Un virus transmis par les moustiques qui foudroie les chevaux a affecté pour la première fois des humains en 2024 au Québec
Les premiers cas humains au Québec de l’encéphalite équine de l’est ont été rapportés à Laval et en Montérégie

Mathieu-Robert Sauvé
En plus d’avoir tué au moins 14 chevaux au Québec l’an dernier, un inquiétant virus transmis par les moustiques a infecté des humains à Laval et en Montérégie, ce qui constitue une première dans l’histoire de la province.
«Vous avez un cheval en pleine santé le matin, qui est mourant en après-midi et mort le soir. C’est fulgurant!» lance avec émotion Jennifer Proulx, qui est locataire d'une écurie à Sainte-Anne-des-Plaines. Sept chevaux y sont décédés l’an dernier des suites de cette infection mortelle.
Or, «moins de cinq cas humains» de l’encéphalite équine de l'Est (EEE) ont été déclarés en 2024, a indiqué le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Il s’agit des premiers cas observés dans la province de cette maladie, a confirmé le ministère hier, ajoutant qu’on ne déplore aucun décès.
Le virus en cause s’attaque au système nerveux et peut faire enfler le cerveau au point de conduire à une défaillance des fonctions vitales.
Les personnes gravement atteintes développent des convulsions, un coma et une paralysie mortelle. Chez le cheval, les symptômes sont les mêmes.


Un mort en Ontario
L’Ontario rapportait le 12 septembre dernier le premier décès humain attribuable à cette infection de l’histoire canadienne, à Ottawa.
L’EEE est une maladie transmissible par une espèce de moustique de plus en plus présente au Québec, Culiseta melanura, qui se nourrit principalement du sang des oiseaux et qui se reproduit dans des zones marécageuses.
Les moustiques transmettent la maladie en piquant les chevaux, mais il est plus rare qu’ils infectent les humains, plus résistants à ce virus. Toutefois, les destriers ne peuvent pas contaminer les gens.
À Terrebonne, le virus a tué trois chevaux de Nathalie Séguin, de l’Écurie des deux Tilleuls.
Elle s’inquiète de la situation, d’autant plus qu’elle tient des camps de jour avec des dizaines d’enfants durant l’été.
Elle aimerait que la ville épande des larvicides pour diminuer les populations de moustiques.
Sous-estimé?
Jointe par Le Journal, la députée de Terrebonne au gouvernement du Québec, Catherine Gentilcore, a fait savoir que le bilan de l'an passé est «extrêmement préoccupant». Elle dit être à la recherche de solutions afin d'aider les éleveurs à protéger les chevaux.
Le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) a indiqué suivre la situation de près et signale 14 décès de chevaux au Québec l’an dernier, ce qui constitue une hausse considérable sur l’année précédente (deux décès).
Mais la situation pourrait être bien pire que ce que ces chiffres laissent entendre, alors que ce n’est pas une maladie à déclaration obligatoire chez les animaux.
«Nous incitons les propriétaires et vétérinaires à faire analyser les échantillons, mais nous ne l’obligeons pas», a indiqué la vétérinaire responsable de ce dossier au MAPAQ, la Dre Isabelle Picard, qui reconnaît que les cas pourraient être sous-estimés.
Or, la facture est refilée aux propriétaires, qui n’ont souvent aucun intérêt à payer pour diagnostiquer un animal mourant ou déjà mort.

Faut-il tuer les maringouins dans l’œuf?
La fin de l’épandage de liquide antimoustique dans les marécages autour des écuries touchées par l’encéphalite équine de l’est pourrait avoir permis la dispersion du virus dans la région de la rivière Mascouche.
Jennifer Proulx multiplie actuellement les démarches, avec d’autres éleveurs des Laurentides et de Lanaudière, pour forcer la main des municipalités afin d’épandre des larvicides dans les marécages et points d’eau du secteur susceptibles de provoquer une nouvelle vague de moustiques responsables de la transmission du virus de l’encéphalite équine de l’est.
«La ville de Terrebonne a cessé l’épandage il y a trois ans et ça paraît», dénonce-t-elle en entrevue au Journal.
Une infestation de moustique, à l’été 2024, aurait causé le décès d’au moins une vingtaine de décès de chevaux de la vallée de la rivière Mascouche, a-t-elle calculé.
Elle souhaite qu’un épandage de larvicides soit réalisé dès maintenant pour éviter le cauchemar de l’été dernier.
Le virus de l’encéphalite équine de l’Est (EEE) est porté par une espèce de moustique qui se reproduit dans des eaux stagnantes et la période d’épandage d’un larvicide biologique, le BT (Bacillus thuringiensis), est en cours depuis un mois dans une trentaine de municipalités du Québec.
Impacts sur la microfaune?
Mais des voix s’élèvent pour cesser cette opération qui aurait un impact négatif sur l’équilibre biologique dans la microfaune en s’attaquant notamment à des insectes aquatiques à la base de la chaîne alimentaire.
Un argument que rejette le biologiste Richard Vadeboncoeur, vice-président de GDG Environnement, de Trois-Rivières, spécialisé dans le contrôle des insectes piqueurs.
« Aucune étude sérieuse ne confirme l’effet néfaste du BT dans l’écosystème. C’est un moyen efficace et sans danger de réduire le nombre de moustiques porteurs de pathogènes », affirme-t-il.
Qu’est-ce que l’encéphalite équine de l’est chez l’humain?
L'encéphalite équine de l'Est (EEE) est une maladie virale grave chez l'humain. Aucun traitement connu ne permet de la vaincre quand elle s’est déclarée.
Ses principaux symptômes apparaissent 3 à 10 jours après l'infection. Fièvre élevée et frissons; maux de tête soudains; nausées, vomissements et diarrhée; photophobie (sensibilité à la lumière); rigidité de la nuque, désorientation et somnolence.
Les complications neurologiques possibles sont les convulsions, les troubles de la coordination, le coma et la paralysie dans certains cas.
Les séquelles possibles sont la perte de mémoire, les difficultés motrices, la paralysie partielle, l’altération du langage, la fatigue chronique. Chez les cas graves, le taux de décès est de 25 à 75%.
Source: Ministère de la Santé et des Services sociaux
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