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L'article provient de Le Journal de Montréal
Justice et faits divers

Traduction des jugements: Québec fera appel

Photo Chantal Poirier
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Michael Nguyen et Patrick Bellerose

2024-05-21T14:23:56Z
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Québec fera appel d’un jugement «particulier» rendu par un juge de la Cour du Québec qui souhaite passer outre l’obligation de traduire ses décisions «immédiatement et sans délai» en français. 

• À lire aussi: Traduction des jugements en français: Québec veut interdire au juge Dennis Galiatsatos de trancher

Le juge Dennis Galiatsatos a décrété, vendredi dernier, son intention de ne pas se conformer à l’article 10 de la nouvelle Charte de la langue française.

Celle-ci prévoit que les tribunaux doivent désormais accompagner leurs jugements rendus en anglais d’une version en français.

«On a reçu un jugement de la Cour du Québec, la semaine dernière, un jugement très particulier. Et donc, je peux vous informer que le gouvernement du Québec va aller en appel de ce jugement», a déclaré d’entrée de jeu le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, à l’Assemblée nationale, mardi.

Fait à noter, selon le ministre, la décision du juge Galiatsatos s’applique uniquement à la cause qui est présentement devant lui, soit celle de Christine Pryde, accusée de négligence criminelle ayant causé la mort d’un cycliste.

Le jugement rendu vendredi ne permet donc pas aux autres juges de rendre une décision en anglais uniquement.

Mais le juge Galiatsatos fait une tout autre lecture et affirme que sa décision s’applique à l’ensemble de la Cour du Québec, même si les tribunaux supérieurs n’ont pas à la suivre.

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Délais

Comme c’est son droit, l’accusée dans cette affaire, Christine Pryde, avait réclamé un procès en anglais. Or, la nouvelle Charte de la langue française, qui entrera en vigueur dans 10 jours, impose aux juges des obligations de rendre des traductions françaises de leurs décisions en anglais, le tout «immédiatement et sans délai».

Voyant là un enjeu légal, le juge Galiatsatos s’était penché sur la question. C’est que selon lui, la traduction d’une décision peut prendre du temps, et donc engendrer des délais.

«Les juges manient les mots, un souci particulier est mis au choix de chaque mot, a-t-il dit. Malgré toute la bonne volonté d’un interprète, une traduction peut ne pas être satisfaisante.»

Accès aux jugements

Mais le ministre Jolin-Barrette fait valoir que la justice doit être publique et que la langue officielle du Québec est le français.

«C’est important que les journalistes, les citoyens, les partis, la population puissent comprendre les jugements qui sont rendus par l’État québécois», estime Simon Jolin-Barrette.

«Au Nouveau-Brunswick, ils le font. À la Cour suprême, ils le font. Et au Québec, nous on ne ferait pas? Ça n’aurait aucun sens», a renchéri son collègue ministre de la Langue française, Jean-François Roberge.

Flèches contre la CAQ

Dans son jugement, le juge Galiatsatos en profite pour fustiger le procureur général du Québec, qui a fait allusion à l’utilisation de l’intelligence artificielle pour aider à traduire les décisions plus rapidement.

«Le langage de Shakespeare va être converti dans la langue de Molière via R2D2», écrit le juge en référence au célèbre droïde des films Star Wars.

Le magistrat en a rajouté une couche en reprochant ensuite au gouvernement de la CAQ d’avoir gardé le silence sur les mesures qu’il compte mettre en place pour s’assurer que l’article de la charte s’appliquera sans causer trop de désagréments.

«C’était comme le secret de la Caramilk», a-t-il ironisé.

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