Un nouveau record de Québécois qui attendent pour voir un médecin spécialiste
Le nombre de patients est passé de 500 000 à plus de 900 000 en seulement cinq ans
Hugo Duchaine
Il n’y a jamais eu autant de Québécois en attente pour voir un médecin spécialiste, et la majorité des patients qui poireautent ont dépassé les délais fixés par Québec.
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«Le problème est que la demande augmente plus vite que toutes les solutions qui sont mises en place. [...] C’est comme d’essayer de vider une chaloupe qui se remplit au fur et à mesure», illustre le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, Vincent Oliva.
En date de mai dernier, près de 910 000 Québécois, un sommet, attendent pour une consultation auprès d’un médecin spécialiste, selon les données du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).
Depuis cinq ans, l’attente gonfle sans cesse. Alors qu’il y avait 500 000 personnes sur la liste en janvier 2020, elle frôle aujourd’hui le million.
• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission d’Isabelle Maréchal, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
ORL et dermatologie
Les pires spécialités pour l’attente sont de loin l’oto-rhino-laryngologie (ORL) et la dermatologie, avec plus de 100 000 Québécois en attente d’une consultation (voir tableau).
Pour le Dr Oliva, une partie du problème réside dans le trop grand nombre de consultations référées par les médecins omnipraticiens. «Définitivement, il y en a trop», déclare-t-il.
Selon lui, le Centre de répartition des demandes de services, où sont acheminées les demandes, devrait aussi pouvoir filtrer leur pertinence.
«Même si les problèmes sont plus bénins, ça reste inacceptable d’attendre», précise-t-il, ajoutant que certains patients n’auraient même pas besoin d’une consultation.
Manque de médecins
Pour la présidente de l’Association des gastro-entérologues du Québec, la Dre Mélanie Bélanger, la province manque de spécialistes dans son domaine. Elle explique qu’il y a près de trois fois plus de cardiologues, par exemple.
Mélanie Bélanger souligne que beaucoup de malades entrent par l’urgence ou doivent faire l’objet de suivis fréquents en raison de maladies chroniques, comme la maladie de Crohn.
«C’est triste que les patients attendent», dit la docteure Bélanger. Mais face à l’augmentation constante des demandes, les gastro-entérologues doivent prioriser les cas urgents au détriment des malades moins graves.
L’une des solutions évoquées par les spécialistes est une plus grande utilisation du «conseil numérique». Cet outil mis en œuvre par la province permet aux omnipraticiens d’envoyer un courriel à un spécialiste, avec photos si nécessaire, pour juger de la pertinence d’une consultation ou proposer un traitement.
Lundi matin, Santé Québec a répondu par courriel qu' «aucune cause unique ne permet d’expliquer les délais, mais plutôt une combinaison d’éléments». L'agence écrit faire une revue des demandes hors délai, une gestion active des listes d'attente et une optimisation des trajectoires cliniques.
Par ailleurs, le gouvernement rattrape de plus en plus son retard en chirurgie. Au 31 mars, seulement environ 6000 patients attendaient depuis plus d’un an. Ils étaient plus de 20 000 il y a trois ans. La liste d’attente diminue également, affichant plus de 147 000 patients.
• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission d’Isabelle Maréchal, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
Toujours plus de Québécois attendent de voir un spécialiste
- 4 janvier 2020: 500 637
- 2 janvier 2021: 559 772
- 1er janvier 2022: 696 197
- 31 décembre 2022: 822 662
- 30 décembre 2023: 831 821
- 11 janvier 2025: 904 894
- 31 mai 2025: 909 019
Donnée inquiétante, le nombre de patients dont l’attente est considérée comme «hors délai» augmente lui aussi. Ils étaient plus de 580 000 ce printemps, soit 64% des demandes de consultation. En janvier 2020, les demandes hors délai se chiffraient à 35%.
Selon les cinq cotes de priorité, les délais peuvent être de moins de trois jours avant de voir le médecin à un an.
- ORL: 139 198 (63% hors délai)
- Dermatologie: 108 453 (65% hors délai)
- Immunologie: 84 561 (62% hors délai)
- Gynécologie: 74 778 (52% hors délai)
- Chirurgie plastique: 68 909 (80% hors délai)
- Gastro-entérologie: 60 959 (75% hors délai)