Tramway de Québec: des citoyens conseillés par Guy Bertrand veulent contester le projet en cour
L’avocat Guy Bertrand épaule des citoyens qui envisagent le dépôt d’une demande d’injonction


Jean-Luc Lavallée
Conseillé par l’avocat Guy Bertrand, un regroupement citoyen envisage la voie légale pour bloquer le projet de tramway, forcer la Ville de Québec à réaliser une nouvelle étude « objective » sur d’autres modes de transport et tenir un référendum.
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Armés d’un avis juridique produit par Me Bertrand et Me André Binette, ces opposants au tramway – dont le groupe est baptisé « Québec mérite mieux » – pensent avoir des chances réelles de gagner cette bataille en Cour supérieure avec une éventuelle demande d’injonction.
Dans leur exposé de 20 pages, les deux avocats constitutionnalistes taillent en pièces le projet de tramway et reprennent à leur compte de nombreuses critiques émanant du rapport du BAPE (Bureau d’audiences publiques sur l’environnement) en 2020.

Le BAPE – qui a un rôle consultatif – n’avait pas recommandé le projet de près de 4 milliards $ et avait invité la Ville de Québec à refaire ses devoirs et à explorer d’autres avenues.
« L’option du métro léger n’a pas été convenablement considérée » par Systra, pouvait-on lire dans le rapport rendu public il y a un an et demi.
Les opposants au tramway veulent que la Ville évalue aussi un projet d’autobus électriques et qu’elle considère à nouveau l’ancien tracé du défunt SRB sur Charest.
« Est-ce qu’on a choisi le bon moyen pour résoudre le problème de transport collectif ? La réponse, c’est non. Ça a été fait de façon cavalière. Ça n’a jamais été la question de l’urne », résume Me Bertrand en entrevue.

Abus de pouvoir
Les avocats tirent à boulets rouges sur la Ville de Québec, le ministère de l’Environnement et le Conseil des ministres qui ont fait fi du rapport du BAPE et ont autorisé le projet alors qu’il n’y a « pas d’acceptabilité sociale », assènent-ils.
Ils accusent les autorités d’avoir « abusé » de leur pouvoir, d’avoir manqué d’honnêteté et de transparence. Et ils condamnent un « détournement de la démocratie municipale », ce qui pave la voie, selon eux, à une contestation judiciaire.

L’ex-maire Régis Labeaume n’a jamais soumis son projet au vote populaire lors de la campagne électorale de 2017, rappellent-ils, alors que le nouveau maire Bruno Marchand a « abandonné », une fois élu, des engagements (concernant la plateforme de béton, les coupes d’arbres et la dissimulation des fils électriques) visant à améliorer le projet.
Le duo d’avocats pense aussi être en mesure d’invalider un décret du Conseil des ministres qui autorise le projet et le règlement municipal RVAQ 1349 – lequel n’a pas encore été adopté – qui permettra d’accélérer la mise en œuvre du projet en vertu de l’article 74.4 de la Charte de la Ville, perçu comme un « bâillon » par les anti-tramway.
Campagne de financement
Les opposants déplorent notamment les coupes d’arbres, l’arrivée de fils électriques qui « défigureront » la Ville, la plateforme de béton surélevée, les expropriations, la congestion accrue au centre-ville pendant et après les travaux, ainsi que la pollution sonore.
Ils misent sur les dons du public, sur le site web de Québec mérite mieux, pour financer leur croisade.

« Ce projet-là va être une catastrophe pour Québec et c’est notre devoir de citoyen de se lever pour l’arrêter », a commenté Donald Charette, chroniqueur régulier à CHOI et membre fondateur du groupe.
Parmi les autres membres du groupe, on retrouve notamment Dorys Chabot - connue pour son combat pour sauver les arbres sur René-Lévesque - ainsi que deux candidats défaits de Québec 21 à la dernière élection : Marc Roussin (cofondateur de Tramway Non Merci) et le gestionnaire immobilier Jean-Pierre Du Sault.
L'ex-cheffe de Démocratie Québec Anne Guérette ne fait finalement pas partie du regroupement contrairement à ce que M. Charette avait avancé mercredi.
En entrevue, Me Bertrand, âgé de 85 ans, a dit espérer pouvoir « plaider cette cause-là avant de mourir ».
Extraits de l’avis juridique
« Nous sommes d’avis que les demandeurs ont une cause sérieuse à faire valoir devant la Cour supérieure. Cette cause, ils pourront la présenter la tête haute et avec confiance même si aucune garantie de victoire ne peut leur être accordée.
« Une demande d’injonction permanente contre la réalisation des travaux et contre l’émission du permis ministériel prévu à l’article 22 LQE [...] est justifiée.
« La cueillette des faits qui ont été portés à notre connaissance, dont plusieurs émanent du rapport du BAPE, nous ont permis de constater les multiples abus, actes illégaux et décisions déraisonnables des autorités municipales de la Ville de Québec avec l’aval, dans certains cas, du gouvernement québécois.
« La Ville a, ni plus ni moins, imposé le projet actuel à ses résidents, en prenant soin de façon systématique d’écarter toute demande d’ouverture de registres ou de pétitions qui auraient mené à une consultation populaire. »
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