Une 4e victime ciblée par erreur: un conflit «pire que la guerre des motards»

Jérémy Bernier
Le conflit pour le contrôle des stupéfiants est devenu «pire que la guerre des motards», d’après un ex-policier qui a été personnellement impliqué dans celle-ci, alors qu’une quatrième personne en moins d’un an a été attaquée par erreur.
«À mes yeux, c’est rendu pire que la guerre des motards. Ça n’a plus de sens. Le ratio d’erreur sur la personne est beaucoup plus élevé», souligne l’ex-enquêteur Roger Ferland.
Vendredi après-midi, Étienne Brière, un homme de 62 ans qui n’avait rien à se reprocher, a été criblé de balles dans sa résidence du boulevard des Chutes, à Beauport. Succombant à ses blessures, il est devenu malgré lui la première victime de meurtre à Québec cette année. Il était connu des services policiers, mais pas en matière de violence urbaine, a précisé la police.

«C’est une grande perte pour la famille de mon mari, qui a perdu son père bien-aimé. Que son âme repose en paix parmi les étoiles», a écrit sa belle-fille sur les réseaux sociaux.
Nathan Tshimanga, qui venait d’avoir 18 ans, et Mathieu Quinio, 31 ans, ont été accusés de meurtre prémédité. Un quadragénaire qui a aussi été arrêté dans cette affaire a quant à lui été libéré sous promesse de comparaître.
Plus de respect
Or, M. Brière n’était pas la personne visée par cette attaque. D’après nos sources, c’est plutôt un membre du gang Blood Family Mafia (BFM) de Dave «Pic» Turmel qui était ciblé, bien que la police de Québec ne confirme pas cette information.

Il s’agirait donc de la 4e erreur sur la personne à survenir en autant de mois dans ce conflit. Deux de ces victimes n’ont pas survécu (voir encadré plus bas).
«Les nouvelles “équipes” qui essaient de prendre le contrôle du marché ont pas mal moins de respect face à la vie humaine que leurs prédécesseurs. Il n’y a plus de validation qui se fait!», peste M. Ferland.
«Les jeunes criminels inexpérimentés veulent se faire un nom rapidement et sont prêts à faire n’importe quoi. Peu importe si ça crée des victimes collatérales» poursuit l’ex-policier.

Rappelons qu’entre 150 et 170 personnes avaient été tuées durant la guerre des motards, de 1994 à 2002. De ce nombre, seule une dizaine de personnes étaient innocentes.
Temps d’agir
Dans ces circonstances, il faut travailler en amont pour freiner le recrutement des jeunes dans ces bandes criminelles, insiste l’ancien enquêteur du SPVQ.
«C’est devenu un vrai fléau dans les écoles. Il est temps qu’on intervienne plus promptement auprès des jeunes criminels, avant qu’ils n’aient les deux pieds dedans», explique-t-il.

Selon lui, on devrait déployer plus d’unités sur le terrain pour intervenir avant que les individus ne deviennent de «gros poissons», tout en étant moins tolérants sur les premiers délits.
«Il faut que ce soit réellement dissuasif. Et il faut trouver un moyen de contrer l’entrée des cellulaires dans les prisons, sinon on n’arrivera jamais à bout», ajoute-t-il.
Quatre erreurs sur la personne
15 avril 2024: un homme de 64 ans a été atteint par un projectile «à deux centimètres de son cœur» lorsqu’un agresseur a déchargé son arme à feu sur lui, après avoir sonné à la porte de son domicile, situé sur la 6e Avenue, à La Baie.

16 décembre 2024: Jennifer Morin, 45 ans, a été découverte sans vie dans son logement du boulevard Louis-XIV, à Charlesbourg. Son fils a été arrêté quelques semaines plus tard dans une affaire de trafic d’armes et de stupéfiants.

11 janvier 2025: un homme âgé de la vingtaine et originaire de l’Ontario a été criblé de balles dans le stationnement d’un hôtel Comfort Inn, à Lévis, où de jeunes hockeyeurs séjournaient pour un tournoi. Grièvement blessé, son état s’est heureusement stabilisé.

14 février 2025: Étienne Brière, un retraité de 62 ans qui n’a aucun lien avec le crime organisé, a été atteint en plein jour par des projectiles d’arme à feu dans la maison de chambres où il demeurait. C’est un membre du BFM qui n’y demeure plus qui était visé.

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