Trump et les vendeurs du Temple

Luc Laliberté
La distribution ou la vente d’objets promotionnels est aussi vieille que les campagnes électorales aux États-Unis. Déjà, sous George Washington on pouvait obtenir un bouton commémoratif.
Ici encore, Donald Trump n’a rien inventé, mais il pousse cette pratique à un niveau inégalé. Après le parfum (Victory 47) et les chaussures (Trump Sneakers), la semaine dernière c’est la Bible qu’il tentait de monnayer.

Alors qu’on s’apprêtait à célébrer la fête de Pâques, le candidat républicain est-il allé trop loin en tentant de soutirer des profits à l’aide du livre saint?
Réactions partagées des chrétiens
Depuis son arrivée sur la scène politique, Trump étonne par sa capacité à courtiser l’électorat chrétien.
Même si les croyants connaissent ses antécédents et qu’ils considèrent qu’il est un messager imparfait, ils sont convaincus que Dieu guide sa réflexion et ses décisions.
Ils sont 64% à considérer que le 45e président est un homme pieux et que la ferveur de sa foi est supérieure à celle de son ancien vice-président, Mike Pence, pourtant l’incarnation de cette droite morale et religieuse.
Qu’il soit sincère ou non, Donald Trump a donné à cette clientèle électorale exactement ce qu’elle cherchait.
Il se présente en pourfendeur de la gauche progressiste qui aurait pour mission de persécuter les chrétiens et ses trois nominations à la Cour suprême assurent des décisions plus conservatrices pour au moins vingt ans.
Malgré ce qui précède, de nombreux chrétiens ont réagi vigoureusement en apprenant que le candidat républicain s’associait à la vente de la Bible.
«Sacrilège», «hérésie», «blasphème» et «insulte» ne sont que quelques-uns des termes utilisés pour exprimer la colère et le dégoût.
Si plusieurs ont cité des passages de la Bible pour appuyer leurs propos, je me suis souvenu de cette scène du Nouveau Testament où Jésus chasse les vendeurs du Temple.
- Écoutez la chronique politique américaine avec le professeur Luc Laliberté via QUB :
Une stratégie douteuse
S’il est facile de comprendre que Donald Trump a besoin de liquidités et qu’il joue la carte du «Messie», au plan politique, je ne suis pourtant pas convaincu que sa stratégie soit gagnante.
Une partie de son électorat est constituée de nationalistes chrétiens qui vont peut-être s’arracher sa Bible et les documents qui l’accompagnent, mais est-ce bien prudent de risquer de se mettre les autres à dos?
À l’image d’un Biden qui ne peut se permettre de perdre des appuis, le républicain sait qu’il ne peut l’emporter en ne misant que sur les nationalistes chrétiens.
Non seulement Trump a besoin de tous ceux qui lui sont fidèles, mais il tarde encore à adapter son message pour attirer des républicains plus modérés et des indépendants.
Espère-t-il coiffer Biden dans les États pivots en misant sur des projets qui divisent au sein même de son électorat?
Malgré une victoire facile face à Nikki Haley, il est impossible que les stratèges républicains n’aient pas remarqué les failles dans la candidature de Trump.