«On m’a sortie de la tombe»: un nouveau traitement change tout pour une mère atteinte d'un cancer
Elle a pu reprendre une vie quasi normale malgré son cancer très douloureux


Hugo Duchaine
Une mère de famille de la Montérégie, qui était clouée au lit par la douleur il y a seulement quelques mois, combat maintenant son rare cancer en travaillant et jouant avec ses enfants grâce à un nouveau traitement.
«Ça vaut de l’or. On m’a donné la chance de vivre la rentrée scolaire de ma fille, de fêter les quatre ans de mon gars [...] On m’a sortie de la tombe», lance en retenant ses sanglots, Karen Beaudin.
Âgée de seulement 40 ans et mère de cinq enfants, elle a reçu un diagnostic de mésothéliome au printemps dernier. Il s’agit d’un rare cancer de la membrane entourant le poumon, causé par l’amiante.
Ce n’est pas non plus un cancer sournois qui grossit sans symptôme pendant des années, mais plutôt un cancer «fulgurant». D’une masse de huit centimètres détectée à la fin mars, la tumeur faisait environ 20 centimètres à la fin mai, raconte Mme Beaudin.

«J’avais mal 23 heures sur 24, se rappelle-t-elle. Je n’arrivais plus à marcher, je ne pouvais plus être debout ou assise.» Elle a passé plusieurs semaines allongée sur une chaise à prendre des antidouleurs... sans aucun espoir de guérison.
«Je savais que j’avais un cancer, mais on ne savait pas encore lequel», explique la femme d’Henryville, alors soignée à l’Hôpital du Haut-Richelieu, où elle travaille également pour répondre aux appels.
Incertitude et douleurs
L’incertitude entourant sa maladie et la rapidité avec laquelle ses douleurs empiraient ont complètement chamboulé sa vie de famille.
Son conjoint Alexandre Derrien dit être «tombé sur le neutre».
«Je ne pouvais pas croire que c’était un cancer, elle était trop jeune», soupire-t-il. Le couple a heureusement pu compter sur l’aide de leurs parents et des filles adultes de Mme Beaudin.
Refusant son sort, la mère de famille a insisté pour que son dossier soit transféré au CHUM, où une biopsie a confirmé le diagnostic de mésothéliome.

D’emblée, on lui a proposé un tout nouveau traitement par double immunothérapie.
Contrairement à la chimiothérapie classique, qui cible la tumeur, l’immunothérapie active le système immunitaire pour attaquer les cellules cancéreuses.
Elle «pète le feu»
«J’étais sûre que c’était une joke cette affaire-là», dit-elle, ajoutant qu’elle a néanmoins accepté, n’ayant rien à perdre.
Dès le tout premier traitement, tout a changé.
«Je pensais que j’étais folle. Je sentais que ça marchait, que ma douleur changeait de place», décrit-elle.
Après trois mois de traitement aux trois semaines, Mme Beaudin dit qu’elle «pète le feu».

La masse rétrécit, la douleur a disparu, mais surtout elle a repris une vie normale. Elle peut travailler et éviter les problèmes financiers qui suivent trop souvent les gens luttant contre un cancer. En plus de continuer de voir grandir ses deux plus jeunes enfants, âgés de quatre et cinq ans.
Même s’il est trop tôt pour parler de rémission, Mme Beaudin estime qu’elle a peut-être déjà gagné deux ans de vie, alors qu’elle serait déjà morte sans les traitements.
Un cancer qui n’est plus une «peine de mort»
Un diagnostic de mésothéliome, un cancer causé par l’amiante, était comme «une peine de mort» avant l’arrivée de traitements d’immunothérapie l’an dernier, selon une chercheure du CHUM.

«D’avoir de l’espoir et un traitement efficace comme ça, c’est vraiment très encourageant», se réjouit l’hémato-oncologue Marie Florescu, au Centre universitaire de l’Université de Montréal (CHUM).
L’an dernier, un médicament à injection intraveineuse a été approuvé par Santé Canada et est désormais remboursé par la Régie de l’assurance maladie du Québec, explique-t-elle.
Les études cliniques ont montré des taux de survie de 41 % auprès de plus de 600 patients, poursuit-elle, ajoutant que c’est avant tout une percée pour les patients.
Car avant ce traitement de double immunothérapie, qui stimule le système immunitaire, les malades n’avaient pratiquement aucune option.
La Dre Florescu souligne que certains pouvaient subir de la chimiothérapie, mais les succès étaient rares et rapidement, les médecins n’avaient que des soins palliatifs à offrir.
Survie de 7 %
Le taux de survie global après cinq ans du mésothéliome est actuellement de 7 % au Canada. Et c’est sans compter les douleurs, dit-elle.
«Un mésothéliome qui passe au travers des nerfs, des os, des muscles, ça occasionne beaucoup de souffrances par rapport à d’autres cancers», explique-t-elle.
Elle se rappelle qu’à la première visite de Karen Beaudin, qui reçoit le nouveau traitement depuis mai, elle avait trop mal pour rester assise et avait dû se coucher sur la table d’examen.
«À sa deuxième visite, elle dansait la samba. C’était vraiment spectaculaire», lance la médecin.
Le diagnostic a été plus long aussi pour Mme Beaudin, puisqu’elle n’avait pas d’exposition professionnelle à l’amiante.
La Dre Florescu se dit encouragée par les «réponses spectaculaires» des patients qu’elle suit depuis l’an dernier. Elle ajoute que contrairement à la chimiothérapie, dont les effets s’arrêtent lorsque les traitements ont cessé, l’immunothérapie réveille le système immunitaire à plus long terme.