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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Trump s’attaque à la liberté d’expression

Photo AFP
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Photo portrait de Loïc Tassé

Loïc Tassé

2025-02-07T20:30:00Z
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Trois décrets signés jeudi par Donald Trump attaquent indirectement la liberté d’expression des Américains. Ces attaques sont juridiques, financières et idéologiques. Étant donné l’abondance de nouvelles, ce nouveau climat de censure est passé inaperçu. Le premier décret a été amplement couvert par les médias. Il s’agit de l’imposition de sanctions contre la Cour pénale internationale (CPI). Le second concerne «l’éradication des partis pris antichrétiens». Le troisième touche les politiques de financement des organisations non gouvernementales (ONG).

1) En quoi le décret sur les sanctions contre la CPI nuit-il à la liberté d’expression?

La CPI est accusée de mener sans justification des enquêtes sur des ressortissants des États-Unis et d’Israël, qui sont deux démocraties et qui, plaide Trump, respectent scrupuleusement le droit de la guerre. Mais, ajoute Trump dans le préambule du décret, les actions de la CIP constituent «une menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité nationale». Trump déclenche donc à cet égard «une urgence nationale». Pourtant, il n’y a pas encore de jugement contre des soldats américains ni contre des dirigeants de ce pays. Les enquêtes sont encore moins terminées. Trump vient ainsi de lancer une urgence nationale contre l’opinion de juristes internationaux. Bref, au nom de la sécurité nationale, Trump veut faire taire la CPI. Quelles autres atteintes à la liberté d’opinion va-t-il imposer au nom de la sécurité nationale?

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2) En quoi le décret sur l’éradication des partis pris antichrétiens atteint-il le droit de parole?

Trump cherche ici à stopper les actes de vandalisme contre les églises. Il veut aussi placer les croyances des pratiquants au-dessus des lois votées par les élus, notamment lorsqu’ils sont forcés d’adopter les théories de genre. Les groupes fondamentalistes religieux, qui aux abords des cliniques d’avortement harcellent les femmes qui désirent se faire avorter, doivent aussi être protégés. Trump crée donc une force de frappe chargée de lui faire des recommandations pour éradiquer les partis pris antichrétiens. Mais qu’est-ce que des partis pris antichrétiens? L’enseignement de l’évolution et des théories de Darwin? La critique des religions? La promotion de l’athéisme ou même de l’agnosticisme? Ces questions sont d’autant plus brûlantes que Trump va ouvrir au sein de la Maison-Blanche un bureau de la Religion à la tête duquel il placera Paula White, une télévangéliste. Celle-ci prêche la «théologie de la prospérité», une idéologie tordue selon laquelle plus une personne est croyante, plus elle serait choyée par Dieu, et donc, riche.

3) En quoi le décret sur les politiques de financement des ONG brime-t-il la liberté d’expression?

Le décret sur le financement des ONG leur impose de s’aligner complètement sur les positions politiques du gouvernement de Trump, faute de quoi elles seront privées de leur financement. Donc toute parole et, bien entendu, tout geste de la part de leurs dirigeants qui pourraient s’opposer à Trump risquent d’entraîner la fin de leur financement. C’est de la terreur politique.

4) Que pourrait décider la Cour suprême des États-Unis?

La légalité de ces décrets pourrait être contestée en cour de justice. Cependant, ces procès ont peu de chance d’aboutir avant plusieurs années. Et la Cour suprême, devenue très partiale, risque de se ranger du côté de Trump.

5) D’autres décrets en ce sens sont-ils à prévoir?

Plusieurs autres décrets en ce sens seront probablement signés. Par exemple, Trump n’a jamais caché son intention de se débarrasser des journalistes et des chroniqueurs qui le critiquent.

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