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L'article provient de Le Journal de Montréal
Politique

Tous à la binerie!

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Photo portrait de Mathieu Bock-Côté

Mathieu Bock-Côté

2024-02-15T05:00:00Z
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Que la transparence soit généralement considérée comme un principe essentiel en démocratie est admis dans nos sociétés. C’est sur elle que reposent notamment les lois d’accès à l’information, essentielles au bon fonctionnement de la vie civique. Nos gouvernements oublient d’ailleurs que lorsqu’ils se refusent aux principes élémentaires de la transparence, ils sèment les conditions d’une plus grande méfiance. 

Mais on tend à oublier que la transparence peut vite devenir tyrannique si elle ne s’accompagne pas d’un jugement éclairé de la part des citoyens, capables de distinguer entre un véritable abus et une légitime dépense, même si elle ne correspond pas aux codes de la vie ordinaire.

Transparence

Je vais le dire clairement: il est normal, lorsque nos élus voyagent dans le cadre de leurs fonctions, qu’ils voyagent en classe affaires. Ils doivent arriver à leur lieu de destination en bon état, et doivent souvent travailler pendant leur déplacement. Il ne devrait pas y avoir le début d’un scandale là-dedans.

De même, lorsqu’ils ont des dîners ou des soupers dans le cadre de leurs fonctions, il va de soi qu’ils ne doivent pas se retrouver dans l’équivalent de la binerie du coin, et qu’ils se retrouveront dans des restaurants que l’on dira prestigieux, et qui coûtent plus cher qu’un restaurant ordinaire.

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Il va aussi de soi qu’ils y boiront une bouteille de vin qui ne se classera pas exactement dans la catégorie des vins de dépanneur. Il va de soi, autrement dit, qu’il y aura de l’alcool au menu, et qu’il s’agira probablement d’un alcool de qualité.

  • Écoutez la rencontre Mathieu Bock-Côté et Richard Martineau via QUB :

Il va de soi, de même, que si le gouvernement du Québec organise une réception officielle pour tel ou tel visiteur étranger, il s’agira d’un repas de grande qualité.

Écrivant cela, j’ai l’impression d’écrire des évidences. Mais le Québec a un étrange réflexe de temps en temps. Un réflexe provincial. Pire, un réflexe villageois. Le réflexe de Rénald dans La petite vie. Un réflexe de ti-cheap. Qui est aussi un réflexe de ti-coune. Qui est l’autre nom de notre vieux fond colonisé.

On reconnaît à Ottawa le droit de se comporter en État à part entière, avec la part de grandeur qui l’accompagne. Mais les Québécois doivent traiter leur État, pourtant le seul dont ils disposent, comme s’il s’agissait du conseil municipal d’un village perdu qui pourrait s’appeler Saint-Gérard-de-l’Artichaut.

Jalousie

On les pousse à se surveiller les uns les autres de manière jalouse, on rêve de voir les politiciens s’habiller en cotons ouatés, avec des godasses sales, pour qu’on soit bien certains qu’ils ne se prennent pas pour d’autres.

Petit souvenir: en 1994-1995, de la grande moquerie qui avait entouré la décision de doter le premier ministre d’une résidence de fonction. On y voyait un caprice d’apprenti souverain.

On y revient: les deniers publics doivent être dépensés intelligemment, avec parcimonie. Mais il ne faut pas confondre cette vertu avec la mesquinerie et la radinerie. N’est-ce pas?

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