Une baisse d'impôt... à même le Fonds des générations!


Michel Girard
Rassurez-vous, chers contribuables ! Le bureau du premier ministre m’a confirmé que l’alléchante baisse d’impôt promise par François Legault durant la campagne électorale entrera en vigueur lors du prochain budget, celui de l’exercice 2023-24.
« On a toujours dit qu’on le ferait au prochain budget. On a pris des engagements, et on va les respecter », de me répondre sur le fil Twitter le porte-parole du premier ministre, Ewan Sauves, en réaction à ma chronique « Bye bye, baisse d’impôt ? » où je me demandais si M. Legault et son ministre des Finances Eric Girard avaient décidé de remettre à plus tard ladite promesse de baisse d’impôt ou de carrément l’annuler.
Pour que son message soit sans équivoque, M. Sauves a joint les comptes Twitter de MM. Legault et Girard dans la réponse qu’il a tweetée hier matin.
Je rappelle les grandes lignes de la baisse d’impôt promise : « La Coalition Avenir Québec s’engage à baisser les impôts de 7,4 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années. Nous y arriverons en réduisant les deux premiers paliers d’imposition de 1 % dès 2023 », précise-t-on dans le cadre financier électoral de la CAQ.
LES RÉDUCTIONS
Qui va le plus profiter de cette réduction d’impôt ? Les contribuables gagnant 90 000 $ et plus, selon le simulateur fiscal de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances de l’Université de Sherbrooke. À preuve, voici à titre d’exemple les réductions auxquelles les personnes seules auront droit en fonction des revenus bruts suivants :
- 20 000 $ : 10 $
- 30 000 $ : 110 $
- 40 000 $ : 210 $
- 50 000 $ : 320 $
- 60 000 $ : 420 $
- 70 000 $ : 520 $
- 80 000 $ : 620 $
- 90 000 $ et plus : 760 $
Cette alléchante baisse d’impôt va générer un manque à gagner pour le gouvernement du Québec de 417 millions $ lors de l’actuel exercice financier. Et par la suite, le manque à gagner annuel passera de 1,7 milliard $ (en 2023-2024) à 2,2 milliards $ en 2026-2027.
Avec l’entrée en vigueur imminente de la baisse d’impôt, cela signifie que le nouveau cadre financier déposé jeudi lors de la mise à jour du ministre Eric Girard ne tient déjà plus la route au chapitre des recettes projetées en impôt des particuliers.
- Écoutez la chronique économique de Michel Girard, chroniqueur économique au Journal de Montréal et au Journal de Québec au micro de Philippe-Vincent Foisy sur QUB radio :
LE FINANCEMENT
Maintenant, comment Eric Girard s’y prendra-t-il pour « financer » cet autre coûteux cadeau électoral de François Legault ? Lors de l’entrevue qu’il a accordée hier matin à Paul Arcand sur les ondes du 98,5 FM, M. Girard a affirmé que ladite baisse d’impôt de 7,4 milliards $ allait se financer par l’entremise d’une réduction des versements annuels au Fonds des générations.
En termes concrets, cela signifie que le financement de cette promesse électorale se fera sur le dos de la dette gouvernementale. Car en réduisant les versements au Fonds des générations, on augmentera d’autant la dette gouvernementale. Et ce sont nos jeunes et les générations futures qui en paieront la note.
Pour paraphraser le célèbre chimiste-économiste Antoine Laurent de Lavoisier, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme !
Mais j’ajouterais : pas nécessairement pour le mieux !
Écoutez la chronique économique de Michel Girard, chroniqueur économique au Journal de Montréal et au Journal de Québec au micro de Philippe-Vincent Foisy sur QUB radio :
TORDU
Il faut savoir que les recettes destinées au Fonds des générations proviennent de diverses sources.
Par exemple, les 3,62 milliards $ recueillis en 2021-22 provenaient des redevances hydrauliques versées par Hydro-Québec (765 M$) et les producteurs privés d’électricité (102 M$), de l’indexation du prix de l’électricité patrimoniale (488 M$), des autres contributions d’Hydro-Québec (215 M$), de la taxe spécifique sur les boissons alcooliques (500 M$), des biens non réclamés (31 M$) et des revenus de placement (484 M$).
Je trouve cela tordu de la part de François Legault et de son argentier Eric Girard de « détourner » à des fins électoralistes de la CAQ les recettes qui sont vouées au Fonds des générations, dont le mandat est de renflouer la dette de l’État.