L’ancien grand patron de la Caisse de dépôt poursuivi pour manipulation boursière
Richard Guay aurait manipulé le marché boursier pour s’enrichir illégalement, selon l’AMF


Jean-François Cloutier
L’ancien grand patron de la Caisse de dépôt et placement du Québec Richard Guay aurait manipulé le marché boursier afin de s’enrichir en se servant notamment de comptes de membres de sa famille, selon l’Autorité des marchés financiers (AMF).
Le gendarme québécois des marchés financiers a intenté à la mi-mai un recours contre Guay pour un stratagème impliquant ses enfants et sa femme qui lui aurait permis de faire de l’évitement fiscal à grande échelle.
Une des filles de Guay aurait été de mèche avec son père, mais les autres auraient ignoré les transactions effectuées à leur nom.
Néanmoins, l’AMF a réclamé une ordonnance d’interdictions d’opérations sur valeurs partielles contre eux parce qu’ils auraient permis ou toléré qu’il réalise son stratagème «en se servant de leurs comptes autogérés».
L’AMF réclame 1,5 million $ à Guay. Cette somme représente l’avantage fiscal indu dont il a bénéficié avec ces transactions. Des pénalités administratives de l’ordre de 550 000$ sont aussi exigées.
L’AMF exige aussi que Guay ne puisse plus faire de transactions impliquant des valeurs mobilières ni qu’il puisse diriger un fonds d’investissement pour cinq ans.
Les transactions problématiques portaient sur un titre boursier, Imperial Equities, à la Bourse de croissance de Toronto, dont le volume de transaction était très faible.
En effectuant plusieurs transactions sur le titre, Guay aurait été en mesure de créer des pertes dans certains comptes et des gains à l’abri de l’impôt dans des comptes CELI.
Avertissements
L’AMF souligne comme circonstances aggravantes dans son recours avoir averti Guay à deux reprises de cesser ce genre de transactions, mais il aurait continué à le faire.
«Lors des deux rencontres avec les enquêteurs de l’AMF, Guay a tenté d’entraver leurs travaux en niant avoir orchestré un stratagème d’évitement fiscal», allègue de plus l’AMF.
Selon le recours, Guay détenait pas moins de 15 comptes de courtage et il aurait géré 25 comptes en incluant ceux de sa famille.
«Les 756 match trades que Guay a [...] réalisés lui ont permis d’effectuer un transfert de valeurs représentant un enrichissement injustifié des CELI de sa famille, tout en profitant d’un avantage fiscal généré par les pertes artificielles qui ont été reportées à ses déclarations d’impôt», avance l’AMF.
Guay est cité dans le recours en disant: «Je veux faire accumuler de l’épargne pour mes enfants, aider mes enfants». Il dit néanmoins plus loin qu’il a commis une erreur. «Je n’arrive même pas à m’expliquer qu’est-ce que je suis allé faire là».
«Je prends présentement connaissance de la procédure administrative de l’AMF et je l’analyse avec mes avocats et je ferai valoir mes droits, dont celui de me défendre face à cette procédure.
«Afin de protéger mes droits et sous les conseils de mon avocate, il ne me sera pas possible de commenter d’ici la fin de cette procédure administrative de l’AMF», a-t-il indiqué par courriel, ajoutant que, selon lui, le procès ne devrait pas avoir lieu sur la place publique.
QUI EST RICHARD GUAY?
Richard Guay a été nommé PDG de la Caisse de dépôt en septembre 2008 en pleine crise financière alors que le bas de laine des Québécois devait composer avec les problèmes du papier commercial et que les pertes étaient catastrophiques.
Il avait auparavant été le bras droit d’Henri-Paul Rousseau alors que ce dernier dirigeait la Caisse.
Guay a été mis au repos par son médecin en novembre 2008 pour épuisement pour ensuite prolonger son congé de maladie jusqu’en janvier 2009.
Par la suite, il a annoncé sa démission pour des «raisons personnelles».
Il a par la suite enseigné à l’UQAM, dont le site indique qu’il est toujours professeur et spécialisé dans la gestion des risques financiers, la construction de portefeuille et la finance comportementale, entre autres.
De 2019 à 2022, il a aussi été cotitulaire de la chaire de recherche Fintech AMF-Finance Montréal, soit à l’époque des faits qui lui sont reprochés, selon la procédure de l’AMF.
Il a également agi comme formateur à l’Association des analystes financiers de Montréal, à la Bourse de Montréal et à l’Institut des banquiers canadiens, tout en intervenant aussi dans les médias comme expert.
Guay a aussi été président des comités de placement du régime de retraite de HEC Montréal et du Fonds HEC Montréal. Il a quitté ses fonctions à HEC dans le contexte de l’enquête de l’AMF, nous a indiqué une porte-parole de HEC Montréal, Émilie Novales.
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