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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Un BAPE après la bataille: le Québec mérite mieux qu’un autre show de boucane

Photo OLIVIER FAUCHER
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Martine Isabelle, citoyenne de Blainville

2025-05-02T04:00:42Z
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Alors que les travaux d’agrandissement de l’entreprise américaine Stablex sont déjà bien entamés à Blainville, le ministre de l’Environnement, Benoit Charette revient soudainement sur sa position et n’exclut plus la tenue d’un BAPE générique sur la gestion des déchets dangereux. 

Pourtant, un mois plus tôt, la réponse de son cabinet à cette demande citoyenne était un « non » catégorique. Ce revirement n’a rien d’innocent. Pourquoi envisager un BAPE maintenant, une fois les lois votées sous bâillon, le terrain cédé, les recours rejetés et les pelleteuses à l’œuvre?

Parce que le gouvernement a sécurisé ce qui comptait vraiment : la satisfaction des intérêts privés. Il peut désormais feindre l’ouverture démocratique, sans risque de voir son projet ralenti.

Procédé toxique toléré par l'État

Un BAPE n’est pas un privilège. C’est un outil démocratique fondamental. Il aurait dû précéder toute décision législative et tout début de travaux. L’annoncer après coup, c’est tenter de calmer la grogne publique avec un simulacre de consultation.

Mais au-delà du manque de transparence, c’est le procédé même utilisé par Stablex — le Sealosafe® — qui pose un grave problème. Cette méthode de solidification/stabilisation des déchets toxiques est largement décriée. Elle consiste à mélanger les résidus à des liants pour en faire un amalgame censé être inerte. Or, plusieurs rapports environnementaux en ont démontré les limites, notamment en matière de lixiviation, de perméabilité et de stabilité à long terme.

Le plus troublant, c’est que le ministère de l’Environnement continue d’autoriser ce procédé, tout en classant son produit final comme une matière dangereuse résiduelle, par précaution. Plutôt que de le bannir, il exige quelques tests de performance sur site et renforce la surveillance. Pourquoi? Parce que Stablex détient l’exclusivité de ce procédé au Québec. L’interdire impliquerait de remettre en question toute la chaîne actuelle de traitement des déchets industriels. Et le gouvernement préfère éviter un tel bouleversement.

Un moratoire s’impose, maintenant

Cette complaisance est inacceptable. Pourquoi tolérer une technologie à risque, alors même que les citoyens et les municipalités s’y opposent? Pourquoi accorder un régime d’exception à une entreprise étrangère au détriment de la santé publique?

Il est temps de mettre fin à la politique des deux poids, deux mesures. Le Québec mérite des règles claires, équitables et appliquées rigoureusement. Un moratoire immédiat sur l’agrandissement de Stablex s’impose — tant que les impacts sanitaires, environnementaux et hydrogéologiques n’auront pas été évalués de façon indépendante et crédible. Le Québec n’a pas à devenir le dépotoir de l’Amérique du Nord. La population mérite des gestes concrets, pas un autre show de boucane.

Martine Isabelle

Citoyenne de Blainville

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