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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Trump masque le cauchemar de nos PME

Les travailleurs étrangers temporaires sont le tabou de cette campagne électorale

Photo AFP
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Photo portrait de Emmanuelle Latraverse

Emmanuelle Latraverse

2025-03-28T15:30:00Z
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Trois jours, trois récits, un même constat. Pour bien des entreprises au Québec, Donald Trump ne représente pas la pire menace à leur avenir.

Ses tarifs sont certes un casse-tête, un risque dont elles n’ont pas besoin. Mais elles sont résilientes, et les gouvernements se mobilisent pour les aider à traverser cette période difficile.

Le pays ne parle que d’une chose: comment sauver notre économie? Pourtant, ce qui hante réellement les entrepreneurs, c’est l’enjeu dont personne ne veut parler. Un véritable tabou à l’heure où même le nouveau chef libéral reconnaît qu’il faut réduire drastiquement l’immigration.

Ce qui les garde éveillés la nuit, c’est la perspective de voir leurs travailleurs étrangers temporaires forcés de rentrer dans leur pays. Et ça, personne n’en parle.

De Saguenay à Montmagny

Le collègue Antoine Robitaille a raconté l’angoisse des entrepreneurs du Saguenay.

«On demande aux entreprises de participer à la guerre commerciale, mais on leur dit: débarrassez-vous de vos soldats!» lui a raconté Jean-Denis Toupin, de Proco – fabricant de ponts et d’ouvrages métalliques. Il craint de perdre la moitié de ses 94 soudeurs mexicains.

La veille à Montmagny, les journalistes locaux n’avaient pas de difficulté à s’entendre sur LA question à poser à Pierre Poilievre: les travailleurs étrangers temporaires.

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Capture d'écran TVA Nouvelles
Capture d'écran TVA Nouvelles

Dans les MRC de Montmagny et de L’Islet, on en compte près de 450. Fabricants de meubles, usines d’emballage: partout le même récit. Sans ces soudeurs, machinistes, opérateurs de presse venus d’ailleurs, ils craignent devoir mettre la clé sous la porte.

Le grand virage vers l’automatisation ne se fera pas du jour au lendemain. C’est pourquoi la Fédération des Chambres de Commerce du Québec plaide pour un moratoire sur les restrictions de visas, afin de surmonter la guerre commerciale avec les États-Unis.

Le vrai dilemme

Dans ce contexte, la promesse de Pierre Poilievre de laisser le Québec choisir ses candidats au Programme de mobilité internationale prend tout son sens. Chaque région a ses défis. Montréal n’est pas Val-d’Or.

Les dérives de l’ère Trudeau ont empoisonné le débat sur l’immigration, imposant une ligne dure dans une économie vieillissante où certaines régions souffrent d’une grave pénurie de main-d’œuvre.

François Legault n’a pas caché son enthousiasme jeudi, lui qui peste contre les immigrants temporaires depuis plus de deux ans. Pourtant, si un gouvernement Poilievre remettait au Québec le choix de ses travailleurs étrangers temporaires, Legault devrait en assumer l’entière responsabilité politique.

Il n’aurait plus le luxe de pester contre Ottawa. 

Legault devra désormais trancher dans le vif, arbitrant un débat aussi déchirant que polarisant après des années à dépeindre les «temporaires» comme une menace à l’identité québécoise. Chaque décision sera un exercice d’équilibrisme entre les impératifs économiques des PME plongées dans le chaos trumpien et les impératifs identitaires dont il s’est fait le champion.

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