«Les enfants vont pouvoir faire des études»: un futur au Québec après sept ans d’incertitude pour cette famille tunisienne
Les demandeurs d’asile ont patienté plus de sept ans avant que leur résidence permanente soit approuvée en principe


Nora T. Lamontagne
Plonger les mains dans la terre, manger un sandwich avant d'aller au lit, apprécier la beauté du monde: des Québécois ont trouvé leur bonheur dans une panoplie de petites et grandes choses. Voici une série de témoignages pour vous inspirer.
Une famille de demandeurs d’asile déracinée de la Tunisie se réjouit de pouvoir enfin se projeter dans l’avenir au Québec, après sept longues années à craindre d’être renvoyée dans son pays.
«On a le sentiment que tout a changé pour nous», témoigne Mayssem Bouzidi, 44 ans, qui a fui son pays d’origine avec mari et enfants en 2017 après des menaces de mort.
Tous les quatre ont récemment appris que leur demande de résidence permanente pour des raisons humanitaires avait été approuvée en principe. Depuis, c’est le bonheur.
«Les enfants vont pouvoir faire des études», se réjouit Ferid Belkadhi, lui-même titulaire d’un baccalauréat en économie et gestion et inventeur à ses heures.
Plus une étudiante étrangère
Sa fille aînée, Leila, a terminé son secondaire en 2022, mais elle n’avait pas poursuivi au cégep en raison de son statut d’immigration.
Comme elle était considérée comme une étrangère, ses frais de scolarité se seraient élevés à plus de 12 000$ pour un DEC en sciences humaines, afin de devenir psychologue. Plus maintenant.
Quant au benjamin, Aziz, il s’est très bien acclimaté à sa nouvelle vie, au point d’oublier l’arabe de son enfance. Et puis, il y a la maladie de Mayssem. Atteinte d’un cancer du sein, elle suit des traitements depuis plusieurs mois à Montréal et elle en est infiniment reconnaissante.
Qui sait ce qu’un renvoi en Tunisie aurait eu comme effet sur sa santé?
«Le cancer n’attend pas», souffle-t-elle.
Les Belkadhi-Bouzidi ont appris l’acceptation de leur demande de résidence permanente au moment où ils s’y attendaient le moins.
• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission de Benoit Dutrizac, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
Empêtrés depuis 2017 dans un système d’immigration qui tourne au ralenti, ils avaient été convoqués dans les imposants bureaux de l’Agence des services frontaliers du Canada à Montréal, le 18 mars dernier.
«Le défaut de vous présenter à l’entrevue peut entraîner l’émission d’un mandat d’arrestation contre vous», les avertissait une lettre.
Des larmes de joie
Ferid Belkadhi, optimiste de nature, était convaincu qu’on ne leur annoncerait pas leur expulsion imminente du Canada.

Les autres membres de sa famille, eux, étaient plus que sceptiques, tout comme leur avocate.
«On s’était préparés à recevoir la pire des nouvelles et à être combatifs», raconte Me Marie-France Chassé, présente ce jour-là.
Et pourtant.
«L’agente nous a fait le plus beau sourire du monde et elle nous a dit: “J’ai une bonne nouvelle pour vous”», se souvient Ferid Belkadhi, 49 ans.
Malgré l’échec de leur demande d’asile, le Canada leur octroyait la résidence permanente en raison «de l’intérêt supérieur de [leur fils], des soins médicaux et des conditions défavorables en Tunisie».
Le père et la fille ont fondu en larmes, submergés par l’émotion. Ils pourraient rester au Québec, y vivre en sécurité, en famille et en français, comme ils l’ont toujours souhaité.
«C’était la joie, considérant la situation critique de [Mayssem]», ajoute Frantz André, qui a accompagné la famille dans les dédales de l’immigration.
Un mois après la bonne nouvelle, Ferid Belkadhi flotte encore sur un petit nuage.
«Quand je veux ressentir l’humanité, je relis cette décision», laisse-t-il tomber.