Un Lévisien accusé de terrorisme contre le gouvernement haïtien
L’homme de 51 ans aurait préparé une révolution armée pour renverser le pouvoir en Haïti, selon la GRC

Jérémy Bernier et Dominique Lelièvre
Un Lévisien fait face à des accusations exceptionnelles et particulièrement graves, lui qui aurait fomenté une révolution armée en Haïti, selon la GRC.
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La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a annoncé jeudi matin le dépôt d’accusations en matière de terrorisme contre Gérald Nicolas, 51 ans.
La police fédérale le soupçonne ni plus ni moins d’avoir « préparé une activité terroriste visant à renverser » le gouvernement du président Jovenel Moïse en Haïti, où il « prévoyait exécuter une révolution armée [...] pour ultimement prendre le pouvoir ».

Il aurait posé divers gestes « afin de faciliter l’organisation d’un groupe, dont l’intention était de participer à un coup d’État contre l’autorité établie ».
Il aurait toutefois échoué à mettre à exécution son plan et n’aurait rien à voir avec l’assassinat du président Moïse, qui a été attaqué par un commando armé dans sa résidence le 7 juillet 2021.
Stupéfaction
Selon des informations colligées par Le Journal, Nicolas serait né en République dominicaine et demeure au Québec depuis de nombreuses années.
Il a notamment exploité des résidences pour aînés de Chaudière-Appalaches.
Lui-même se dit plutôt originaire d’Haïti, le pays voisin. Il nie en bloc les faits reprochés, invoquant une histoire montée de toutes pièces.
Les révélations concernant ses présumées activités illicites ont causé la stupéfaction dans le quartier où il demeure à Lévis ainsi que dans la communauté haïtienne.
« Spécifiquement, ce que l’enquête tend à démontrer, c’est que M. Nicolas aurait voyagé non seulement en Haïti, mais dans plusieurs pays d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud pour faire du recrutement pour sa cause, lever du financement et aussi faire l’acquisition d’armes », explique le sergent Charles Poirier, porte-parole de la GRC.
Au bout du compte, il n’aurait pas réussi à se procurer les armes convoitées, selon M. Poirier, qui note le caractère « plutôt inusité » des accusations pour un citoyen de Lévis.
Arrêté il y a un an
La planification de son projet aurait débuté aussi tôt qu’en janvier 2020, selon les autorités fédérales.
Ce n’est toutefois qu’en juillet 2021 que l’Équipe intégrée sur la sécurité nationale de la GRC a amorcé son enquête après un signalement de la police de Lévis (SPVL) qui aurait découvert des informations préoccupantes lors d’une intervention auprès du quinquagénaire.
Cela a mené à son arrestation et à une perquisition par la GRC en novembre 2021. Il a ensuite été relâché sans dépôt d’accusation en raison de la complexité de l’affaire et parce que l’analyse de la preuve s’annonçait longue.
La police jugeait qu’il n’était pas une menace pour le public, car ses actions étaient uniquement dirigées vers Haïti, dit M. Poirier.
Selon l’acte de dénonciation, Gérald Nicolas aurait en outre réuni ou fourni des biens, notamment de l’argent, des tentes et une génératrice, sur une période d’un peu plus d’un an, à Québec, ailleurs au Canada, en Haïti et en République dominicaine.
En liberté
Il demeure en liberté en attendant de comparaître au palais de justice de Québec le 1er décembre sous trois chefs d’accusation (voir encadré).
Parallèlement, il attend sa peine dans un autre dossier après s’être reconnu coupable en août dernier d’avoir rendu accessible une image intime ou en avoir fait la publicité de manière non consensuelle.
– Avec Pierre-Paul Biron, Philippe Langlois et Marie Christine Trottier
Ce qu’on sait du suspect Gérald Nicolas
- 51 ans, de Lévis
- Comparaîtra le 1er décembre sous trois chefs d’accusation : quitter le Canada pour faciliter une activité terroriste, facilitation d’une activité terroriste et fournir des biens à des fins terroristes
- Serait né en République dominicaine
- A exploité une résidence pour aînés à Saint-Frédéric en Beauce pendant plusieurs années et une autre à Armagh, dont la certification a été révoquée par le CISSS en juin 2020
- Habitait à Gatineau en 2002 et à Pierrefonds en 1993
- Possède des actifs immobiliers totalisant un peu plus de 2 millions $, notamment quatre résidences à Lévis
Sources : GRC, plusieurs documents judiciaires et publics consultés par Le Journal et l’Agence QMI et CISSS de Chaudière-Appalaches
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