Un poids lourd de la boxe québécoise est décédé
Le boxeur Robert Cléroux a perdu son dernier combat contre la maladie ce matin


François-David Rouleau
L’un des plus grands boxeurs québécois de l’histoire a poussé son dernier souffle ce matin, après un dernier combat contre la maladie. Robert Cléroux est décédé d’une pneumonie et des suites de graves problèmes médicaux qui l’assaillaient depuis quelques semaines, a appris Le Journal.
«Il a été dur. C’est un surhomme. Mais à la fin de son combat, il était tanné. Il a demandé l’arrêt des soins», a expliqué son fils, Robert Cléroux, en entretien téléphonique quelques heures après le décès dans un établissement de soins de longue durée de Laval, ce vendredi matin.

«Il aura duré un mois, a-t-il ajouté avec aplomb malgré le chagrin. Mais les problèmes médicaux étaient généralisés.»
M. Cléroux était âgé de 87 ans.
Celui qui a fait carrière chez les poids lourds jusqu’à l’âge de 31 ans a participé à 54 combats durant sa carrière sur les rings (fiche de 47-6-1, 37 K.-O.), laquelle s’est échelonnée de 1957 à 1969.
Celui qui était surnommé le «Bœuf de Chomedey», où un boulevard porte d’ailleurs son nom, a ensuite été propriétaire de bars dans la grande région métropolitaine de Montréal. À sa retraite, M. Cléroux a mené une vie paisible à Laval.

«J’ai perdu un père, pas un champion boxeur, a insisté son fils âgé de 61 ans. Il a été bon avec nous. Il nous a protégés et aimés. J’ai bénéficié d’un maudit bon père.»
Son départ laisse aussi dans le deuil sa sœur, Nathalie, et ses petits-enfants Marc-André, Alexandre, Marie-Michèle, Laurianne, Mélyssa et Mélyna, ainsi que ses arrière-petits-enfants Luka, Théodore, Emma et Rosalie.
De grands souvenirs
En plus des innombrables souvenirs personnels avec son paternel, Robert Cléroux conserve l’image d’un homme généreux, aidant et attentif aux besoins des autres.
«C’était un homme très humain, qui a toujours priorisé les plus faibles, a-t-il raconté en nommant plusieurs exemples de sa générosité. Il prenait soin de la dignité des plus faibles et il se laissait attendrir par ces gens.»
Entre les câbles par contre, il ne démontrait aucune pitié.

«J’ai toujours dit que la boxe, ce n’est pas un sport, c’est une tuerie, relatait-il en entrevue avec le collègue Mathieu Boulay, du Journal. Il faut vraiment que tu aimes te battre pour la pratiquer.
«Tu dois avoir la mentalité: kill, kill, kill. Plus tu maganes ton adversaire, plus tu as de chances de l’emporter rapidement et plus tu vas avoir des contrats. Dans le ring, j’étais un animal.»
C’est en appliquant cette mentalité qu’il a réussi à remporter 47 combats, dont 37 par knock-out. Il est monté sur les rings du Forum, du Madison Square Garden, du Colisée de Houston et sur ceux d’auditoriums du Québec.
Parmi ses coriaces adversaires, il s’est battu à trois reprises contre Georges Chuvalo pour le titre canadien des poids lourds, le défaisant deux fois (1960 et 1961).
Revers difficiles
À travers ses succès, Cléroux avait encaissé de durs revers. Il a accroché ses gants après une défaite crève-cœur contre Billy Joiner en 1969.

«Ça n’a pas été une décision difficile. J’ai tiré un trait et c’était terminé, avait-il raconté dans cette entrevue de 2021. Dans ma vie, j’ai toujours été capable de tourner la page rapidement. Je n’ai d’ailleurs jamais compris les boxeurs qui veulent sortir de leur retraite.»
Selon son fils, cette défaite contre Joiner en 1969 et une autre contre Mike DeJohn, alors encaissée à Miami en 1962, sont les deux grandes déceptions de sa carrière. «Il avait senti s’être fait voler. C’était arrangé. Il était convaincu que tout était organisé», s’est-il remémoré à propos des décisions controversées et partagées de ces combats de 10 rounds de l’époque.
Appartenant à une génération de boxeurs trop souvent oubliés, Robert Cléroux est l’un des bâtisseurs de son sport au Québec.
– Avec la collaboration de Mathieu Boulay