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L'article provient de Le Journal de Québec
Santé

Un défi de recrutement titanesque: le réseau de la santé a besoin de 120 000 nouveaux travailleurs d’ici cinq ans

Photo Agence QMI, MARIO BEAUREGARD
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Photo portrait de Hugo Duchaine

Hugo Duchaine

2023-02-13T17:00:00Z
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Recruter 120 000 employés : voilà la tâche colossale du réseau de la santé pour les cinq prochaines années afin de garder les services à flot.

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Les besoins de recrutement anticipés d’ici cinq ans sont énormes pour juguler la criante pénurie de main-d’œuvre. Par exemple :

  • Plus de 55 000 préposés aux bénéficiaires
  • Plus de 43 000 infirmières 
  • Plus de 12 000 travailleurs sociaux
  • Près de 5000 technologues

Sans compter les centaines d’inhalothérapeutes, de psychologues et de pharmaciens qui devront aussi venir gonfler les rangs du réseau.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) souligne que ces prévisions « représentent l’estimé du nombre d’embauches nécessaires pour remplacer les départs projetés du réseau et combler des besoins additionnels ».

Pour y arriver, il mise notamment sur les travailleurs étrangers, avec l’embauche de 1000 infirmières diplômées hors du pays au cours des prochaines années.

L’automne dernier, déjà 216 étudiantes infirmières avaient été recrutées. 

  • Écoutez la rencontre Montpetit-Fortin diffusée chaque jour en direct 13 h 55 via QUB radio :

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Formations et bourses

Formations accélérées et programmes de bourses sont aussi déployés pour les infirmières auxiliaires et les préposés aux bénéficiaires.

C’est l’une des solutions vers lesquelles s’est tourné le CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal pour combler ses besoins de main-d’œuvre dans ses 17 centres d’hébergement.

« Tous les programmes ne suffisent pas à la demande », remarque Frédéric Boulé, directeur adjoint en hébergement, d’où l’importance de diversifier la provenance des futurs employés.

Les formations accélérées ne remplacent pas le parcours scolaire en formation professionnelle, mais comblent un besoin plus immédiat.

Les boursiers s’engagent à travailler en CHSLD au moins un an. Et M. Boulé fait valoir que le taux de rétention est de 70 % après cette première année chez les quelque 900 individus formés au sein de son CIUSSS.

Pour Chantale Beaucher, directrice de l’Observatoire de la formation professionnelle du Québec et professeure à l’Université de Sherbrooke, une campagne de séduction s’impose néanmoins pour attirer les jeunes sortant du secondaire.

« Ce métier-là souffre un peu d’un problème d’image », se désole-t-elle, à propos du travail de préposé. Néanmoins, elle estime que la pandémie a contribué à faire valoir son importance.

Encore de la place

Par ailleurs, la pénurie de main-d’œuvre entraîne aussi une surcharge de travail et une détérioration des conditions, fréquemment décriées par les travailleurs de la santé actuels.

Or, le sombre portrait actuel ne décourage pas trop les futurs étudiants, souligne la directrice des études au Collège Rosemont, Marie-Claude Boutet.

L’établissement offre de nombreuses techniques liées à la santé, comme les soins infirmiers ou l’inhalothérapie.

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« Les demandes d’admission se maintiennent, mais dans la majorité de nos programmes, on pourrait accueillir plus d’étudiants », précise Mme Boutet.

  • Écoutez l'entrevue de Benoit Dutrizac avec Linda Jurick, fondatrice de la clique Talin sur QUB radio : 

Les besoins d’ici cinq ans

  • 1107 Infirmière praticienne spécialisée (IPS)
  • 12 850 Infirmière auxiliaire
  • 29 563 Infirmière technicienne et clinicienne
  • 1409 Inhalothérapeute
  • 764 Pharmacien
  • 55 707 Préposé aux bénéficiaires et auxiliaires
  • 1109 Psychologue
  • 4493 Technologues médicaux (imagerie médicale, radiodiagnostic, etc.)
  • 12 197 Travailleur social et agent de relations humaines
  • 119 199 personnes au total

Source : MSSS

Une vocation avant d’être un métier

De futurs préposés aux bénéficiaires entamant une formation accélérée pour travailler en CHSLD disent s’y lancer avant tout par vocation. 

Rencontré au deuxième étage d’une école primaire de Montréal, le groupe d’élèves qui entame une formation de trois mois est éclectique. 

Parmi eux, Louise Plante, âgée de 56 ans, est retraitée d’une banque et entame une deuxième carrière.

Azzedine Zidani, 38 ans, est nouvellement débarqué d’Algérie et Mariedith Gervais, 27 ans, veut se former après quelques années dans une ressource intermédiaire (RI).

Ils ont reçu une bourse de 9200 $ et s’engagent à travailler au moins un an dans un CHSLD du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, après leur formation menant à une attestation d’études professionnelles (AEP).

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«C’est ma vocation », lance avec confiance la plus jeune du groupe, qui se voit à long terme dans ce métier.

«J’aime aider les gens, je ne peux pas refuser un service», renchérit M. Zidani, qui a aussi épaulé un proche souffrant d’un cancer avant d’immigrer au Québec avec sa jeune famille.

Donner l’heure juste

«J’ai envie de me rendre utile», ajoute à son tour Louise Plante, qui a aussi un passé de secouriste.

«La profession est mal comprise, c’est tellement plus que [de changer des couches]. C’est un travail humain», dit-elle.

«Ce n’est pas un métier facile, mais tellement gratifiant», poursuit la formatrice Mélanie Valiquette, infirmière auxiliaire de profession.

Elle ne fait pas de cachettes à ses élèves sur le défi qui les attend ; il vaut mieux qu’ils lâchent en classe qu’une fois au chevet d’aînés.

«Je ne cache pas la réalité du métier à mes élèves [...]. Quand les patients vomissent ou lors des changements de culottes, c’est sûr qu’il y a des odeurs. Tu dois aussi vivre avec la mort, la vieillesse et les déficits cognitifs», énumère-t-elle.

«Mais c’est un honneur de pouvoir accompagner une personne dans ses derniers moments», ajoute Mme Valiquette.

Et autour d’elle, les trois élèves sont prêts à retrousser leurs manches pour aider les aînés à finir leurs vieux jours dans la dignité.

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