Encore un haut fonctionnaire qui se recycle en lobbyiste
Il sera payé entre 10 000 et 50 000 dollars pour ses conseils

Francis Halin
Un ancien sous-ministre adjoint de Pierre Fitzgibbon, qui a travaillé sur la filière électrique, demande un prêt de 6 M$ à Investissement Québec (IQ) pour une firme privée de batteries vertes.
« J’ai fait un an de purgatoire. Ça fait longtemps que je n’ai pas eu de contact avec les gens. Je ne vois pas de problème, c’est ce que la loi permet », a lancé Mario Bouchard, lobbyiste pour Annexair & Jarvis Inc., une filière de la PME d’appareils de ventilation Annexair, qui développe des batteries vertes.
À ce jour, celui qui a été sous-ministre adjoint au ministère de l’Économie et de l’Innovation (MEI) durant plus de 15 ans, jusqu’à juin 2020, a eu une seule rencontre avec Investissement Québec (IQ), affirme-t-il.
« Je fais des conseils stratégiques sur les interventions », a expliqué Mario Bouchard, qui veut un prêt de 6 millions $ pour un projet de batteries vertes de 15 M$.
Pour ses activités de lobbyisme, l’ancien haut fonctionnaire devrait recevoir entre 10 000 $ et 50 000 $, selon le Registre des lobbyistes.
Flying Whales
Après l’arrivée au pouvoir de la CAQ, Mario Bouchard avait poussé le projet de ballon dirigeable Flying Whales, dans lequel Québec finira par investir 30 M$.
C’est aussi sous sa direction que Québec a financé l’achat d’une usine de pâtes et papiers par Nexolia. La transaction avait enrichi l’entrepreneure Vicky Lavoie, qui l’avait revendue le double à peine deux ans plus tard.
Hier, Mario Bouchard a confirmé qu’il avait participé aux travaux de la filière électrique aux côtés d’IQ lorsqu’il était en poste au MEI.
« J’ai travaillé sur le comité, mais le rapport final, je ne l’ai même pas vu, j’étais parti », a-t-il dit de l’étude de McKinsey d’IQ, montrant que près de deux milliards de fonds publics pourraient être investis dans la filière.
Pour Michel Magnan, titulaire de la chaire en gouvernance Jarislowsky de l’Université Concordia, le lobbying de Mario Bouchard soulève des questions.
« Il a le droit de gagner sa vie. C’est tout à fait légitime. Mais est-ce qu’il a été sujet aux mêmes critères et aux mêmes règles qu’un autre individu qui n’aurait pas été sous-ministre adjoint ? » s’est-il demandé à voix haute.
Annexair n’a pas pu accorder d’entrevue au Journal hier en journée.
–Avec la collaboration de Sylvain Larocque
♦ En avril dernier, le MEI et IQ ont prêté 11 millions de dollars à Annexair pour automatiser ses activités et commercialiser un nouveau produit. Entre 2014 et 2020, la firme a obtenu plus de 13 millions $ d’aides publiques, dont 5,5 millions $ de prêts sans intérêts.