Un tueur à gages voulait l’immunité
Il a approché les policiers en disant pouvoir infiltrer des criminels et ainsi élucider plusieurs meurtres


Michael Nguyen
Le tueur à gages qui a assassiné deux frères chez un couple de la Montérégie se disait capable d’infiltrer des criminels et d’élucider plusieurs meurtres et attentats, a-t-il affirmé à la Sûreté du Québec (SQ) en demandant l’immunité pour ses propres crimes.
« Je suis une banque d’informations, je peux te dire qui a organisé ça, qui était le chauffeur, le tueur. Je peux les infiltrer et les enregistrer », a affirmé le délateur dans un texto révélé lundi au procès de ses complices allégués Marie-Josée Viau et Guy Dion.
Viau et Dion, 46 et 49 ans, sont accusés d’avoir participé aux meurtres des frères Vincenzo et Giuseppe Falduto, survenus dans la résidence du couple à Saint-Jude, en Montérégie, en juin 2016.
Selon la théorie de la Couronne, les deux accusés auraient aidé le tueur à gages et un autre homme en les laissant utiliser leur garage pour tuer les deux frères.

Ils se seraient ensuite débarrassés des corps en les incinérant dans leur cour arrière.
Or, si la police a nagé en plein mystère sur la disparition des deux frères, c’est le tueur lui-même qui a contacté les policiers trois ans plus tard, en se disant prêt à collaborer avec les policiers pour élucider des meurtres et des attentats.
Plusieurs noms
Il a ainsi nommé plusieurs noms, dont « Spaganolo, Sollecito, Giordano, Del Balso », ou encore « celui qui a mis un contrat sur Ziad Ziade » et Richard Goodridge. Il n’a toutefois pas expliqué au jury qui étaient ces personnes.
En échange, il réclamait l’immunité pour les trois meurtres qu’il a commis et une garantie que la police enquête sur des gens qui l’auraient agressé sexuellement ainsi que sur une ex-copine, intervenante en maison de transition, qui lui aurait transmis une maladie vénérienne.
Bien qu’il était considéré comme « ingérable », les policiers ont quand même réussi à lui faire reprendre contact avec les accusés.
Alors qu’il était muni d’un système d’enregistrement caché, il aurait réussi à obtenir plusieurs déclarations incriminantes qui ont ultimement mené à l’arrestation de Viau et Dion.
« On dit que c’était une job de professionnel, mais ça a été fait par un débutant comme moi », a-t-il affirmé, ajoutant toutefois au passage que plusieurs personnes lui devaient des milliers de dollars pour des contrats.
Et même lorsqu’il était agent civil d’infiltration pour le compte de la police, il se serait fait appeler pour des contrats, a assuré le témoin, que l’on ne peut identifier pour sa sécurité.
Protection des témoins
Or, si le délateur estime avoir respecté sa partie de l’entente et qu’il bénéficie toujours d’un programme de protection des témoins, il en a maintenant contre la SQ, qui l’a, selon lui, manipulé en enquêtant peu ou mal sur ceux qui lui auraient fait du mal.
« Je ne suis pas un tueur, j’ai fait des erreurs et j’ai été voir la police, a-t-il dit. Je suis venu pour mes agresseurs, pas pour des dossiers de meurtre. Je me suis fait avoir par ceux que j’ai aidés. »
Il a également reproché à ses contrôleurs de ne pas avoir pris en note tous les crimes qu’il a commis lors du processus pour devenir agent civil d’infiltration, se contentant plutôt de noter les plus graves.
Mais malgré ses critiques très virulentes, il a continué sa collaboration avec les forces de l’ordre, par crainte que sa situation n’empire s’il arrêtait tout.
« Si je ne reste pas, ils vont faire de quoi pour me planter », a-t-il expliqué.
- Son contre-interrogatoire se poursuit aujourd’hui au Centre judiciaire Gouin, à Montréal, devant le juge de la Cour supérieure Éric Downs.