Un registre servant au partage d’informations entre associations de massothérapeutes est à l’étude pour éviter que des agresseurs se faufilent


Elisa Cloutier
Des associations de massothérapeutes au Québec travaillent à l’élaboration d’un registre unique, qui permettrait l’échange d’informations entre elles, surtout concernant des membres expulsés après avoir commis une faute grave.
Ce registre, à l’étude dans certaines associations au Québec, serait bénéfique pour la protection du public, soutient Étienne Durand, directeur général du Réseau des massothérapeutes professionnels du Québec (RMQ).
«Actuellement, il y a une barrière légale, qui empêche les associations professionnelles de partager les avis de radiation [car il ne s’agit pas d’un ordre professionnel] et effectivement, ça constitue un problème», affirme M. Durand.
Selon le président-directeur général de la Fédération québécoise des massothérapeutes agrées (FMQ), Maroine Bendaoud, un tel registre permettrait aux administrateurs d’éviter qu’un massothérapeute expulsé se «faufile» d’une association à une autre.

Il n’a pas été possible de savoir quand cet éventuel registre serait mis sur pied.
Les assureurs et le Collège des médecins sévissent
D’autres instances, comme les assureurs et le Collège des médecins, peuvent sévir contre des massothérapeutes fautifs.
Les assureurs, entre autres, peuvent radier «le fournisseur de soins de santé [qui aurait commis une faute grave] de sa liste, ce qui signifie que les services fournis ne seront plus éligibles au remboursement des régimes d’assurances», précise Dominique Biron-Bordeleau, directrice des affaires publiques à l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes (ACCAP).
Au cours des cinq dernières années, le Collège des médecins a aussi sanctionné des massothérapeutes, entre autres pour exercice illégal de la médecine, en imposant des amendes variant entre 7000$ et 20 000$. Celles-ci peuvent aller jusqu’à 62 500$.
Dans la plupart des cas, il s’agit d’un massothérapeute qui a par exemple proposé un traitement ou encore, diagnostiqué une maladie, ce qui leur est interdit.
Pas d’ordre professionnel en vue
Même si l’Office des professions a refusé la création d’un ordre des massothérapeutes au Québec à deux reprises dans les dernières années, la Fédération québécoise des massothérapeutes agréés (FMQ) travaille sur une nouvelle demande en ce sens.
«On veut prouver encore plus fortement la dangerosité, le risque de préjudice qui peut se produire», affirme le PDG de la fédération, Maroine Bendaoud.
Selon lui, la création d’un ordre professionnel aurait plusieurs bénéfices pour les massothérapeutes, dont de meilleures conditions de travail, un meilleur accès aux hôpitaux, en plus d’une formation plus «uniformisée».
Actuellement, près d’une centaine d’écoles offrent la formation de massothérapie, dont certaines à distance. Celles-ci ne sont pas régies par le ministère de l’Éducation.
Pour sa part, l’Office des professions indique qu’il n’existe pas de «données factuelles fiables [...] montrant que la situation actuelle expose réellement le public à des risques de préjudice sérieux et relativement fréquents» en ce qui a trait à la massothérapie. «[...] les rares cas de préjudices graves de nature physique recensés étaient liés à des massothérapeutes qui ont effectué des manipulations qu'ils n'étaient pas en droit d'exercer», a indiqué le porte-parole de l'Office, Jacques Nadeau.
Des ordres professionnels de massothérapeutes ont entre autres été créés au Nouveau-Brunswick, à l’île du Prince-Édouard et en Ontario. Aucun représentant de ces collèges n’a toutefois accepté nos demandes d’entrevues.
Massothérapeutes harcelés
S’il y avait un ordre professionnel pour encadrer les massothérapeutes, ceux et celles qui seraient également victimes de comportements déplacés et même d’agressions sexuelles de la part de clients seraient mieux protégés, estime la Fédération québécoise des massothérapeutes agrées (FMQ).
Une étude de la Canadian Massage Therapy Association (CMTA) publiée en 2022, révèle en effet que plus de 80% des massothérapeutes affirment avoir été victimes de harcèlement sexuel de la part d’un client, que ce soit notamment par une demande de faveur sexuelle ou un attouchement non consentant.
Et plus de 22% d’entre eux affirment avoir été victimes d’agression sexuelle de la part d’un client pendant un traitement.