’endroit du président Joe Biden.
«Ils ont retiré les 16 000 civils contractants qui prenaient soin des avions pour supporter les Afghans. Mais du jour au lendemain, ils sont partis sans avertir les Afghans. Donc il n’y avait plus d’avions pour supporter leurs opérations. Ce sont des actions quasiment de traitrise», martèle-t-il.
Le lieutenant-général à la retraite ne mâche pas ses mots à l’endroit du Canada non plus.
«On n’est plus le Canada qu’on était. [Le Canada] désireux de prendre le leadership, désireux d’amener des idées novatrices, désireux de prendre des risques pour intervenir d’une façon proactive. Je trouve qu’on taponne. On analyse au point où il n’y a aucune option qui semble plausible. Plus tu analyses, plus tu vois des risques et des trous. Le Canada a perdu son nerf d’être un leader», critique Roméo Dallaire.