Une autre offensive des entreprises de Chaudière-Appalaches pour garder les travailleurs étrangers


Louis Deschênes
Des manufacturiers reprennent le flambeau et supplient une fois de plus le gouvernement d’assouplir les mesures sur les travailleurs étrangers temporaires (TET).
Ils étaient une dizaine de dirigeants de Québec et de Chaudière-Appalaches à se serrer les coudes mardi matin, rappelant aux décideurs que les TET étaient essentiels à la survie de plusieurs entreprises.
D’une seule voix, ils soulignent que les impacts des nouvelles règles instaurées en septembre se font sentir.
Le président-directeur général de Teknion – Roy & Breton parle en connaissance de cause. Il gère sept usines de Mont-Laurier à Montmagny et plus de 1220 employés, dont 145 travailleurs étrangers temporaires.
«Nous devons déjà laisser aller de nos travailleurs qualifiés», confirme Frédéric Marier, qui accueillait ses collègues dans ses immenses installations à Lévis.

Ils exigent des solutions
Comparativement à d’autres régions où le taux de chômage est à la hausse, M. Marier est confronté à une tout autre réalité dans Chaudière-Appalaches, où les entreprises s’arrachent les travailleurs avec un taux de 3% de chômeurs.
Cette région enregistre actuellement 2000 postes vacants alors que des entreprises sont à la recherche de 50 à 100 employés.
Les entrepreneurs ont multiplié les sorties publiques depuis janvier pour se faire entendre, mais cette fois ils demandent des actions concrètes avant le début de l’été.
«On a un compte à rebours qui commence et pour nous c’est important de trouver des solutions rapides [...] d’ici le 24 juin», affirme Julie White, présidente-directrice générale de Manufacturiers et Exportateurs du Québec.
Les entreprises réclament principalement une clause de droits acquis pour les TET déjà présents au Québec.
«Il y en a pas 1000 solutions, la clause ''grand-père" pour nous elle est importante», répond Mme White, qui rappelle qu’on ne remplace pas des travailleurs par des machines, même si les manufacturiers investissent dans la robotisation.
Les intervenants souhaitent aussi régler le problème une fois pour toutes en autorisant jusqu’à 20% de TET dans les régions à faible taux de chômage.
Dans la région métropolitaine, le gouvernement canadien se donne déjà le droit de refuser la requête d’une entreprise désirant un TET si le taux de chômage est de 6% ou plus.
Déménager la production
Le danger est aussi de voir des entreprises déménager leur production.
Le gestionnaire de Plastiques Gagnon, à Saint-Jean-Port-Joli et à Lévis, cite en exemple 2021 et 2022, des années où le recrutement à l’étranger a été plus difficile.
«On a eu 5M$ de production, année après année, qui a été transférée au Mexique [...] On souhaite ne pas revivre ce moment-là», confie Dany Tremblay, qui peut miser sur 40 TET sur les 180 employés.
Si le gouvernement canadien ne revient pas sur ses pas, Paber Aluminium, située à Cap-Saint-Ignace, risque de perdre 17 employés spécialisés dans les deux prochaines années.

Cette entreprise compte une cinquantaine de personnes issues de la diversité sur un total de 150 travailleurs, se plaît à dire la dirigeante Geneviève Paris.
«Ça serait une onde de choc de les perdre parce que c’est le premier secteur de fabrication qui débute la chaîne de production.»
Autre réalité, Paber Aluminium lancera bientôt un quart de travail de fin de semaine qui ne sera effectué que par des travailleurs étrangers.
«Aucun travailleur québécois ne voulait y prendre part, malgré les primes substantielles qu’on offrait», admet Mme Paris.

Les échos de 20 entreprises sondées
- Environ de 50 à 100 postes seront à pourvoir pour chaque entreprise sur une période de trois à cinq ans.
- Les nouvelles mesures viendront éliminer en moyenne 10 travailleurs étrangers par entreprise.
- Cette réduction pourrait entraîner des pertes de chiffre d’affaires de 10 à 30%.
- Les entreprises n’écartent pas la possibilité d’un transfert d’activités vers les États-Unis ou de l’arrêt complet de leurs opérations.
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